Le Fonds Mohamed VI pour l’investissement lance un nouveau produit de financement destiné à accompagner les PME dans la réalisation de leurs projets. Il s’agit de CapAccess, qui comme son nom l’indique touche au capital de la PME, réputé être faible et constituer un handicap au financement bancaire faute de surface et de santé financières.
Ainsi, CapAccess se base sur un mécanisme double de financement de l’entreprise par un crédit bancaire d’une part, et un crédit subordonné du FM6I pour la consolidation de ses fonds propres, d’autre part.
Pour comprendre le mécanisme de ce nouvel outil de financement, on peut se baser sur le cas d’une PME qui demande 15 millions de dirhams à une banque qui lui oppose qu’elle n’a pas assez de fonds propres, considérant qu’elle doit renforcer sa situation de 5 Mdhs pour obtenir un montant de 10 Mdhs.
Dans ce cas, le FM6I avec CapAccess apportera les 5 Mdhs à la PME permettant ainsi à la banque de lui accorder le crédit de 10 Mdhs.
Sachant que cet exemple n’est pas anodin puisque l’accompagnement du FM6I consiste en une contribution du tiers du montant du crédit bancaire. Ce, avec la précision qu’une hiérarchie est établie entre ces deux contributions dont celle du FM6I est qualifiée de subordonnée.
En l’occurrence, l’avantage de la dette subordonnée est d’être acceptée en quasi-fonds-propres et logée dans le haut du bilan de la PME, avec le bémol qu’elle est positionnée en dette « junior », donc subordonnée à la dette bancaire qui l’accompagne.
Cette subordination de la dette support de CapAccess, se matérialise à travers les clauses contractuelles du financement qui lui attribuent un rang en dessous de la dette bancaire en matière de suretés, ce qui signifie avec moins de garantie et que le crédit principal passe en premier dans le cas de défaillance du client. La dette subordonnée s’étale sur une durée déterminée souvent avec un différé de remboursement plus long pour soulager la trésorerie de l’entreprise bénéficiaire de ce mode de financement et de ce fait, est assortie d’un taux d’intérêt élevé.
Le financement subordonné de rang inférieur est ainsi utilisé pour financer des entreprises qui connaissent une croissance rapide, ainsi que des fusions et acquisitions, lorsqu’il n’y a pas suffisamment d’actifs pour garantir un financement prioritaire adéquat. Aux États-Unis notamment, ce type de financement est destiné aux entreprises très risquées ou en forte croissance, en tant que mécanisme de renforcement rapide de leurs fonds propres de façon temporaire, en attendant la réalisation de leurs projets.
Donc, avec CapAccess, le nouveau produit de dette « subordonnée », le FM6I veut soutenir les entreprises marocaines porteuses de projets d’investissements viables, dont le niveau de fonds propres est en deca des exigences bancaires.
Dans son rôle traditionnel d’intermédiaire entre les banques et les PME, Tamwilcom est en charge du lancement début avril de ce mode de financement exclusivement dédié à l’investissement.
Toutefois, alors que le FM6I a fait prévaloir des outils de financement innovants public-privés pour le financement de l’investissement à grande échelle avec une nouvelle charte d’investissement en guise d’incitation à l’investisseur privé, CapAccess reste un financement bancaire couplé avec un financement du FM6I.
De plus, il s’agit d’un nouveau prêt lancé sur un espace existant qui est déjà beaucoup servi, celui de la PME. Le FM6I intervenant essentiellement pour partager le risque avec la banque en prenant en dette subordonnée le tiers du crédit d’investissement en question, faisant de CapAccess un produit trop risqué. Ce dernier étant le coût du renforcement des fonds propres de l’entreprise. De fait, en cas de défaut CapAccess passera après le remboursement du crédit bancaire auquel il est associé, d’où sa qualité de subordonné.
Il faut savoir que ce n’est pas un produit du marché des capitaux mais un produit simplement bancaire et ne ressemble aux obligations subordonnées que parce que en cas de pépin le FM6I ne sera pas prioritaire, qu’il intervient comme un « garant ».
L’intérêt par ailleurs, est que ce type de crédit est dit subordonnée parce qu’il est destiné à être classé parmi les fonds propres des entreprises pour relever leur faible niveau.
Concrètement les entreprises feront leur demande de crédit aux banques qui les présenteront à Tamwilcom pour concrétiser l’apport du tiers par la FM6I.
Les banques seraient certainement friandes et profiteraient de CapAccess pour financer les investissements de leurs clients parce que soutenues à deux niveaux par la FM6I, qui les accompagnera en prenant en charge le tiers du crédit et en endossant une partie du risque et en cas de non-remboursement définitif celui-ci deviendra actionnaire de la PME.
Ainsi, sa participation est apparentée à du capital risque et devrait être rémunérée à 10 ou 12 % selon la norme admise pour ce type de financement de second rang. Mais, le FM6I a décidé de réduire ce taux à 5,5% pour l’année 2024 pour favoriser le lancement de CapAccess. Mais, encore faut-il que les entreprises suivent !
Surtout que le vrai problème du Maroc est qu’il y a peu de projets d’investissements et que les investisseurs ne sont pas en confiance par rapport à l’environnement économique.
Pourtant, pour les entreprises qui bénéficieront de CapAccess, leur ouverture de capital au FM6I pourrait les préparer à une éventuelle introduction en bourse pour un accès au financement gratuit sur le marché financier. CapAccess permettrait ainsi une institutionnalisation des PMEs marqué au sceau de la transparence.
En attendant le programme national d’accompagnement des PME que suggère le nouveau modèle de développement !
Afifa Dassouli