Les faits sont assez inédits pour être commentés. Le Parlement européen a voté une résolution le 19 janvier dernier à Strasbourg qui appelle le Maroc à « respecter la liberté d’expression et la liberté des médias » et de « garantir aux journalistes incarcérés (…) un procès équitable. »
Avec pas moins de 356 voix pour, seulement 32 contre et 42 abstentions, la résolution semble faire l’unanimité parmi les eurodéputés qui s’attaquent pour la première fois de manière aussi frontale au Maroc et à ses institutions judiciaires notamment. Sur le fond, la lecture des députés européens que décrit cette résolution, s’appuie sur les rapports à charge de certaines ONG dont on connait à la fois le financement et l’inimitié qui les lie au Maroc. Rien de nouveau donc sur les arguments qui sont connus et utilisés depuis des mois voire des années par les détracteurs habituels du Royaume. Sur la forme, les députés européens font preuve de véhémence, dans une belle posture de donneurs de leçons post-coloniales et de garants du respect des Droits de l’Homme dans le monde.
Pourtant, la compétence universelle que s’attribue le Parlement européen a peu ou pas d’impact dans la réalité. Le Soft power européen a été construit comme seule alternative à la super puissance américaine et aux puissances continentales mondiales parce que c’est un nain politique. En ce sens, la résolution européenne est agressive mais non contraignante, comme un chien qui aboie mais ne mord pas.
Alors oui, la résolution fait du tort au Maroc parce qu’elle le met sous les projecteurs, mais la levée de boucliers qu’elle a déclenché dans nos institutions témoigne d’une posture assumée du Maroc, sur le fond comme sur la forme.
Mais, quelle mouche a piqué les eurodéputés ? Tsé-tsé ou Seum-Seum ? Paris ou Alger ? On ne peut éluder la question « à qui profite le crime » ? Pourquoi le Maroc est-il visé maintenant par une résolution inédite du Parlement européen ? Faut-il y voir derrière la main de la France macroniste qui semble avoir une longue dent contre le Maroc ou celle des nombreux lobbyistes algériens qui gravitent autour des institutions européennes ?
On ne peut pas non plus ne pas s’étonner de la prise d’initiative du Parlement européen sur le cas du Maroc et de son silence assourdissant sur celui de l’Algérie.
Les Droits de l’Homme en Algérie, la liberté de la presse, l’indépendance des institutions judiciaires et parlementaires ne méritent pas quelques résolutions, même non contraignantes ?
Les autodafés du Coran en Suède non plus ? Pas de cas de conscience quant à la protection de la liberté des journalistes non plus lorsqu’il s’agit d’interdire la chaine russe RT, jugée trop proche du pouvoir à Moscou ?
Que dire également de la composition de ce Parlement européen dans lequel se rassemblent, depuis plusieurs décennies, les représentants les plus extrêmes de la Droite européenne ? Le Parlement marocain pourrait-il se fendre d’une résolution, non-contraignante bien sûr, invitant les Européens à prendre au sérieux la montée de la xénophobie, du racisme, des idéologies fascistes ?
Pourtant, l’excellence des relations avec l’Europe sur sa politique de voisinage, la capacité du Maroc à répondre à l’écrasante majorité des critères de coopération économique avec Bruxelles depuis plusieurs décennies, la lutte contre le terrorisme à laquelle le Royaume contribue de manière concrète, ou même les tonnes de poissons pêchées au large de nos côtes, sont autant d’arguments que les eurodéputés pourraient avoir en tête plutôt que de pratiquer une ingérence aveugle et punitive sous couvert de vertu.
Le Maroc est loin d’être parfait, mais ses institutions et sa démocratie avancent peu ou prou au rythme de son développement et c’est au peuple marocain avant tout, d’en juger l’avancement.
Zouhair Yata