Le fondateur de WikiLeaks Julian Assange à l'ambassade d'Equateur à Londres le 5 février 2016 © AFP/Archives BEN STANSALL
Après plusieurs mois d’interruption, la justice britannique a repris lundi l’examen de la demande d’extradition du fondateur de WikiLeaks Julian Assange, réclamé par les Etats-Unis qui veulent le juger pour la diffusion de centaines de milliers de documents confidentiels.
L’Australien de 49 ans a comparu, rasé de près, vêtu d’un costume sombre et d’une cravate bordeaux, confirmant son identité et sa date de naissance et déclarant formellement ne pas consentir à son extradition. C’est sa première apparition publique depuis février.
A l’extérieur de la cour criminelle de l’Old Bailey, à Londres, plusieurs dizaines de ses soutiens, dont la créatrice de mode Vivienne Westwood, ont manifesté avant la reprise des audiences prévues pour durer trois à quatre semaines. Ils ont brandi des pancartes proclamant « Emprisonnez les criminels de guerre, libérez Julian Assange » tandis qu’un camion arborant le message « N »extradez pas Assange » circulait autour du bâtiment.
« L’avenir du journalisme est en jeu », a déclaré le rédacteur en chef de WikiLeaks, Kristinn Hrafnsson, lors du rassemblement. Le père de M. Assange, John Shipton, a lui dénoncé « l’insistance, la malveillance qui s’abattent constamment comme les chutes du Niagara sur Julian. »
Julian Assange est poursuivi notamment pour espionnage par la justice américaine, pour avoir diffusé à partir de 2010 plus de 700.000 documents classifiés sur les activités militaires et diplomatiques américaines, notamment en Irak et en Afghanistan. Il risque 175 ans de prison.
Les Etats-Unis reprochent au fondateur de WikiLeaks d’avoir mis en danger des sources des services américains. Parmi les documents publiés figurait une vidéo montrant des civils tués par les tirs d’un hélicoptère de combat américain en Irak en juillet 2007, dont deux journalistes de l’agence Reuters.
Les avocats d’Assange dénoncent quant à eux une procédure « politique » basée sur des « mensonges ». Or, soulignent-ils, l’accord américano-britannique interdit selon elle « expressément » les extraditions pour les « infractions politiques ».
– Un appel « presque certain » –
Le fondateur de WikiLeaks avait été arrêté en avril 2019 après sept ans derrière les murs de la représentation diplomatique équatorienne, où il s’était réfugié après avoir enfreint les conditions de sa liberté sous caution, craignant une extradition vers les Etats-Unis.
Il revient à la justice britannique de déterminer si la demande américaine d’extradition qui lui est soumise respecte un certain nombre de critères légaux, et notamment si elle n’est pas disproportionnée ou incompatible avec les droits de l’Homme.
Au coeur des débats se trouve également la question de savoir si Julian Assange mène des activités journalistiques, qui doivent être protégées comme telles.
Julian Assange est actuellement emprisonné à la prison londonienne de haute sécurité de Belmarsh, où ses conditions de détention ont été dénoncées par le rapporteur de l’ONU sur la torture.
Son avocat, Mark Summers a souligné les difficultés de communication avec M. Assange en raison des restrictions imposées par la pandémie.
Lors des quatre jours d’audience qui se sont tenus en février, avant une pause prolongée par la pandémie de nouveau coronavirus, Julian Assange était apparu parfois confus, ayant du mal à maintenir son attention.
Son extradition s’apparenterait à une « peine de mort », a déclaré sa compagne Stella Moris au Times samedi. La jeune femme de 37 ans craint que Julian Assange ne mette fin à ses jours et que les deux enfants qu’elle a eus avec lui pendant qu’il était reclus à l’ambassade d’Equateur à Londres ne grandissent sans leur père.
Elle a remis lundi à Downing Street une pétition de Reporters sans frontières contre l’extradition de son compagnon, signée par 80.000 personnes.
Une quarantaine d’organisations de défense des droits de l’Homme et de la liberté de la presse ont appelé à sa « libération immédiate ».
Quelle que soit la décision, il est « presque certain » qu’elle sera frappée d’appel par la partie qui n’aura pas eu gain de cause, a souligné à l’AFP John Rees, l’un des responsables de la campagne contre l’extradition d’Assange.
LNT avec Afp