M. Abdelmajid Iraqui Houssaini, président du directoire de TAQA Morocco
Si pour de nombreuses entreprises, 2020, avec la crise sanitaire, est une année de « survie », durant laquelle elles essaient simplement de se maintenir à flot en attendant des jours meilleurs, Taqa Morocco a posé les jalons d’une croissance et d’un développement sains pour les années à venir, et semble ainsi pouvoir aborder l’avenir avec sérénité.
Deux évènements majeurs
Deux opérations de grande importance ont marqué ce premier semestre 2020 pour TAQA Morocco. La première a été la signature le 24 janvier avec le ministère et l’ONEE de la prorogation du contrat de fourniture d’énergie électrique des Unités 1 à 4 jusqu’en 2044 pour l’aligner sur la durée des Unités 5&6 du Complexe Thermique Jorf Lasfar. En plus du renforcement des synergies opérationnelles entre les six unités (exploitation et savoir-faire technique), cette signature marque surtout la garantie d’une génération de trésorerie additionnelle substantielle sur 17 années supplémentaires avec une sécurisation des cash-flows, et la maitrise des besoins de trésorerie d’exploitation. « Une extension majeure qui permettra de consolider durablement la robustesse du business model de Taqa Morocco pour continuer à garantir une charge de base compétitive et contribuer à la sécurité énergétique du Royaume», selon M. Abdelmajid Iraqui Houssaini, Directeur général de la société. Et de préciser que ceci « nous permettra de nous diversifier dans le mix énergétique que proposent le Maroc et l’Afrique». Notons que TAQA a également mené la révision majeure planifiée de l’unité 5 qui a duré 68 jours, à fin 2019.
Le deuxième fait marquant concerne la réalisation d’une émission obligataire par placement privé de 2,7 milliards de dirhams (MMDH). Cette émission a permis à Taqa Morocco de reprofiler sa dette bancaire en dette obligataire avec une maturité jusqu’en 2038. L’opération, rappelons-le, a été structurée en une seule tranche, négociable de gré à gré, et remboursable par amortissements semestriels linéaires en 36 échéances jusqu’à mars 2038. Le management du groupe explique également que cette opération visait à institutionnaliser les partenaires financiers pour soutenir la création de valeur existante. Ces partenaires «recherchent du papier sur le long terme avec un business model robuste qui donne un grande prédictibilité sur les cash-flows », a détaillé Omar Alaoui M’Hamdi, Directeur général adjoint de la société, qui a cité parmi ces institutionnels les fonds de pension, le Fonds Hassan II, la CDG, les banques, les assurances, etc.
Disponibilité record
Au niveau opérationnel, le premier semestre a apporté une grande satisfaction au top management de TAQA, vu que les six unités ont affiché une disponibilité record. Les unités 1 à 4 ont ainsi vu leur taux de disponibilité progresser de 97% à 97,3% au 30 juin 2020, tandis que celui des unités 5 et 6 a évolué de 94,4% à 97,2%. Le taux de disponibilité global s’élève donc à 97,3%, ce qui a permis à la production nette globale d’atteindre 8.000 GWh, contre 7.946 GWh au 1er semestre 2019. En conséquence, le taux de marge opérationnelle consolidée a évolué à 27,5% au 30 juin 2019 contre 27,4% durant la même période l’an passé.
Ainsi, côté chiffres, le Chiffre d’affaires consolidé de Taqa Morocco s’est établi à 4,02 MMDH au 1er semestre de cette année, en repli de 11% par rapport à la même période un an auparavant. Cette baisse est due principalement à la réalisation de la révision majeure de l’Unité 5, à la diminution des frais d’énergie consécutive à l’évolution du prix d’achat du charbon sur le marché international, ainsi qu’à la bonne performance opérationnelle de l’ensemble des unités, explique M. Iraqui. Le résultat d’exploitation consolidé, pour sa part, s’est élevé à 1,1 MMDH, alors que le taux de marge opérationnelle consolidée a évolué de 27,5% à 27,4% au 30 juin 2020. Ainsi, le résultat net part du groupe de Taqa Morocco s’est établi à 428 millions de dirhams (MDH) au terme du 1er semestre de cette année, en baisse de 16%, à cause notamment de l’effet combiné des charges d’intérêts relatives au financement du droit de jouissance complémentaire et de l’effort de remboursement sur la période. Le taux de marge nette consolidée s’est situé à 13,3%, contre 14,6% en juin 2019.
Si ces différents indicateurs sont en baisse, c’est principalement le fait d’évènement maîtrisés, selon M. Iraqui, ce qui explique que TAQA Morocco n’a pas émis de profit warning. Les fonds propres restent solides à 7,592 MMDH, avec un gearing à 55%, en légère évolution compte tenu du tirage de la dette afférente au paiement du droit de jouissance complémentaire ainsi que des remboursements de la période, et les besoins en fonds de roulements sont maîtrisés à 958 MDH.
Un résultat d’exploitation en hausse
Côté social, le chiffre d’affaires a atteint 2,307 MMDH au 30 juin 2020 contre 2,553 MMDH au 30 juin 2019, une évolution qui s’explique principalement par la baisse des frais de puissance, en raison principalement de l’effet combiné de la baisse contractuelle des tarifs et de l’évolution favorable du cours de change USD/MAD au cours du semestre, et du le recul des frais d’énergie en ligne avec la diminution du prix d’achat du charbon sur le marché international. Le résultat d’exploitation a augmenté, passant de 374 MDH à 421 MDH, essentiellement en raison de l’extension de l’amortissement du droit de jouissance initial consécutive à la signature de l’extension du PPA des Unités 1-4, explique le management. Le résultat financier est en baisse de 32,1% à -56 MDH, en raison du tirage de la dette court terme afférente au paiement du droit de jouissance complémentaire relatif à l’extension du PPA des Unités 1 à 4. Enfin, le résultat net est en hausse à 221 MDH au 30 juin 2020 comparé à 199 MDH au 30 juin 2019, tiré par l’évolution du résultat d’exploitation.
Si le CA de Taqa Morocco dépend des aléas du marché international (volatilité des prix du charbon, effets de change…), et a donc été impacté par la baisse d’environ 20% des prix du charbon, cela reste sans effet sur les agrégats du groupe, vu que les frais d’énergie sont refacturés à l’ONEE. «Le marché est correctement approvisionné durant cette période. Il n’y a pas de rupture de chaîne logistique. Mais comme toutes les matières premières, il y a eu une baisse de la consommation qui a engendré un effet prix que ce soit sur le pétrole, le gaz ou le charbon », explique M. Iraqui. Concernant l’évolution au deuxième semestre, le management relève un manque de visibilité dû à la crise, tout en relevant « une tendance baissière par rapport à l’année dernière».
Selim Benabdelkhalek