
Le Mercredi 4 Mars 2020 à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales (EHESS) à Paris, Mokhtar Homman a soutenu son Mémoire de Diplôme d’Histoire de l’EHESS portant sur la « Modernisation du Maroc (1860-1894) au regard de l’expérience Meïji. Une volonté développementaliste contrariée par l’impérialisme et des freins intérieurs ».
Le jury était composé des Professeurs Sébastien Lechevalier, Directeur d’Études, Jean-Yves Grenier de l’EHESS, et les rapporteurs Alessandro Stanziani de l’EHESS et Mohammed Ennaji de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de Rabat..
Au cours de son exposé, Mokhtar Homman, venu de l’univers des Mathématiques et après une longue carrière professionnelle dans l’industrie automobile, a analysé la question du facteur déterminant dans la perte de l’indépendance du Maroc : endogène, l’échec des réformes, ou exogène, l’impérialisme.
La trame de ce mémoire utilise une vision Est-Ouest, le Maroc est « regardé » du Japon, et une définition dynamique du concept d’État Développeur, appliquée au Japon de l’ère Meiji entre 1868 et 1889, pris comme référence d’une modernisation réussie, et au Maroc sous les règnes de Mohammed IV et Moulay Hassan entre 1860, au lendemain de la guerre avec l’Espagne, et 1894.
En considérant les réformes de l’armée, certains exemples de modernisation et d’industrialisation et le transfert technologique dans les deux pays, l’application des critères de l’État Développeur montre alors que le Japon de l’ère Meiji était, comme déjà bien connu, un État Développeur et le Maroc un proto État Développeur dans cette période.
Ce faisant Mokhtar Homman déduit que le facteur déterminant dans l’occupation coloniale du Maroc, le Protectorat franco-espagnol, fut bien l’impérialisme européen et ses multiples canaux : la guerre, notamment contre l’Espagne en 1859-60 et ses conséquences financières dramatiques, les traités commerciaux iniques, la protection consulaire qui connut une très forte croissance au lendemain de la Conférence de Madrid en 1880. Quoiqu’il réforme, quoiqu’il réussisse, le Maroc, freiné par la faiblesse du Makhzen et par des élites sociales prédatrices ou alliées de l’impérialisme, handicapé par des calamités naturelles dévastatrices et une démographie faible, ne pouvait s’opposer à l’occupation coloniale.
Le jury a unanimement souligné la qualité du travail de Mokhtar Homman et le courage et la détermination qu’il a eus pour répondre aux difficultés du sujet : écueils méthodologiques en évitant une comparaison risquée et en adoptant une méthode d’éclairage originale de la dynamique marocaine à partir de la dynamique japonaise, au lieu des classiques comparaisons avec l’Europe, le travail sérieux sur les aspects économiques et institutionnels, sans oublier les facteurs culturels, de la problématique. Le travail est fortement documenté et enrichi par une bibliographie jugée peut être trop vaste mais par contre limité par un accès aux archives qui restent pauvres sur l’économie du Maroc au XIXe siècle. Le Mémoire comprend plus de 280 pages.
Le Professeur Mohammed Ennaji a souligné l’intérêt du travail réalisé par Mokhtar Homman et insisté sur son intérêt pour la période actuelle à l’heure où le Maroc est en quête d’un nouveau modèle de développement.
A propos de Mokhtar Homman
Né peu avant l’indépendance du Maroc au sein d’une famille de Larache d’un père parmi les premiers médecins marocains et d’une mère espagnole institutrice, Mokhtar Homman, après des études secondaires à Tanger, a mené des études supérieures scientifiques en France : deux années en classes préparatoires au Lycée Saint-Louis de Paris, trois années à l’École Nationale des Ponts et Chaussées pour devenir Ingénieur et enfin Docteur en Mathématiques Appliquées à l’Université Pierre et Marie Curie. Plusieurs années comme chercheur au Commissariat à l’Énergie Atomique en France précèdent deux années d’enseignement comme Maître Assistant de Mathématiques à la Faculté des Sciences de Rabat. Ses espoirs de retour au Maroc s’évanouissent faute de trouver emploi correspondant à ses compétences.
De retour en France, père de deux enfants, il entre chez Renault en 1990 où il fera une longue carrière dans le management des projets industriels à l’international qui l’amèneront à travailler à Taiwan, en Argentine, Uruguay, Russie, puis à vivre 4 ans au Mexique pour développer l’Alliance Renault Nissan dans ce pays (où Mokhtar Homman fut le Chef de projet du premier projet de l’Alliance). À nouveau en France il travaillera avec Renault Samsung Motors pour le développement du véhicule Latitude avant que Renault ne l’envoie à Tanger comme Secrétaire Exécutif du Projet d’Usine Renault-Nissan Tanger entre 2009 et 2012. N°2 du projet il sera en charge du management global et de la coordination avec toutes les autorités et institutions marocaines ; mais sa vraie mission, à la demande de la direction générale de Renault, était d’intégrer le Maroc au Projet, étant le seul Marocain ayant une longue expérience de l’industrie automobile dans la direction du projet. Un projet gagnant-gagnant pour lequel il s’investit comme Renault et comme Marocain. La réussite de ce projet et son engagement lui vaudront l’Ouissam Alaouite du Mérite National, grade d’Officier.
Quelques années plus tard, dès la préretraite, Mokhtar Homman entame des études d’histoire à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales (EHESS) à Paris où il réussit le Diplôme de l’EHESS avec un Mémoire sur la « Modernisation du Maroc (1860-1894) au regard de l’expérience Meiji », motivé par son attachement au Maroc. Car Mokhtar Homman a aussi milité pour la démocratie, la souveraineté et le développement du Maroc, notamment au sein du Parti du Progrès et du Socialisme, en ayant eu des responsabilités locales et nationales, entre 1978 et fin 2011, au moment où le PPS changea radicalement de stratégie.
Actuellement Mokhtar Homman a fondé un cabinet de conseil, Homman Consulting International, dans l’idée de faire fructifier son expérience dans le développement industriel, notamment au Maroc.
LNT