Crédits : Ahmed Boussarhane/La Nouvelle Tribune
M. Aziz Akhannouch, qui se trouve désormais à la tête d’un ministère aux prérogatives étendues, est sans doute le plus indiqué pour mesurer les efforts et les avancées que le monde agricole a connus au cours des dix dernières années.
D’une édition du SIAM à l’autre, d’Assises en Assises, la productivité agricole s’améliore, l’organisation des filières également, tandis que l’agro-business, les produits du terroir, le problématique des ressources hydriques, entre autres, sont mis au devant des préoccupations des pouvoirs publics, des acteurs du secteur et du monde rural. Et tout ceci est largement évoqué dans l’entretien que le Ministre de l’Agriculture, de la Pêche maritime, du Développement rural et des Eaux et Forêts a bien voulu nous accorder à l’occasion du 12è SIAM.
FY
La Nouvelle Tribune :
Le SIAM 2017 mets en avant dans sa thématique cette année l’agrobusiness et les chaines de valeur durables. Est-ce que le temps est venu de tourner les efforts vers l’agro-industrie ?
M. Aziz Akhannouch :
Réussir à installer une filière agricole intégrée est très important pour le développement harmonieux et équilibré et pour la captation de la valeur ajoutée du secteur. L’agro-industrie est en cela un élément majeur de cette intégration amont-aval.
De nombreuses mesures qui ont été déployées dans le cadre du Plan Maroc Vert pour améliorer la production des différentes filières agricoles et de grandes avancées ont été enregistrées. C’est une donne qui favorise l’essor d’une agro-industrie forte et bien approvisionnée.
Les Départements de l’Agriculture et celui de l’Industrie, en concertation avec les professionnels, ont élaboré une stratégie pour le développement des industries agroalimentaires au Maroc. Cette stratégie vise essentiellement l’incitation à l’investissement productif (conditionnement, entreposage frigorifique, transformation, …), le soutien au développement des exportations, la modernisation des circuits de commercialisation, l’appui à la prospection des marchés, ainsi que des mesures transverses (formation, innovation, normalisation, qualité, …).
Le contrat-programme signé lors des Assises de l’Agriculture le 17 avril dernier entre le gouvernement et les professionnels représente un grand pas dans la concrétisation de cette stratégie. Il couvre la période 2017-2021 et bénéficiera d’une convergence de moyen notamment le FDI et le FDA.
Ce Contrat-programme du développement et de modernisation de l’industrie alimentaire, avec une enveloppe de 12 milliards de dirhams, vise l’intégration des chaînes industrielles et l’ouverture sur le marché international. Il vise la mise en place de 371 unités industrielles, ce qui permettra de créer 38.500 opportunités d’emploi et générera un chiffre d’affaires supplémentaires de 42 milliards de DH ainsi une valeur ajoutée supplémentaire de 13 milliards de DH.
La campagne agricole 2016-2017 s’annonce bonne selon les prévisions. Quels sont les rendements attendus notamment en céréaliculture, mais aussi en termes de cheptel, arboriculture, etc. ?
Les premières prévisions pour la production céréalière de cette campagne agricole indiquent une récolte record autour de 102 millions de quintaux, ce qui représentera une hausse de 203% comparativement à la campagne précédente et en dépassement des objectifs ciblés par le Plan Maroc Vert qui sont autour de 70 millions de quintaux.
La campagne agricole 2016-2017 a bénéficié d’une pluviométrie favorable et des températures modérées, ce qui a permis de réaliser des ventes record des semences certifiées, en hausse de 52% par rapport à la campagne précédente. Ceci a eu pour effet une augmentation substantielle de 52% de la superficie cultivée par les graines d’automne.
Plusieurs filières affichent de bonnes perspectives également et d’importantes améliorations dans la production lors de cette campagne agricole. La production d’agrumes a évolué de 20% en une année, atteignant 2,4 millions de tonnes, évolution en harmonie avec les objectifs fixés par le Plan Maroc Vert. La filière dattière n’est pas en reste, elle a atteint un volume de production jamais atteint de 117.000 tonnes.
En ce qui concerne le cheptel, les premiers chiffres recueillis dans le cadre du recensement Général de l’Agriculture font état d’une évolution significative de son effectif avec 4 millions de têtes supplémentaires d’ovins et caprins pour un effectif global de 26,1 millions de têtes, soit une hausse de 18% et + un million de tête de bovins portant l’effectif global à 3,3 millions de tête, ce qui représente une hausse de 43%.
Les Assises de l’Agriculture ont abordé , pour la première fois, la problématique très stratégique des ressources hydriques. Pour quelles raisons et en vue de quels objectifs?
C’est peut-être de la première fois que la thématique principale des Assises a été dédié aux des ressources hydriques mais celles-ci ont toujours figuré au cœur de la stratégie agricole du Royaume, le Plan Maroc Vert.
Ce plan lancé sous la Haute Impulsion de SM Le Roi Mohammed VI que Dieu l’Assiste en 2008 a mis le bon usage des ressources en eau de plus en plus rare comme priorité. Ainsi, trois programmes structurants majeurs dont l’objectif est de valoriser au mieux le potentiel hydrique du Royaume. Il est question du Programme National d’Economie d’Eau en Irrigation (PNEEI), du programme d’extension de l’irrigation (PEI) et du programme de Partenariat public-privé en irrigation. L’ensemble de ces initiatives privilégie des techniques d’irrigation à la fois efficientes, productives et respectueuses de l’environnement.
À termes, nous envisageons via ces programmes d’économiser près de 2 Milliards de m3 d’eau par an, de doubler notre capacité de valorisation de l’eau et de valoriser près de 1,2 Milliard de m3 supplémentaires mobilisés par les barrages réalisés ou en cours de réalisations. Il est à souligner qu’à l’ordre d’aujourd’hui, le PMV a abouti à des résultats encourageants et à très grand impact socioéconomique. Ainsi, la superficie des terres équipées en irrigation localisée est passée de 160.000 ha à près de 500 000 ha. Soit trois fois ce qu’elle était en 2008. A côté de cela, les économies du Maroc en eau sont estimées à plus de 800 millions de m3 par an. Que ce soit hier ou aujourd’hui, mener une réflexion autour de la gestion des ressources hydrique est un impératif. Les efforts menés jusque-là dans le cadre du PMV sur cette question ont permis aux agriculteurs de tripler leur revenus et production tout en recourant à deux fois moins d’eau. Sensibiliser et former davantage à ces techniques durables d’irrigation leur procurera non seulement un meilleur lendemain mais assurera également un renforcement des filières agricoles et de la capacité du Royaume à répondre à la demande du marché national et international tout en préservant ses ressources.
Entretien réalisé par Fahd YATA