Le ministre de l'Économie et des finances, Mohamed Benchaâboun, présente le projet de loi de finances 2019 devant le Parlement
Dans l’exécution de la Loi de Finance 2019, le mois de janvier incarne la nouvelle orientation imprimée par les pouvoirs publics.
Rappelons, à cet effet, que le nouveau Ministre de l’Économie et des Finances, M. Mohamed Benchaâboun, avait précisé lors de la présentation de ce texte, qu’elle sera sociale et engagerait, de ce fait, des budgets plus importants dédiés notamment à l’Éducation et à la Santé, tout en mettant un accent appuyé sur des investissements sociaux de différentes affectations.
Et, de fait, le Budget du premier mois de l’année, traduit que la Loi de Finances 2019 est plus expansive, rompant avec les années précédentes où la préservation d’un certain équilibre budgétaire prévalait dans l’objectif d’éviter de creuser le déficit budgétaire, l’un des principaux agrégats macro-économiques scruté par les institutions financières et les marchés internationaux.
D’ailleurs, pour un pays en développement, la question d’une politique budgétaire faite d’austérité s’est toujours posée comme un frein à son développement et à plus d’investissements et de croissance économique.
Cette même question s’est aussi imposée aux pays riches qui ont affronté la crise économique conséquente à la récente tempête financière mondiale (2007-2008), et continue à faire débat entre les pays européens.
Certains d’entre eux, en effet, qui connaissent des difficultés économiques, ne peuvent respecter les règles trop strictes de l’UE qui interdisent tout dépassement des équilibres budgétaires notamment.
Le Maroc a-t-il compris aux dépens de l’État, principal investisseur et entrepreneur du pays, qu’il doit être plus souple en la matière ?
C’’est ce que l’examen des réalisations budgétaires du mois de janvier 2019 semble montrer.
En effet, les recettes fiscales ont bénéficié d’un meilleur recouvrement et de la fermeté de la Direction Générale des Impôts, la DGI, exercée à travers une politique d’élargissement de l’assiette fiscale.
Mais, du côté des dépenses, la LdF 1019 se concrétise par leur croissance importante, démontrant ainsi cette nouvelle option pour une politique budgétaire expansive.
En effet, si, à fin janvier 2019, l’on constate une augmentation importante des recettes ordinaires, de 14,1%, les dépenses ordinaires, quant à elles, ont crû de 16%.
Dans le détail, les recettes ont bénéficié de la hausse de différentes taxes dont les douanières avec +11,5%, due essentiellement à la TVA à l’importation (+7,3%) et à la taxe intérieure de consommation (TIC) sur les produits énergétiques (+31,3%).
Mais cette hausse tire également son origine de l’augmentation de la fiscalité domestique de +6,4%, soit : +4,7% de l’IS, +6,4% de l’IR et +5,2% de la TVA intérieure, +7,3% des droits d’enregistrement et timbre et de +44% des majorations de retard, résultat de la politique d’exigence en matière de recouvrement fiscal menée par la DGI.
On notera également la hausse des recettes non fiscales de +79,2% en raison notamment de l’augmentation des recettes de monopoles, (106 MDH contre 42 MDH), alors que les dons étrangers se sont taris et que les recettes en atténuation des dépenses de la dette sont passées de MDH 55 MDH à 133 MDH, sachant que le niveau des taux d’intérêt sur le marché des capitaux marocains reste faible et que le Trésor s’est principalement financé à l’intérieur ces dernières années.
Au niveau des dépenses budgétaires de janvier 2019, les dépenses ordinaires émises sont en hausse de 16%, en raison de l’augmentation de 17,8% des dépenses de biens et services, due à la hausse de 11,4% des dépenses de personnel et de 25,2% des autres dépenses de biens et services.
Ce qui montre déjà que l’État se donne les moyens de sa politique !
Mais aussi une augmentation de 9,8% des charges en intérêts de la dette, même si elle est conjuguée à la diminution de 37,8% des remboursements, du fait que le montant global des remboursements de TVA à l’intérieur et à l’importation (part supportée par les collectivités territoriales comprise) est de 228 MDH contre 416 MDH à fin janvier 2018.
Par contre, les dépenses d’investissement émises sont en augmentation de 25,8%, passant de 9,8 MMDH à fin janvier 2018 à 12,3 MMDH à fin janvier 2019.
L’État commence à exécuter sa politique expansive notamment avec une hausse de 130,9% des dépenses des ministères.
Les effets de la hausse des dépenses budgétaires se sont arithmétiquement répercutés sur les soldes du Trésor.
Elles ont tout d’abord entamé le solde ordinaire qui, tout en restant positif, n’est plus que de 857 MDH contre 1.013 MDH un an auparavant.
Pour ce premier mois de 2019, le taux de couverture des dépenses ordinaires par les recettes ordinaires a été de 104,7% contre 106,4% un an auparavant.
Ainsi, à fin janvier 2019, 44,3% de ces recettes ont été consacrées aux dépenses de personnel, 42,4% aux dépenses de matériel, 7,9% aux intérêts de la dette et 1% aux remboursements, dégrèvements et restitutions fiscaux.
La nouvelle politique expansive de l’Etat s’est traduite surtout par un déficit du Trésor, lequel s’est creusé à – 74 MDH contre un excédent du Trésor de 557 MDH à fin janvier 2018.
Ainsi, une partie des dépenses émises au titre du budget de l’Etat a été financée principalement par le recours à l’emprunt.
Et comme le besoin de recettes pour janvier se monte à 11 446 MDH et le budget d’investissement à 12 303 MDH, il est clairement établi que l’Etat finance la quasi-totalité de ses investissements par la dette !
Cette situation concrétisée en janvier pourrait s’accentuer au cours de l’année, se cumulant de mois en mois, sauf que l’État, en comptant partager le financement de ses investissements avec les institutionnels, pourra diminuer son déficit budgétaire en conséquence …
Afifa Dassouli