Le Premier ministre japonais Shinzo Abe (d) en meeting de campagne, le 20 octobre 2017 à Tokyo © AFP Kazuhiro NOGI
Le Premier ministre Shinzo Abe s’est engagé samedi à protéger les Japonais, au dernier jour d’une campagne électorale dominée par les menaces de la Corée du Nord.
Le Premier ministre nationaliste, qui a déclenché des législatives anticipées, semble en passe de gagner haut la main son pari pour s’assurer un nouveau mandat à la tête de la troisième économie du monde.
« C’est la coalition au pouvoir (…) qui est capable de protéger la vie des gens et de défendre un mode de vie heureux », a-t-il déclaré devant une foule venue affronter la pluie dans le centre du Japon alors qu’un typhon se dirigeait vers le pays. Il faisait clairement allusion à la Corée du Nord qui a menacer de « couler » l’archipel, au dessus duquel elle a déjà fait par deux fois voler des missiles.
Le Premier ministre nationaliste semble en passe de gagner haut la main son pari, en s’assurant un nouveau mandat à la tête de la troisième économie du monde. La coalition du Parti libéral démocrate (PLD, droite) de M. Abe avec le parti Komeito devrait remporter environ 300 des 465 sièges de l’assemblée, selon une projection du quotidien économique Nikkei.
La victoire permettrait à M. Abe de rester aux commandes jusqu’en 2021, s’il emporte la présidence du PLD l’été prochain, et il dépasserait au cours de cette période le record de longévité d’un Premier ministre japonais, établi à près de huit ans.
Loin derrière, le Parti de l’espoir (droite) de la charismatique gouverneure de Tokyo Yuriko Koike et le Parti démocrate constitutionnel (centre gauche), fraîchement créés, obtiendraient chacun une cinquantaine de sièges.
« Nous ne devons pas en rester au statu quo de la politique flasque qui n’est pas parvenue à mener des réformes drastiques et nécessaires », a lancé samedi dans un discours Mme Koike au terme d’une brève campagne de 12 jours.
– Rivale à Paris –
Pris dans des scandales de favoritisme qui ont pesé sur sa cote de popularité, affaibli par une défaite historique de son parti à l’assemblée de la ville de Tokyo en juillet face à Mme Koike, M. Abe, 63 ans, a joué fin septembre la carte de la dissolution de la chambre basse, plus d’un an avant le scrutin prévu.
Il prenait ainsi de court une opposition faible et morcelée pour tenter de faire peau neuve et obtenir un soutien à sa politique de relance économique (« abenomics ») ainsi qu’à sa fermeté affichée vis-à-vis de la Corée du Nord, prônant un maximum de pressions sur le régime et soutenant la position américaine selon laquelle « toutes les options » sont sur la table.
Mais le coup de théâtre est venu de Mme Koike qui a annoncé qu’elle prenait la tête d’un nouveau mouvement politique.
Cette femme de droite de 65 ans, ex-vedette de la télévision au sens aigu de la communication, ancienne ministre de M. Abe et elle aussi nationaliste, a ainsi animé soudain une scène politique japonaise léthargique et précipité sa recomposition.
Le principal parti d’opposition, le Parti démocrate, s’est défait, partiellement absorbé par le Parti de l’espoir, tandis qu’un ex-ténor, Yukio Edano, défenseur de son aile gauche, créait le Parti démocrate constitutionnel du Japon.
Mme Koike a vite perdu de son élan en décidant de ne pas se présenter, ce qui lui enlève toute chance de devenir cheffe du gouvernement dans un pays où la Constitution impose que le Premier ministre soit choisi parmi députés ou sénateurs.
« Tout parti, pour être crédible, doit avoir un candidat au poste de Premier ministre. Ce devait être elle. Or elle a reculé et l’on a un navire soudain sans capitaine », a déclaré à l’AFP Michael Cucek, professeur à l’Université Temple de Tokyo.
Elle devait d’ailleurs être dimanche à Paris, où elle doit participer aux réunions d’une quarantaine de maires de grandes villes du monde sur le changement climatique.
– Amender la Constitution? –
Il lui est reproché aussi de ne pas présenter de programme très concret et différent de celui du PLD, au pouvoir de façon quasi ininterrompue depuis 1955.
Face au vieillissement de la population, à la déflation qui mine l’économie depuis deux décennies et à une croissance poussive, M. Abe vante ses « abenomics » faits de largesses budgétaires et d’une politique monétaire consistant à alimenter le marché en liquidités.
Yuriko Koike lui oppose ce qu’elle a appelé en un clin d’œil les « yurinomics », lui reprochant de ne pas mener de réformes structurelles et promettant de geler un projet de hausse de la TVA. Elle se distingue aussi par sa volonté de mettre fin au nucléaire après le traumatisme de l’accident de la centrale de Fukushima en 2011.
Elle est comme M. Abe favorable à un amendement de la Constitution pacifiste, dictée en 1947 par les États-Unis après la reddition du Japon à la fin de la Seconde Guerre mondiale, dont l’article 9 consacre la renonciation « à jamais » à la guerre. Le Parti démocrate constitutionnel est contre.
LNT avec AFP