Photo d'archives d'affiches de l'ancien dirigeant chinois Mao Tsé-toung (à droite) et de l'actuel président Xi Jinping © AFP/Archives GREG BAKER
Il est le plus puissant dirigeant chinois depuis un quart de siècle et en passe de se transformer en « empereur rouge »: omniprésent dans les médias et objet d’une intense propagande, Xi Jinping, 64 ans, a rétabli autour de lui un quasi-culte de la personnalité.
Après avoir dirigé la Chine d’une main de fer depuis cinq ans, Xi Jinping pourrait rester président de la République populaire aussi longtemps qu’il lui plaira, à la faveur d’un changement constitutionnel supprimant la limite de deux mandats présidentiels.
Cette restriction avait été imposée pour éviter l’autoritarisme, les violences et luttes factionnelles ayant marqué le règne de Mao Tsé-toung (1949-1976), père fondateur du régime, et pour favoriser une gouvernance collective.
Or, M. Xi, tête ronde et silhouette massive, surnommé affectueusement « Tonton Xi » (Xi Dada) par le grand public, est déjà comparé à Mao pour le culte dont il fait l’objet et la concentration des pouvoirs qu’il a accumulés.
Secrétaire général du PCC, « noyau » du Parti, président du pays, chef de la commission militaire centrale… Xi Jinping cumule depuis 2012 les fonctions à la tête de la deuxième puissance mondiale.
Dans les boutiques de souvenirs, des assiettes et bustes à son effigie côtoient les objets commémorant Mao.
L’homme fort de Pékin occupe la majeure partie du journal télévisé du soir, recevant des dirigeants étrangers, discourant devant des assemblées de cadres qui l’applaudissent frénétiquement, ou encore — comme c’était le cas mi-février au Sichuan (sud-ouest) — visitant des campagnes démunies où il est acclamé sans discontinuer de village en usine.
Ces mises en scène s’accompagnent d’une répression féroce contre tout contre-pouvoir et d’une drastique censure étouffant les voix dissonantes, au nom de « la stabilité sociale ».
– ‘Renaissance’ –
Omniprésent à la une des journaux, M. Xi est présenté par la propagande comme le visage rassurant d’un pays sûr de lui et rêvant de « grande renaissance » après un siècle et demi de déclin et d’humiliations.
Xi Jinping est né dans un milieu privilégié, le 15 juin 1953 à Pékin: il est le fils de Xi Zhongxun, l’un des fondateurs de la guérilla communiste, et appartient à la puissante caste des « princes rouges », descendants des révolutionnaires arrivés au pouvoir en 1949 avant d’être broyés par les purges de Mao.
Mais M. Xi cherche volontiers à gommer ses origines et cultive une image de dirigeant proche du peuple: la propagande insiste sur sa vie frugale dans une grotte à la campagne pendant la « Révolution culturelle » (1966-76)… ou le montre dégustant des raviolis dans une ruelle pékinoise.
Avec la fin des troubles de l’ère maoïste, il décroche un diplôme d’ingénieur chimiste de la prestigieuse université Tsinghua à Pékin mais fait carrière dans l’appareil du Parti, où il entre à 21 ans.
Gouverneur du Fujian en 1999, patron du Parti au Zhejiang en 2002, deux provinces côtières vitrines des réformes économiques, il entre en 2007 au Comité permanent du Bureau politique, le cénacle dirigeant du PCC, dont il prendra les rênes en novembre 2012, avant d’être automatiquement désigné président du pays.
Depuis, il a engagé une vaste campagne anticorruption, l’occasion selon certains observateurs de viser ses opposants au sein du Parti, tout en nommant des proches à des postes-clefs.
En dépit des déboires subis par sa famille sous Mao, Xi Jinping reste farouchement attaché au Parti: traumatisé par l’effondrement de l’URSS, il voit dans Gorbatchev et sa politique d’ouverture un contre-modèle à éviter, et son régime impose un durcissement idéologique tous azimuts, des écoles à l’internet.
Le président chinois, qui avait séjourné aux Etats-Unis en 1985 pour étudier l’agriculture, a épousé en secondes noces en 1987 la chanteuse Peng Liyuan, alors beaucoup plus célèbre que lui. Le couple a une fille, ayant étudié à Harvard mais tenue à distance des médias.
Son visage poupin vaut à Xi Jinping les moqueries d’internautes qui l’ont comparé à… Winnie l’ourson. Tout commentaire sur le nounours avait été bloqué l’été dernier sur les réseaux sociaux, et dimanche soir, des internautes sarcastiques partageaient une image montrant Winnie… couronné sur un trône.
LNT avec Afp