A l’occasion de la diffusion du rapport annuel du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) sur le développement humain, Jean-Marie le Guen, secrétaire d’Etat français chargé du Développement et de la Francophonie, a déclaré jeudi dernier que « la France agira contre toutes les tentatives de marchandisation de l’éducation » dans la coopération internationale. Il a ajouté que la France considère que l’éducation est « un service public » et « un bien commun qui ne doit pas être monnayé ». Selon Sylvain Aubry, du Global Initiative for Economic, Social and Cultural Rights, c’est une évolution majeure qui pourrait changer les dynamiques internationales de privatisation de l’éducation dans les pays en développement. Cette initiative qui s’inscrit dans le cadre des stratégies pour l’action extérieure de la France en matière d’éducation, de formation professionnelle, d’insertion et de santé dans les pays en développement pour la période 2017-2021, représente une belle avancée. Il s’agit en effet, d’une annonce importante traduisant l’engagement de la France face à privatisation galopante de l’enseignement. «Dans un contexte de privatisation et de marchandisation massive de l’enseignement primaire et secondaire à travers le monde, particulièrement dans les pays pauvres, cette déclaration pourrait avoir un véritable impact. Pour Hélène Ferrer, coordinatrice de la Coalition Education, il s’agit d’une position sans ambiguïté exprimée par M. Le Guen contre la marchandisation de l’éducation. «Cela conforte les efforts entrepris par la France pour promouvoir des systèmes éducatifs qui soient respectueux des droits humains. Nous allons maintenant travailler avec le ministère et nos partenaires à travers le monde pour s’assurer de l’effectivité de cet engagement », dit-elle.
Cette annonce fait suite à l’Appel de la société civile francophone contre la marchandisation de l’éducation. Adressé à l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) en novembre 2016 par un près de 300 ONG engagées contre la marchandisation de l’école, cet Appel semble avoir convaincu les chefs d’Etats et de gouvernement des pays de la Francophonie. Baptisé, la Déclaration d’Antanarivo les établissements, cet appel, incite, entre autre, les Etats « à lutter contre les établissements d’enseignement à but commercial, qui sont en contradiction avec les droits de l’homme ; à renforcer leur engagement à travers la mobilisation significative de ressources publiques en faveur de l’éducation, en consacrant au moins 20% du budget national et au moins 6% du produit intérieur brut à l’éducation publique, et en prenant des mesures pour lutter contre la corruption et l’évasion fiscale ; à ne prendre aucune mesure encourageant le développement de la privatisation de et dans l’éducation….»
Suite à cette annonce, la France devrait ainsi, renforcer son rôle de régulateur et mettre des garde-fous dans la coopération internationale pour guetter toute aide pouvant aller aux écoles privées. Pour rappel, la France accorde une priorité à l’éducation dans le poste Aide au développement, notamment dans les pays d’Afrique francophone. «La position de la France se différencie notamment de celle de la Grande-Bretagne qui a promu le développement d’écoles privées à travers son aide au développement, en particulier en finançant des entreprises multinationales avec des investissements Britanniques, telles que Bridge International Academies», explique Sylvain Aubry.
« La France doit maintenant, à travers toutes ses instances de coopération, du Ministère des Affaires Etrangères à l’Agence Française de Développement (AFD), s’abstenir de tout soutien à des écoles privées marchandes, et engager des actions concrètes pour promouvoir des systèmes éducatifs publics de qualité », a déclaré pour sa part Jean-Hervé Cohen, président du Comité Syndical Francophone de l’Éducation et de la Formation.