L’heure du face-à-face a enfin sonné.
Donald Trump et Vladimir Poutine se retrouvent lundi à Helsinki pour un sommet extrêmement attendu où leurs mots, mais aussi le moindre de leurs faits et gestes, seront scrutés à la loupe.
Le tempétueux milliardaire américain, au pouvoir depuis 18 mois, affiche l’espoir de nouer une relation personnelle avec l’ex-officier du KGB, qui tient les rênes du pouvoir en Russie depuis 2000.
Difficile de prédire, pourtant, quel ton adoptera le locataire de la Maison Blanche, connu pour son goût de la provocation.
De la Syrie à la Crimée, nombre de diplomates et d’analystes redoutent qu’il ne fasse une série de concessions à l’homme fort du Kremlin.
« C’est une bonne chose de se rencontrer. Je crois aux rencontres », a déclaré sur CBS le président américain, tout en assurant avoir des « attentes limitées ».
Vladimir Poutine, qui est attendu en fin de matinée après avoir assisté à Moscou à la victoire de la France en Coupe du monde, est lui resté bouché cousue sur ses attentes, ses objectifs et sa stratégie.
« L’état des relations bilatérales est très mauvais », a seulement concédé son conseiller Yuri Ushakov. « Nous devons commencer à les rétablir ».
– La Syrie en bonne place –
La Syrie figurera en bonne place dans les débats.
Le président américain est impatient de prendre ses distances avec ce conflit et de retirer les troupes américaines présentes sur place.
La Russie, à l’inverse, présent militairement sur place depuis 2015 en soutien au régime de Bachar al-Assad, entend plus que jamais y jouer les premiers rôles.
Les deux hommes ont rendez-vous en début d’après-midi au palais présidentiel, au coeur de la ville portuaire qui a une longue tradition d’accueil de sommets Est-Ouest.
Au programme: un face-à-face avec leurs seuls interprètes, un déjeuner de travail avec leurs équipes et une conférence de presse commune.
Donald Trump comme ses prédécesseurs démocrates et républicains ont, bien sûr, déjà rencontré Vladimir Poutine.
Mais le format de la rencontre, comme son timing, font du face-à-face d’Helsinki un rendez-vous à part.
Le sommet est la dernière étape d’un voyage d’une semaine en Europe au cours de laquelle le magnat de l’immobilier a tiré à boulets rouges sur ses alliés – Allemagne en tête – tout se tenant soigneusement à l’écart de toute critique à l’encontre du président russe.
Il entretient par ailleurs depuis plusieurs semaines l’ambiguïté sur la Crimée, refusant d’exclure explicitement la reconnaissance de son annexion par la Russie.
– « Totalement prêt! » –
Une autre ombre terriblement menaçante plane sur la rencontre : l’enquête menée, à Washington, par le procureur spécial Robert Mueller sur l’interférence russe en faveur de Trump dans la campagne présidentielle de 2016.
Elle a été relancée de façon spectaculaire à trois jours du sommet par l’inculpation de 12 agents du renseignement russe accusés d’avoir piraté les ordinateurs du parti démocrate.
Donald Trump a promis d’aborder le sujet avec son homologue russe. Mais personne ne s’attend à une demande d’explications en règle.
Tout à sa dénonciation de la « Chasse aux sorcières » dont il estime être la victime, il a semblé à plusieurs reprises donner raison à l’homme fort du Kremlin (qui conteste toute interférence) contre… les conclusions unanimes des agences du renseignement américain.
Donald Trump risque-t-il de se faire malmener cet officier du renseignement formé à détecter les faiblesses de ses adversaires?
Une demi-douzaine de sénateurs démocrates l’ont exhorté à ne pas négocier seul à seul: « Il doit y avoir d’autres Américains dans la pièce », ont-ils lancé dans une lettre ouverte.
« Serai-je prêt ? Totalement prêt! », répond depuis plusieurs semaines ce dernier. « Je me suis préparé toute ma vie pour ce genre de truc », lançait-il y a quelques jours devant ses partisans dans le Montana.
Plus largement, nombre d’analystes redoutent que le président américain ne manque tout simplement de fermeté.
« Nous devons traiter la Russie de Poutine comme l’Etat voyou qu’elle est », soulignait Richard Haass, président du Council on Foreign Relations, avant la rencontre.
C’est la quatrième fois que présidents américain et russe se donnent rendez-vous dans la paisible capitale finlandaise.
De ce point de vue, et de celui-ci seulement, Donald Trump et Vladimir Poutine s’inscriront dans la lignée de Gerald Ford et Léonid Brejnev (1975), George Bush et Mikhaïl Gorbatchev (1990), Bill Clinton et Boris Eltsine (1997).
LNT avec AFP