Et voilà le nouveau Secrétaire général de l’ONU, M. Guterres, dans ses œuvres, là où tous les Marocains l’attendaient avec une impatience certaine.
Et c’est bien volontiers que l’on reconnaîtra qu’il ne nous a point déçus pour son premier rapport annuel consacré à la question du Sahara occidental marocain, et présenté aux membres du Conseil de Sécurité dans la perspective du renouvellement (ou non) du mandat de la Minurso pour la période du 1er mai 2017 au 30 avril 2018.
En effet et comme l’ont déjà analysé plusieurs confrères de la presse, électronique et écrite, le rapport consacré au Sahara marocain est « globalement positif » pour le Royaume et ses thèse sacrées.
Mais, avant d’en examiner le contenu dans ses articulations les plus importantes, il faut d’abord préciser que la diplomatie marocaine, sous l’impulsion directe du Roi Mohammed VI, a bien balisé le terrain, permettant ainsi à M. Guterres, non d’évoquer des problématiques sensibles pour notre pays, mais plutôt de lancer quelques ballons d’essai bienvenus sur des pistes qui pourraient permettre une sortie de crise honorable pour toutes les parties. C’est en ce sens, essentiellement, qu’il convient d’apprécier positivement ledit rapport.
Guerguerat, first in, first out
En effet, le Maroc a tout d’abord immédiatement accédé à la demande du Secrétaire général des Nations-Unies lorsque ce dernier, au cours d’un entretien téléphonique avec le Roi Mohammed VI, suggéra le retrait des quelques gendarmes marocains qui avaient pris position dans le no man’s land situé au-delà du poste frontalier de Guerguerat.
Cette réactivité et cette souplesse ont été appréciées du Secrétaire général qui, à l’opposé, n’a point manqué dans son rapport de souligner le danger que constitue pour la paix la présence de mercenaires séparatistes armés dans cette zone.
Malgré les demandes onusiennes, Brahim Ghali a refusé d’obtempérer et, de ce fait, il se trouve cloué au pilori dans le texte de M. Guterres et expose le groupement mercenaire à la stigmatisation de son attitude par le Conseil de Sécurité.
Le second élément qui a joué en faveur du Royaume est l’acceptation officielle par celui-ci, le 7 avril dernier, du retour complet de la Minurso à ses effectifs antérieurs.
Les 17 éléments de la composante civile de cette « force d’interposition », repliés sur Las Palmas depuis l’année dernière, ont pu regagner leurs postes au Sahara marocain.
Ces deux points, de la plus haute importance, ont permis d’évacuer et de prévenir toute mise en cause du Maroc dans le rapport d’activité de M. Guterres et, ipso facto, privent nos adversaires, (et leurs alliés au Conseil de Sécurité), d’arguments pour des mises en cause fallacieuses de notre pays devant les instances onusiennes.
A partir de là, il devient plus facile de comprendre les desseins (positifs) du Secrétaire général qui esquisse, par touches successives et prudentes, de nouvelles pistes et propositions afin de déboucher sur un règlement pacifique, politique et négocié de la « question du Sahara occidental Marocain ».
Realpolitik, version Guterres
Il est bien évidemment trop tôt aujourd’hui pour les prendre vraiment « pour argent comptant », mais il convient de considérer qu’elles constituent, indéniablement, une nouvelle voie et une démarche positive pour les thèses et positions du Maroc.
M. Guterres, en effet, propose notamment que les parties en présence (et les parties intéressées, Cf. l’Algérie et la Mauritanie), s’engagent de nouveau dans un processus de négociations directes avec toutes les options sur la table.
C’est là un élément très important parce que cela remet directement au devant de la scène la position du Maroc, présentée officiellement à l’ONU en 2007, du plan de large autonomie comme l’une des solutions à même de garantir le droit à l’autodétermination des populations sahraouies.
Christopher Ross n’avait jamais été aussi loin et proposait plutôt qu’on en revienne aux idées d’avant 2006, celle de l’organisation d’un référendum.
Guterres se démarque donc sensiblement de cette démarche et c’est tout bénéfice pour le Royaume ! De même, le SG de l’ONU évoque des « solutions réalistes », ce qui avait déjà été mis en avant par le Hollandais Van Walsum en 2008 et fortement combattu par l’Algérie qui avait finalement obtenu le départ de cet envoyé personnel du Secrétaire général de l’ONU au profit de la nomination de Christopher Ross, « bien vu » à Alger.
Mais ce concept de réalisme remis au goût du jour par M. Guterres signifie clairement que les options fumeuses et notamment celle d’un référendum d’autodétermination devraient être abandonnées.
Cette aspiration s’accompagne, d’ailleurs, d’un autre constat, peu relevé au demeurant par les confrères, celui de la nécessité pour toutes les parties, leurs soutiens, mais également les membres du Conseil de Sécurité, de se préparer à des « décisions difficiles »…
N’est-ce pas l’annonce, subtile et quasiment subliminale, de la mort programmée de l’idée de référendum, unique voie de règlement préconisée par les séparatistes et l’Algérie ?
Foin d’hypocrisie
D’ailleurs, l’autre élément nouveau dans ce rapport tient à la volonté directe du Secrétaire Général de l’ONU d’impliquer directement des « parties » comme l’Algérie et la Mauritanie dans le processus de règlement négocié du conflit.
C’est là une attitude qui honore ce grand diplomate et homme d’Etat portugais qui, visiblement, n’aime pas l’hypocrisie et les procédés dilatoires de ces « Ponce Pilate » qui, depuis 1975, actionnent, financent, arment et dirigent les séparatistes du polisario et qui, officiellement, se prévalent d’un simple soutien de principe au « droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ».
Guterres reprend à son compte, et de la façon la plus claire qui soit, la position du Royaume exprimée depuis des décennies et qui énonce que l’Algérie est un acteur direct d’un conflit qu’elle entretient sans relâche et qu’il convient donc impérativement de l’impliquer dans la recherche d’une solution définitive.
La paix ne se fera pas sans les vrais acteurs du conflit et Guterres dit enfin haut et fort ce que tous les diplomates en charge de ce dossier savent depuis plus de quarante ans !
What about Nikki ?
A ce stade du parcours du rapport annuel du Secrétaire général, on peut donc considérer que le Maroc n’est pas en posture difficile ou gênante, ce qu’on ne saurait dire pour le polisario.
Et l’on se rappellera les menaces qui pesaient sur le Royaume lorsqu’en 2014, 2015 et 2016, des tentatives avaient été faites pour introduire dans la résolution de renouvellement du mandat de la Minurso, qui est votée au Conseil de Sécurité, des recommandations franchement hostiles au Royaume.
Lors de ces épisodes de triste souvenir, il avait fallu tout le poids et l’implication personnelle du Roi Mohammed VI pour stopper cette offensive anti-marocaine née dans les bureaux mêmes du Département d’Etat américain, alors sous la férule de l’Administration Obama.
La principale interrogation de l’heure, à quelques jours de la présentation d’un draft de résolution, (traditionnellement du ressort du représentant des Etats-Unis au CS de l’ONU), tient à la position qu’exprimera Mme Nikki Haley, surnommée le shériff, en tant qu’ambassadeure américaine aux Nations-Unies.
En effet, la position de l’Administration Trump n’est pas vraiment connue à ce jour et l’on se demande si les Etats-Unis feront preuve d’un esprit de continuité, avec une position globalement favorable au Maroc, ou s’il y aura rupture et changement de cap.
Pour plusieurs raisons et notamment les idées de M. Trump sur la stabilité dans le monde arabe, la lutte anti-terroriste et une certaine fascination pour l’autoritarisme, on évitera donc de donner un pronostic, tout en croisant les doigts !
Fahd YATA