Dans la situation d’un déconfinement progressif, synonyme de redémarrage poussif de l’économie, comment se manifestent les difficultés financières d’une entreprise ?
Le resserrement de sa trésorerie, quelle que soit sa taille, en est la première manifestation !
La gestion courante d’une entreprise se base sur son fonds de roulement qui n’est autre qu’une balance entre le recouvrement de son chiffre d’affaires et son affectation aux paiements de ses charges.
Ce sont concrètement les règlements reçus des clients, qui permettent les paiements des salaires, fournisseurs et banques quand l’entreprise est endettée, et ce, de mois en mois.
Or, il faut savoir que la crise économique se traduit par une diminution d’activité immédiate, donc du chiffre d’affaires des entreprises et naturellement de leurs liquidités.
Sans compter que ce qui aggrave la situation des entreprises c’est que ce phénomène est souvent rétroactif, il se traduit aussi par l’annulation des commandes en cours affectant ainsi l’activité des mois précédents.
Concrètement, l’entreprise perd ses repaires, elle fait face à une baisse de son carnet de commandes, voit son recouvrement se réduire drastiquement, avant de se bloquer, ne peut plus payer ses salariés ni ses fournisseurs et encore moins ses échéances de crédits. Elle est face au risque de cessation de paiements comme son nom l’indique.
C’est ce cycle de décadence que connaissent de très nombreuses entreprises marocaines dans la situation actuelle de crise sanitaire et économique, de façon plus ou moins accentuée selon la taille donc la surface financière de chacune mais aussi des régions et villes du Maroc.
Celles qui ont été immédiatement touchées, relèvent des services, secteur habituellement le plus dynamique de notre économie, la restauration, les loisirs et l’événementiel, les voyages les transports, terrestres, ferroviaires aériens, les magasins d’habillement de tout genre, et tous les autres services liés à la vie de tous les jours qui de par le confinement ont connu un arrêt d’activité sec.
Le secteur de l’automobile et autres produits de consommation durable est aussi « sous perfusion », affectant les exportations de notre pays tout en réduisant relativement les importations également, etc.
Le seul bémol à cette crise économique mondiale est la réduction du prix du pétrole et la baisse des importations des produits énergétiques !
L’État, la Banque Centrale et le secteur bancaire avec la CCG, portent sur leurs épaules la lourde tâche du soutien de l’économie et des secteurs les plus touchés et des TPME les plus vulnérables.
Toutefois, la grande question de l’heure porte sur le constat que la sortie de crise de liquidités des entreprises est étroitement liée à la reprise économique.
Car toutes les solutions de soutien à l’économie proposées par le Comité de Veille économique et les banques sont non seulement temporaires, mais insuffisantes au-delà du cycle de 3 mois.
A commencer par l’aide accordée par le fonds de gestion de cette crise aux salariés de 2000 dhs par mois parce qu’elle ne profite qu’aux démunis, les travailleurs de l’informel, salariés ouvriers payés au SMIC etc…
Les autres salariés employés et cadres de tous niveaux restent tributaires de la situation financière de leurs employeurs.
Et ce, même si d’autres mesures de soulagement des personnes physiques contribuent à les aider comme le report des crédits et celui des échéances fiscales.
Au-delà de ces mesurent temporaires, les entreprises vont être obligées de licencier car leurs problèmes deviendront plus durables donc non finançables. C’est d’ailleurs là où se situe le problème des entreprises, jusqu’à quand elles peuvent tenir avant de licencier leurs salariés pour cause du coronavirus, sans respect du code du travail ?
Les mesures prises par les banques dans le cadre du Comité de Veille Économique pour le soutien et l’appui aux entreprises directement touchées par les conséquences du Covid-19 qui consistent en un report, sur demande, des échéances des crédits amortissables et de leasing 2020 sans frais ni pénalités de retard ne sont que des appels d’air provisoires pour les entreprises en difficultés financières.
Autant, d’ailleurs que les lignes de crédit additionnelles de fonctionnement équivalent à trois mois de dépenses pour les entreprises touchées par le Covid-19, afin de leur permettre de disposer de la trésorerie nécessaire pour faire face aux versements des salaires de leurs employés, payer leurs fournisseurs et assurer leurs dépenses courantes.
D’autant que ces lignes de crédit additionnelles de fonctionnement, garanties par la CCG dans le cadre de Damane Oxygène, sont remboursables, in fine, au plus tard le 31 décembre 2020 avec un taux d’intérêt fixé par le taux de refinancement de Bank Al-Maghrib majoré de 200 points de base, soit un taux supérieur à 4%.
Au-delà, ces crédits seront transformés en crédits à moyen terme pouvant aller jusqu’à 5 ans.
Les banques veulent contribuer à « préserver ainsi le tissu productif pour pouvoir relancer rapidement après cette situation son activité et contribuer à la création des richesses et de l’emploi au service du développement économique et social de notre pays ».
Mais toutes ces mesures, ne sont valables qu’à la condition que l’activité économique reparte sans trop tarder !
Certes, les entreprises qui vivent de la consommation des ménages, pourraient repartir rapidement une fois la crise sanitaire résorbée, mais rappelons que l’économie marocaine dans son ensemble dépend de l’économie mondiale qui connaît une réelle récession avec la Covid-19.
Ainsi, les économistes s’accordent sur un taux de 6% de PIB perdus sur les 2 mois de confinement par la France, un de nos principaux partenaires économiques.
Le secteur bancaire va subir l’augmentation des risques qui ne manquera pas d’affecter sa rentabilité comme pendant la crise de 2008. D’ailleurs, l’agence de notation Moody’s vient de mettre sous surveillance négative les banques françaises, belges, danoises, néerlandaises, italiennes, espagnol ! D’autre part, chaque perte de point de PIB coûtera des chômeurs supplémentaires.
La déflation est, selon les analystes, l’autre pandémie attendue du fait de la baisse des prix qui s’imposera pour liquider les stocks, la chute du prix du pétrole et du gaz, la dépréciation des actifs immobiliers, etc.
Pour l’heure, partout dans le monde, des milliards de crédits sont engagés pour éviter l’effondrement économique, sous forme de crédits bancaires de trésorerie avec des garanties publiques comme chez nous avec la CCG pour lutter contre le risque de cessation de paiement.
Les banques centrales exercent un soutien indéfectible aux banques comme Bank Al-Maghrib au Maroc.
D’autres milliards en grande quantité sont aussi engagés au niveau mondial, par les États sous formes d’aides budgétaires qui vont faire grimper les déficits publics, lesquels ne seront plus maitrisés.
Ainsi, la solidarité qui se conjuguait en des mesures sociales, se doit de devenir également économique et globale, comme elle s’exprime aujourd’hui face à la pandémie du Coronavirus…
Afifa Dassouli