
« L’emploi ne se décrète pas » cet adage est inspiré de la réalité, car, à moins que l’État recrute des fonctionnaires, la création d’emplois est le fruit d’une économie en bonne santé ! Or aujourd’hui, ni le gouvernement ne peut se permettre de recruter vue la situation budgétaire très serrée de notre pays, ni l’économie ne crée des emplois nouveaux.
Bien au contraire, la crise sanitaire perdure, pour ne pas dire s’aggrave, parce qu’elle ne laisse aucun répit à certains secteurs de l’économie, qui sont sinistrés voire en arrêt d’activité. Donc, ces derniers détruisent des emplois, alors que les autres se gardent bien d’en créer dans les circonstances actuelles.
La situation économique du Maroc, encore fragile, n’est pas comparable aux pays occidentaux malgré la crise sanitaire, comme la France qui a vu son taux de chômage diminuer, ou le Royaume-Uni et les États-Unis qui ont un taux de chômage inférieur à 5% et sont considérés de ce fait, en situation de plein emploi, avec une pression à la hausse sur les salaires.
C’est pourquoi, le nouveau gouvernement, pour alléger le chômage dans notre pays, amortir les pertes d’emplois et ainsi soutenir les populations qui en sont victimes, vient de lancer un programme de création d’emplois par le soutien de petits chantiers, en arabe AWRACH, à travers le pays.
Ce programme qui porte le nom explicite d’ « Awrach » vise la création 250 000 emplois directs dans le cadre de chantiers temporaires au cours des années 2022 et 2023. Il s’agit précisément de création d’opportunités d’emploi dans le cadre de chantiers temporaires pour les personnes ayant perdu leur emploi à cause de la pandémie et qui ont des difficultés à s’intégrer sur le marché du travail. Le lancement de ce programme « Awrach » par le Chef du Gouvernement est intervenu la semaine dernière pour un budget de 2,25 milliards de dirhams pour l’année 2022 uniquement, pour la création de 125 000 emplois nouveaux, ce qui lui donne une certaine envergure.
Le programme Awrach, comprend deux volets. Le premier, à hauteur de 80% du budget, porte sur des chantiers généraux temporaires, qui seront activés progressivement, et le second se rapporte à des ateliers de promotion de l’inclusion durable à l’échelle du pays. Concrètement, comme l’a reconnu le ministre de l’Inclusion économique, de la petite entreprise, de l’emploi et des compétences, Younes Sekkouri, l’identification des chantiers, leur choix et le suivi de leurs réalisations ne peuvent se faire à partir de Rabat.
Ce sont donc les différentes régions, villes et localités qui vont identifier ces « chantiers », qui seront étudiés en fonction de critères précis dont le coût et le temps de réalisation. Puis les recrutements vont se faire en fonction des besoins de chaque chantier, avec la précision de taille que les recrues seront payées au minimum au SMIC, en direct par l’administration locale, pour éviter tout doute sur l’utilisation de l’argent mis à disposition par l’Etat. Les chantiers doivent répondre à des besoins de tout genre, et suggérés par tous les départements ministériels sur la base de leur urgence, utilité et efficacité.
Donc d’une pierre deux coups : avec Awrach, le gouvernement va créer des emplois en insérant des personnes sans emplois sur le marché du travail en les déclarant à la CNSS, leur assurant une expérience professionnelle, et leur fournissant une attestation de travail qui peut leur facilité une insertion ultérieure et l’obtention d’un emploi pérenne. Mais par la même occasion, il va procéder à des travaux de réparation et mise à niveau de tout genre, au bénéfice de la communauté.
Pour ce faire, le programme Awrach, instaure un partenariat qui inclut les secteurs ministériels, les établissements publics, les collectivités locales et territoriales, ainsi que les associations de la société civile et les coopératives locales, sans compter la contractualisation avec le secteur privé.
Il touche inéluctablement des personnes défavorisées des provinces reculées, auxquelles la croissance économique ne s’étend pas déjà en temps normal, et qui de plus connaissent une aggravation de la situation depuis 2020 avec la crise sanitaire qui paralyse certaines activités.
Toutefois, il faut reconnaître que leurs problèmes sont souvent structurels, relèvent de manque de budgets publics et touchent aux infrastructures, tant au niveau des aménagements des villes que des écoles hôpitaux et administrations. Le programme Awrach, qui aujourd’hui consiste en une première initiative du genre, va permettre à l’Etat, tout en offrant du travail à la population, d’investir dans une mise à niveau infrastructurelle nécessaire.
Il peut s’avérer être une excellente solution d’intervention efficace de l’Etat. Sa limite porte sur la courte durée des projets financés, mais de programme court en programme court, les besoins des provinces dites reculées à juste titre, peuvent être couverts sur le long terme…
Afifa Dassouli
Le communiqué de presse de la primature apporte les détails et précisions nécessaires à la compréhension d’Awrach comme suit
« Les chantiers publics temporaires, qui s’adressent à environ 80 % du nombre total de bénéficiaires du programme, visent à répondre aux besoins des citoyens en termes d’infrastructures, et envisagent également la mise en œuvre de travaux et d’activités à caractère temporaire qui relèvent de besoins liés à l’utilité publique, comme : la construction de chaussées, la restauration de monuments et d’équipements publics, le reboisement, la préparation d’espaces verts, la lutte contre la désertification et l’ensablement, les activités culturelles et sportives, et les encadrements pédagogiques ponctuels. Quant aux chantiers d’appui à l’intégration durable, ils s’adressent à environ 20 % des bénéficiaires du programme, et ils visent à atteindre un certain nombre d’objectifs, notamment ceux en lien avec la prise en charge de services destinés aux individus, aux familles et à la communauté, qui sont spécifiques à certaines régions : comme l’alphabétisation, l’enseignement primaire, la prise en charge des personnes âgées, les activités sportives et culturelles, l’alimentation scolaire et les services paramédicaux…
Le programme d’ateliers permettra aux bénéficiaires des chantiers publics temporaires de bénéficier : d’un revenu mensuel supérieur ou égal au salaire minimum pendant la durée des ateliers ; d’une couverture sociale, y compris des allocations familiales, conformément aux lois et règlements en vigueur ; d’un encadrement au sein des ateliers dans le but de développer les aptitudes et compétences ; d’une expérience professionnelle et d’un document attestant de la mission réalisée en vue d’augmenter les 5 chances d’intégration professionnelle ultérieure dans le cadre d’activités économiques similaires.
L’État prendra en charge les dépenses liées aux salaires, la part patronale et l’assurance accidents du travail au titre de la couverture sociale. En sus de toutes les dépenses précisées, l’État accordera également une subvention pour stimuler l’emploi d’un montant de 1500 dirhams par mois pendant une durée de 18 mois pour chaque bénéficiaire.
Concernant la gouvernance du programme « Awrach », un certain nombre d’instances ont été mises en place pour animer et accompagner la conduite du programme et lui permettre d’atteindre les objectifs annoncés : le Comité Stratégique, sous la tutelle du Chef du Gouvernement, déterminera les orientations stratégiques du programme ; le Comité de Pilotage du Programme, issu du Comité Stratégique présidé par le Ministre de l’Intégration Économique, des Petites Entreprises, de l’Emploi et des Compétences, travaillera en vue d’activer les orientations stratégiques du programme ; un comité régional sera créé pour le programme « Awrach » au niveau de chaque entité, il sera piloté par le Wali de chaque région qui sera responsable de la supervision et de la bonne mise en œuvre du programme au niveau régional; les comités régionaux, créés au niveau de chaque région et dirigés par le coordinateur régional qui aura la responsabilité de superviser la bonne mise en œuvre du programme au niveau régional.
Le programme « Awrach » débute la première phase de son déploiement dans 10 provinces : M’diq – Fnideq, El Hajeb, Er-Rachidia, Azilal, Nouaceur, Al Haouz, Figuig, Oued Eddahab, Sidi Kacem et Taroudant.