(de g. à d.) Mme Kristalina Georgieva, Directrice du FMI, Mme Nadia Fettah, ministre de l'Economie et des Finances, et M. Abdellatif Jouahri, Wali de BAM
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Les Conseils des Gouverneurs du Fonds Monétaire International (FMI) et du Groupe de la Banque Mondiale (BM) tiennent leurs Assemblées Annuelles habituellement en octobre à Washington et, tous les trois ans, dans un autre pays membre, comme cette année au Maroc, à Marrakech.
Réunissant un nombre considérable de responsables des pays membres, les Assemblées Annuelles offrent l’occasion de tenir des consultations plus ou moins élargies, de nature formelle ou informelle. De nombreux séminaires ont en outre lieu en marge de ces Assemblées, organisés par les services des deux institutions. Ces séminaires sont destinés à favoriser l’échange entre les représentants du secteur privé, les délégués des pays membres et les hauts responsables du FMI et de la Banque Mondiale.
Aussi, lors d’une séance plénière de ces Assemblées Annuelles, les Gouverneurs du FMI, traitent différentes thématiques, prennent des décisions sur la façon de traiter les priorités internationales du moment, et approuvent les résolutions correspondantes.
Le Maroc, hormis la grande réussite de l’organisation de cet évènement planétaire, a démontré le niveau élevé de son partenariat avec ces institutions internationales qui le qualifient de « bon élève ».
Tout particulièrement, faisant partie de la région MENA, la Maroc bénéficie des orientations spéciales édifiées par les Ministres de l’économie et des Finances et les Gouverneurs de Banques Centrales des 189 pays membres.
Et, en marge de ces Assemblées annuelles du FMI et de la BM, tenues à Marrakech, la Directrice générale du FMI, Kristalina Georgieva, à l’issue de sa rencontre le 15 octobre avec les ministres des Finances et les gouverneurs des banques centrales du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (MENA), a lancé un « appel à l’action », dont elle a détaillé les points les plus importants dans les verbatims suivants.
« Les Assemblées annuelles du FMI et de la Banque mondiale sont de retour dans le monde arabe après 20 ans de réunion à Dubaï. Beaucoup de choses ont changé au cours des deux dernières décennies, mais l’un des changements les plus prometteurs est peut-être que la croissance inclusive est devenue un mot familier et un appel unificateur dans toute la région. Reflétant son importance, le FMI a publié l’année dernière un livre mettant en avant les réformes prioritaires qui permettraient à la région MENA de parvenir à une croissance inclusive et créatrice d’emplois. »
« Pour ces assemblées annuelles, nous nous sommes appuyés sur ce travail et avons collaboré avec des décideurs politiques, des groupes de réflexion, des jeunes et des institutions partenaires pour ramener l’attention de la région sur les priorités de création d’emplois plus nombreux et de meilleure qualité, une prospérité partagée et un meilleur avenir pour les jeunes. De nombreux pays de la région peinent encore à garantir des opportunités plus grandes et plus équitables pour tous. Une grande partie des jeunes est inactive, de grandes disparités persistent entre zones rurales et urbaines et les opportunités économiques pour les femmes restent rares et les systèmes de protection sociale sont faibles.
Les chocs récents comme la pandémie et la guerre russe en Ukraine, ainsi que les tendances mondiales au changement climatique, aggravent ces vulnérabilités. Il en résulte un espace politique plus restreint pour y remédier ».
« Au FMI, nous sommes un partenaire de longue date des pays de la région MENA dans leur quête d’une croissance plus inclusive et plus résiliente. Même si les progrès dans ce sens, sont lents, il est essentiel de préserver la dynamique des réformes ».
Et Mme Georgieva Kristalina de distinguer une action en particulier qui se décline en plusieurs points.
Le premier consiste à favoriser le développement d’un secteur privé dynamique de la région. La Directrice du FMI considère qu’il faudra éliminer les nombreux obstacles qui empêchent de nouvelles entreprises d’accéder aux marchés et qui empêchent les petites entreprises et les startups existantes de prendre de l’ampleur. Dans ce contexte, l’égalisation des règles du jeu entre les entreprises publiques et privées est une priorité essentielle pour la région. La réforme des réglementations gouvernementales lourdes, le renforcement de l’inclusion financière et, plus largement, la promotion de la bonne gouvernance, peuvent améliorer considérablement la croissance économique dans la région MENA.
La seconde action doit consister en l’accélération de la numérisation et l’investissement dans les nouvelles technologies pour atteindre plus rapidement ces objectifs. Rénover les systèmes de protection sociale est le 3ème point de son plan d’action. Garantir aux citoyens un accès plus égal aux services de base, tels que la santé, l’éducation et l’assurance sociale, en faveur de ceux qui en ont le plus besoin afin d’améliorer leurs moyens de subsistance. Il s’agit également d’offrir des opportunités aux jeunes en réorganisant les systèmes d’éducation et de formation pour remédier à l’inadéquation des compétences et garantir aux 100 millions de jeunes qui atteindront l’âge de travailler au cours des dix prochaines années, des compétences recherchées par les employeurs du XXIe siècle.
Par ailleurs, pour un meilleur accès au financement pour favoriser l’entrepreneuriat et soutenir l’innovation et la création, il est nécessaire de supprimer les obstacles à la participation des femmes à la vie économique. De nombreuses économies de la région MENA ont en commun un bassin relativement important de jeunes femmes très instruites qui ne parviennent pas à participer efficacement aux marchés du travail formels. La région ne peut pas se permettre de continuer à sous-utiliser ce capital humain. Doubler le taux d’activité des femmes au cours des 15 prochaines années pourrait améliorer la production potentielle d’un pays comme le Maroc d’environ 3 pour cent.
Enfin, faire de l’investissement vert un moteur de croissance et de création d’emplois à travers des stratégies d’adaptation qui stimuleraient non seulement la croissance, mais amélioreraient également l’inclusion, dans la mesure où ce sont les plus vulnérables qui bénéficieraient le plus d’une exposition réduite aux événements catastrophiques. La transition vers des sources d’énergies renouvelables est non seulement nécessaire pour des raisons de durabilité, mais pourrait également constituer un puissant moteur de croissance et de création d’emplois.
« La stabilité macroéconomique sera un fondement essentiel d’un changement transformateur. Les niveaux élevés de dette publique dans un certain nombre d’économies de la région MENA les rendent vulnérables aux chocs futurs. La reconstitution des marges de manœuvre budgétaires peut nécessiter une refonte des systèmes fiscaux pour élargir les assiettes fiscales, améliorer la progressivité de la fiscalité et réduire les distorsions qui conduisent à l’informalité. »
« Ces principes constitueront la base de l’engagement du FMI auprès des décideurs politiques de la région MENA et d’autres parties prenantes pour les années à venir. Les réformes structurelles prennent du temps. En travaillant ensemble, nous pouvons relever les défis anciens et nouveaux et construire un avenir pour la région fondé sur un modèle de développement plus durable et inclusif », conclut la Directrice Générale du Fonds monétaire international.
Afifa Dassouli