Crédits photo : Ahmed Boussarhane/LNT
Traditionnellement, depuis de très nombreuses années, le début du mois de septembre marque tout à la fois la rentrée des classes, celle des affaires et celle de la politique.
Pour les écoles, collèges et lycées, ce sera chose faite ce jeudi 5 septembre.
Pour le business, il faudra sans doute encore attendre quelques jours, après la tenue de la seconde université d’été de la CGEM qui aura lieu à l’ISCAE de Casablanca les 13 et 14 de ce mois.
Quant à la rentrée politique, la plus attendue, la plus sensible, sinon la plus importante, ce sera vraisemblablement vers la fin de septembre, voire au début d’octobre qu’elle s’effectuera.
Mais, d’ores et déjà, et sans jouer à Madame Soleil, on peut supposer qu’elle sera riche en surprises et, peut-être, en déceptions.
En effet, cette rentrée est pour la très grande majorité de nos concitoyens marquée à la fois par l’inconnu et l’importance des enjeux qu’elle est censée exprimer.
Cela parce qu’elle bénéficie d’une feuille de route tracée par les deux derniers discours royaux, celui du 30 juillet et celui du 30 août 2019.
« Chkoun N’ta » ?
Et c’est donc avec impatience et curiosité que l’opinion publique attend de voir comment seront concrétisées et appliquées les directives et orientations royales, notamment celle afférente à la super commission en charge de la réflexion sur le nouveau modèle de développement et l’apport de « sang neuf », tâche dévolue au chef du gouvernement.
Concernant la première annonce, les questionnements portent surtout sur la nature des compétences recherchées, la qualité des formations requises et l’origine géographique de ces experts qui travailleront directement avec le Souverain.
Et, pour beaucoup, une bonne partie de ces compétences pourrait provenir de l’étranger où des millions de Marocaines et Marocaines résident désormais.
Car notre diaspora est très riche en femmes et hommes qui ont réussi et brillé dans leurs domaines respectifs, qui ont des parcours d’excellence et qui, le plus souvent malheureusement, ont choisi l’expatriation faute de pouvoir exprimer leur potentiel dans notre pays.
Une telle option, bien évidemment, n’exclut nullement que ladite commission comprenne en son sein des compétences locales, nombreuse certes, mais plus difficiles à dénicher du fait de l’existence d’un plafond de verre très épais et solide, celui que construisent tous les incompétents, les pistonnés, les « fils et filles de », placés à de hauts postes par la grâce du copinage, du réseautage, du clanisme et du népotisme.
Une autre question taraude également les esprits, celle de l’identité du « primus inter pares » qui sera chargé de la coordination au sein de cette « haute commission ».
S’agira-t-il d’un homme jeune à l’esprit particulièrement brillant ou bien d’un homme d’âge mûr, pétri d’expérience et de savoir, à l’image de ce qu’était le regretté Meziane Belfquih, paix à son âme ?
Sang neuf ou recyclé ?
Des deux défis de la rentrée, c’est incontestablement le second qui paraît être le plus difficile à relever, celui d’un apport de sang neuf et de compétences effectives pour épauler et conforter un gouvernement qui n’a jamais su répondre aux attentes populaires ni, sans doute, aux attentes royales comme le confirme le discours de la Fête du Trône 2019.
C’est le chef de l’équipe exécutive, M. Saad Eddine El Othmani, qui a la charge de proposer au Souverain de nouveaux profils pétris de compétences et de savoir-faire afin de rehausser le niveau d’une équipe où la majorité des ministres n’a d’autre qualité que l’appartenance à une formation politique membre de la majorité.
Car la question peut se poser crûment, que M. El Othmani n’a-t-il pas, de lui-même, déniché ce sang neuf lors de la composition de son gouvernement ?
On se rappelle que celle-ci répondait plus à des impératifs d’équilibre et de pondération entre les différentes formations qu’à la nécessité de former un gouvernement d’experts et de spécialistes.
Cette équipe-là a failli et a démontré que le Chef du gouvernement, premier responsable en outre du PJD, était incapable de s’imposer à lui-même et aux partis qui l’accompagnaient de s’adjoindre des hommes et des femmes compétents.
La formule de « sang neuf » exprime donc certainement cette réalité amère que l’équipe actuelle n’est pas capable, en son état et sa composition actuelle, d’appliquer et de mettre en œuvre les importantes recommandations royales égrenées au fil des discours du Roi Mohammed VI !
D’ailleurs, si des profils pointus peuvent sans doute exister au sein des partis, on a compris depuis longtemps que l’accès aux postes ministériels leur est interdit au profit des chefs, de leurs copains, clients et affidés.
Car, en vérité, les dirigeants politiques, d’une manière générale et dans notre pays tout particulièrement, craignent profondément le « syndrome d’Iznogoud » qui veut que des compétiteurs ambitieux lorgnent la place du chef !
Pour éviter cela, les patrons des partis s’arrangent pour désigner non les plus compétents, mais les plus fidèles…
C’est donc une mission titanesque qui échoit au Chef du gouvernement qui a l’obligation désormais de « dégager » les cadors qui bullent au gouvernement, leurs maroquins solidement tenus en mains, de préserver la présence féminine en rehaussant de surcroît la qualité de leurs attributions, de barrer la route aux ambitieux impénitents aussi nombreux qu’incapables, le tout en respectant les équilibres partisans dans son équipe.
Ce dernier point, cependant, pourrait sauter pour l’occasion et des partis comme l’UC et le PPS pourraient être sacrifiés sur l’autel de la restructuration.
Le premier parce que M. Sajid, en charge du tourisme, fait quasiment l’unanimité contre lui, le second parce que M. El Othmani n’apprécie pas vraiment M. Nabil Benabdallah et ses amis, accusés d’une proximité ancienne avec le sieur Abdelilah Benkirane.
Ce qui, d’ailleurs, fait déjà dire à certains que la formation issue du Parti Communiste Marocain serait désormais à la recherche d’autres alliances dans l’objectif de figurer en bonne et mais petite place dans une prochaine architecture gouvernementale.
In fine, on se demandera donc si M. El Othmani réussira en octobre 2019 ce qu’il n’avait pu accomplir en avril 2018.
Le Chef du gouvernement pourrait-il, désormais, endosser l’habit de Tom Cruise ?
Rien n’est moins sûr !!!
Fahd YATA