L’Observatoire africain des migrations, inauguré vendredi à Rabat, revêt une dimension stratégique importante, a souligné le ministre des Affaires étrangères, de la Coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger, Nasser Bourita.
L’Observatoire va fournir à l’Afrique des données spécifiques à même de contribuer à prendre les décisions, à instaurer des stratégies migratoires et à donner une vision claire sur la migration africaine tout en réfutant les mythes qui se tissent autour de cette question, a indiqué M. Bourita.
Le ministre s’exprimait lors d’un point de presse avec la Commissaire aux Affaires sociales de la Commission de l’Union africaine (UA), Amira El Fadil à l’issue de la cérémonie d’inauguration de l’Observatoire.
M. Bourita a en outre relevé que l’Observatoire va permettre à l’Afrique de se mettre en position de force en tant qu’interlocuteur avec d’autres partenaires qui mettaient souvent l’Afrique sur la défensive par rapport aux questions migratoires.
La question de la migration « reste dans de nombreux cas une simple perception, car il suffit de diffuser certaines images dans les médias et les réseaux sociaux pour créer des stéréotypes et des clichés sur la question », a-t-il relevé, notant que l’Observatoire vise, à juste titre, à appréhender la migration en Afrique de manière calme et rationnelle, notamment en termes de son volume, ses causes et son aspect relatif au développemental.
« L’Afrique attendait que toutes ces données lui parviennent d’autres parties, comme les Nations Unies et l’Union européenne. Ceci dit, la défense de cette question était placée entre les mains d’autres parties », a fait savoir M. Bourita, notant que l’immigration est désormais un enjeu international où chaque partie se précipite pour la présenter d’une manière qui sert ses propres intérêts et une certaine perception puisque la migration est devenue une recette électorale dans un ensemble de pays du monde ».
A cet égard, l’Observatoire va agir comme un levier dans le cadre d’un réseau composé de centres de recherche et d’experts, afin de créer une dynamique de recherche scientifique et sociale sur la question de la migration, a-t-il déclaré, appelant l’Afrique à se débarrasser de tout complexe d’infériorité, à faire face à ses problèmes pour maîtriser ses enjeux et à les défendre la tête haute.
Il est erroné de placer tout le poids de la migration sur les pays de transit, puisque la migration est une responsabilité qui incombe à la fois aux pays d’origine et de destination, a-t-il mis en exergue, soulignant que les pays de transit ne peuvent pas jouer le rôle de gendarme, car cela est inacceptable et ne correspond ni aux principes et à la philosophie du Maroc ni à la vision de Sa Majesté le Roi sur la question de la migration.
Le Maroc assume ses responsabilités en matière de migration, dans la limite de ses capacités et responsabilités, et sera toujours un interlocuteur et un partenaire responsable, a-t-il affirmé, ajoutant que la responsabilité nécessite aussi un franc-parler.
« Si on ne fait pas face aux réseaux de l’immigration illégale et de trafic d’êtres humains d’une manière coordonnée dans le cadre de la responsabilité partagée, on ne va pas parvenir à la solution », a relevé le ministre, insistant sur la nécessité de comprendre le phénomène de la migration dans toutes ses ramifications, en commençant par ses causes économiques et sociales pour arriver à la souffrance des immigrés en situation irrégulière due au racisme. En l’absence de cette démarche, le traitement de la question ne sera pas explicite et donc le Maroc s’adressera aux pays européens, en général, avec franchise et responsabilité.
M. Bourita a par ailleurs indiqué que l’inauguration de l’observatoire à Rabat est un événement important à bien des égards, considérant qu’il s’agit de la première institution relevant de l’Union africaine que le Maroc abrite depuis son retour au sein de l’Union en 2017.
Elle reflète aussi le plein engagement du Royaume du Maroc conformément à la vision du Roi Mohammed VI pour une action africaine commune, a-t-il dit.
L’inauguration de l’Observatoire a une forte charge symbolique, qui « s’inscrit dans le cadre de la philosophie ayant présidé au retour du Royaume à l’UA, qui est représentée par le déploiement du Maroc aux côtés des pays africains et de la Commission de l’Union africaine pour donner une impulsion aux questions importantes pour l’Afrique, notamment la migration ».
Dès que le Maroc a réintégré l’UA et que les dirigeants africains ont choisi Sa Majesté le Roi en tant que Leader sur la question de la migration, le Souverain a affirmé que le Maroc s’engagera dans les questions africaines, soulignant à cet égard l’agenda africain pour la migration, adoptée en 2018, qui comprend un ensemble de données et de propositions, dont la plus importante est la création de l’Observatoire et la nomination d’un Envoyé Spécial pour la migration afin de promouvoir une meilleure gestion des migrations sur le Continent, en plus du rôle que joue l’observatoire comme mécanisme de collecte de données à cet égard.
Pour sa part, Mme El Fadil a indiqué que l’inauguration de cet Observatoire vise principalement à offrir une opportunité d’échange d’expériences réussies entre les pays africains, notant que le Maroc est doté d’une expérience réussie qu’il peut, à travers l’Observatoire, partager avec le reste des pays africains.
Relevant que la migration en elle-même est une question positive, à l’exclusion de la migration clandestine, qui ne constitue qu’une petite partie de la migration en général, Mme El Fadil a précisé que la migration interne représente 80% contre 20% pour la migration externe.
Ainsi, le rôle de l’Observatoire est de fournir des preuves scientifiques par le biais de recherches et d’études et de proposer des solutions au problème de la migration, à savoir la réintégration des immigrés de retour dans leurs pays en leur offrant des opportunités d’emploi et de formation.
Le rôle de l’Observatoire ne se limitera pas à des études et recherches, mais inclura également la mise en place d’un système interconnecté de relations pour proposer des solutions radicales, a souligné la Commissaire aux Affaires sociales de la Commission de l’UA, appelant à l’ouverture de canaux de migration légale à travers des accords spécifiques avec des partenaires européens.
Présidée par M. Bourita et Mme El Fadil, la cérémonie d’inauguration de l’Observatoire s’est déroulée en présence notamment de la ministre déléguée chargée des Marocains résidant à l’étranger, Nezha El Ouafi, de l’Ambassadeur-directeur général de l’Agence marocaine de Coopération internationale (AMCI), Mohamed Methqal, et d’un certain nombre d’ambassadeurs accrédités à Rabat.
A cette occasion, M. Bourita et Mme El Fadil ont signé un accord de siège de l’Observatoire africain des migrations entre le Royaume du Maroc et la Commission de l’Union africaine.
LNT avec MAP