M. Hamid Tawfiki, DG de CDG Capital
« Les nouvelles solutions d’investissement face aux défis de la gestion institutionnelle », telle était la thématique de l’Investment Management Forum, initié par CDG Capital en 2017 et dont l’acte II s’est tenu mercredi 24 octobre à Casablanca, sous la problématique « gestion active et gestion passive ».
Un sujet d’actualité puisque la gestion de l’épargne, à travers des stratégies adaptées et créatrices de valeur, est un enjeu majeur pour les investisseurs ainsi que pour le financement de l’économie.
Ce forum a connu une participation relevée et a été animé par des experts internationaux et nationaux dont les communications seront reprises par La Nouvelle Tribune-www.lnt.ma.
C’est par l’évocation de l’intervention introductive de M. Hamid Tawfiki, Directeur général de CDG Capital, que nous entamons la publication des moments forts de ce forum.
Pour M. Tawfiki, en effet, « la gestion d’actifs est un sujet vaste, vivant, passionnant, passionnel même. C’est aussi un sujet structurant pour le financement de l’économie.
L’efficience continue de la gestion d’actifs est notre obsession commune. Elle doit être développée autour des axes que sont l’intégration des objectifs et contraintes spécifiques à la nature de l’épargne, la définition d’une macro-allocation pertinente, la mise en place de différents styles de gestion créateurs de valeur et la mise en œuvre d’une exécution optimisée ».
Et le Directeur général de CDG Capital de préciser sa pensée en expliquant que : « Pour la gestion d’actifs, le statu quo n’est jamais une option. En effet les sociétés de gestion d’actifs, étant des intermédiaires entre les « assets owners » et les marchés, sont condamnés d’évoluer, d’innover pour survivre ».
L’innovation, une nécessité incontournable
En effet, comme le précise M. Tawfiki, « Innover consiste à créer, en collaboration avec leurs clients, des solutions/instruments d’investissement répondant à leurs besoins, en partant du principe qu’ils agissent « avec eux » plutôt que « pour eux ».
Le problème des innovations en matière d’investissement, contrairement aux innovations physiques, est que leur efficacité dépend de l’état du marché au moment où elles sont mises en œuvre.
L’histoire nous enseigne que les grandes crises sont souvent l’occasion de changements d’approche ».
Mais personne n’a oublié les affres de la fin de la décennie 2000, ce que rappelle à juste titre le « boss » de CDG Capital : « C’est assurément le cas de la crise financière internationale de 2007-2008, qui a montré qu’un grand nombre de certitudes en matière d’investissement étaient erronées. Il est ressorti de cette crise que les obligations d’État ne sont pas toujours des placements sûrs, ou encore que les actions ne produisent pas systématiquement une bonne performance à long terme ».
Voilà pourquoi, estime M. Tawfiki, il est indispensable de veiller à « la diversification des classes d’actifs, censée réduire la volatilité des portefeuilles, qui s’est révélée plutôt inefficace lorsqu’à la faveur de tensions majeures au sein du système financier, les corrélations entre ces classes d’actifs ont bondi ».
C’est ainsi que désormais « on parle aujourd’hui d’une nouvelle révolution industrielle de la Gestion d’Actifs au Service de l’Épargnant ».
En effet, estime le DG de CDG Capital, « on parle de révolution industrielle car il s’agit aujourd’hui de passer d’une industrie de production de fonds d’investissement, packagés pour battre ou répliquer un indice de marché, à une industrie de service, capable de proposer à chaque épargnant une solution d’investissement adaptée à ses projets d’épargne, au coût le plus faible possible, dans un dialogue permanent, s’appuyant sur les nouvelles technologies digitales ».
Organiser le changement
Voilà pourquoi il est nécessaire, selon l’orateur de mettre en place les mécanismes du changement afin de mieux appréhender les nouvelles donnes qui caractérisent la gestion d’actifs. « Les thématiques centrales aujourd’hui essaient de répondre aux questions suivantes : comment mieux appréhender les besoins des clients ; comment mieux appréhender le profil et les préférences des clients ; comment concevoir des solutions de placement adaptées à ces besoins ; comment évoluer du reporting vers le dialogue.
C’est un changement profond qui concerne tous les acteurs. Il concerne toute l’industrie, ses infrastructures de gestion et de distribution, de service au client et de communication. Il concerne enfin l’épargnant lui-même, qui devra épargner plus tôt et de manière beaucoup plus éclairée que par le passé ».
Mais pour M. Hamid Tawfiki, il n’est pas question de tomber dans l’angélisme et de minorer les insuffisances qui caractérisent encore le marché car, « le contexte de notre marché national encore en maturation est marqué par sa faible profondeur : le manque de liquidité́ et la faible diversification de profils des acteurs financiers nuit à la crédibilité́ de la structure de prix et du marché́ dans son ensemble comme espace de redistribution des risques.
Ceci dit, le rôle des gérants d’actifs au Maroc se veut et se doit être structurant. A mon avis aucun maillon-clé́ de sa chaine de valeur ne peut être un ‘simple’ utilisateur passif, “ou se contenter d’être un observateur ou commentateur averti”, ou encore un simple opportuniste du marché́. Les gérants d’actifs sont aussi les faiseurs du marché ».
Une première grâce à CDG Capital
Abordant la dernière partie de son intervention qui a fortement retenu l’attention de l’assistance, M. Tawfiki a souligné la pertinence de la démarche scientifique appliquée par CDG Capital à l’occasion de ce forum, voulu par l’institution comme un moment de réflexions approfondies sur la gestion d’actifs :
« Après avoir traité la LDI (Liabillity Driven Investment) l’année dernière, la thématique choisie pour aujourd’hui est une thématique intéressante qui est aujourd’hui « non-déclarée » au Maroc.
Elle existe dans les esprits des différents acteurs, mais elle n’a pas encore été débattue publiquement. Nous pensons qu’elle est fort utile, elle est probablement équivoque, une chose est sûre c’est qu’elle ne laisse pas indifférent. Il s’agit ici de la comparaison entre la Gestion « active » et la Gestion « passive » ».
Autrement dit, l’«Alpha» vs le «Beta» , ou encore la comparaison entre la gestion qui délivre la performance “naturelle” composite d’un marché et celle qui vise à délivrer un surplus , une valeur ajoutée supplémentaire.
Ce que je peux vous dire c’est qu’en étudiant de très près cette thématique, on saisit mieux l’alpha et l’oméga du métier.
A l’international, la percée de la gestion « passive » a été une bonne nouvelle pour les investisseurs car elle a également contribué à faire baisser les frais de gestion.
Elle a imposé aux gérants actifs de démontrer que les tarifs qu’ils pratiquent sont justifiés, pas uniquement au regard de la performance délivrée, mais également au regard d’autres critères tels que le bon alignement de leurs intérêts avec ceux de leurs clients.
Le concept même de gestion « active » a évolué. Auparavant, la génération d’alpha consistait à produire des performances indépendantes de l’indice de référence. Aujourd’hui, il s’agit de générer une performance qui ne soit pas liée à un facteur de risque systématique. En conséquence, une troisième stratégie d’investissement est apparue, qui se situe entre la gestion active et la gestion passive : l’investissement basé sur les facteurs de risque ».
Et le Directeur général de CDG Capital de conclure : « Les intervenants (locaux et étrangers) dans ce Forum, que je remercie vivement pour leur contribution, ont une grande expérience sur le sujet, leurs inputs seront variés, leurs témoignages enrichissants, et leurs éclairages se veulent complémentaires ».
Un constat anticipateur et prémonitoire comme le montreront les interventions qui ont suivi l’allocution d’ouverture de M. Hamid Tawfiki et dont nous rendons compte par ailleurs.
Afifa Dassouli