Après des années de domination des technologies d’avant-garde par Google, son rival Microsoft, déjà en avance dans le cloud, lui fait de l’ombre en s’imposant comme leader de l’intelligence artificielle générative.
Les deux géants américains des technologies ont publié mardi des revenus et profits meilleurs qu’attendus étant donnée la crise économique actuelle.
Alphabet, la maison mère de Google, a réalisé un chiffre d’affaires de près de 70 milliards de dollars au premier trimestre, dont elle a dégagé 15 milliards de bénéfice net.
Mais malgré ces deux résultats supérieurs aux attentes du marché, « les investisseurs ont peu de raisons d’être optimistes », a réagi Max Willens, analyste d’Insider Intelligence.
L’activité publicitaire de l’entreprise « est menacée », souligne-t-il.
« Les revenus de YouTube ont à nouveau baissé, et le fait que les recettes du moteur de recherche et des autres segments n’aient progressé que de 2% montrent que le cœur de métier de Google n’a pas affronté des vents contraires aussi puissants depuis longtemps ».
Le numéro un mondial de la publicité numérique fait face à l’inflation et à la hausse des taux d’intérêts, synonymes de réductions des dépenses des annonceurs.
Sa plateforme YouTube subit en outre la concurrence de l’ultra populaire TikTok.
Le service de streaming, à l’instar d’Instagram (Meta) et de Snapchat, a copié le format de vidéos courtes et divertissantes, mais il n’arrive pas encore à tirer des revenus substantiels de ses « Shorts ».
« Les retours initiaux que nous avons sur les compensations financières (…) pour les créateurs de Shorts ont été décevants », a souligné Evelyn Mitchell, d’Insider Intelligence.
– « IA générale » –
Google, qui a licencié environ 12.000 personnes en janvier (6% de ses effectifs), et revu à la baisse ses plans immobiliers, doit en parallèle défendre son statut dans l’intelligence artificielle (IA).
Microsoft a clairement pris l’ascendant dans l’IA générative (capable de créer des contenus sur demande en langage courant) depuis le lancement en novembre de l’interface ChatGPT, conçue par la startup californienne OpenAI, dans laquelle il a investi massivement.
La firme de Redmond (Etat du Washington, nord-ouest) a intégré ChatGPT à son moteur de recherche Bing, ce qui a relancé ce portail, jusqu’ici incapable de faire face à la concurrence de Google.
Depuis, les deux entreprise rivalisent depuis à coup d’annonces, au fur et à mesure qu’ils ajoutent des fonctionnalités d’IA générative à leurs logiciels, du vénérable logiciel de traitement de texte Word à la boîte mail Gmail.
« La plupart des organisations réfléchissent à comment utiliser l’IA pour se transformer », a souligné Sundar Pichai mardi lors d’une conférence téléphonique aux analystes.
Alphabet a réuni la semaine dernière les équipes de Brain et DeepMind pour accélérer la recherche dans l’IA.
« Nous avons ainsi l’opportunité de construire l’IA, et à plus long terme l’IA générale au service de l’humanité », a tweeté Demis Hassabis, le chef de la nouvelle unité, Google DeepMind.
Il fait référence à l’idée popularisée par OpenAI de créer des systèmes d’IA plus performants que les humains à de nombreuses tâches cognitives.
– Cloud –
Dans cette quête au nouveau graal de la tech, Microsoft a un autre avantage : le cloud, un secteur où il est numéro deux mondial, derrière Amazon.
Google Cloud a dégagé un bénéfice opérationnel de 191 millions de dollars au premier trimestre. C’est la première fois que l’activité réalise un profit.
« Cela montre que la direction travaille réellement vers la rentabilité de cette activité. Mais en pratique, Google Cloud reste loin derrière ses deux principaux concurrents, et sa croissance ralentit », a commenté Max Willens.
Chez Microsoft, les revenus provenant du cloud –qui s’appuie sur des serveurs délocalisés mais aussi beaucoup sur l’intelligence artificielle– ont bondi de 22% sur un an à 28,5 milliards de dollars. Ils représentent désormais plus de la moitié du chiffre d’affaires de l’entreprise.
En tout, de janvier à mars, la société a enregistré un chiffre d’affaires de 52,8 milliards de dollars (+7% sur un an) et un bénéfice net de 18,3 milliards (+9,4%).
Son action grimpait d’environ 9% lors des échanges électroniques après la clôture de la Bourse.
Celle d’Alphabet prenait 1%, après être montée un peu plus suivant l’annonce d’un plan de rachat d’actions de 70 milliards de dollars.
Et le trimestre en cours ne s’annonce pas plus facile pour le géant de la Silicon Valley.
La banque centrale américaine prévoit de continuer à relever les taux pour lutter contre l’inflation, malgré le risque de récession.
Et les autorités américaines et européennes se montrent de plus en plus déterminées à réguler les grandes plateformes, du droit de la concurrence aux dérives des réseaux sociaux.
LNT avec Afp