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La pandémie de la Covid-19 a été un formidable accélérateur comportemental pour le secteur du digital dans le monde entier. En toute logique compte tenu du contexte, la population mondiale a consommé plus que jamais les technologies digitales disponibles, de la banalisation de la commande de tous biens en livraison à domicile, à l’usage cross générations des réseaux sociaux et des plateformes de visioconférences. Forcément, cela donne des ailes aux acteurs de la chaine de valeur digitale qui ont cru voir dans ce changement comportemental une nouvelle étape franchie vers le tout digital.
Ces trois dernières années ont donc été caractérisées par une fuite en avant, voire une surenchère dans le domaine du digital par certains acteurs majeurs. Les NFTs, ces fameuses œuvres digitales dématérialisées aux cotations vertigineuses de quoi faire pâlir la Joconde, les experts des cryptomonnaies qui proposent portefeuilles et conseils pour faire partie des heureux chanceux qui vont devenir riche du fond de leur canapé, ont tellement pullulé que ces niches sont devenues mainstream pour le grand public qui y est exposé au quotidien sur les réseaux sociaux.
Sauf que, comme une bouteille de soda mal bouchonnée, le tout a fait « pshiit » en un rien de temps. Parce que tout le monde n’est pas Nike ou Justin Bieber qui peuvent se permettre de faire une incursion dans ce nouveau monde plein de promesses malgré un fort risque financier. Parce qu’aussi, les gurus autoproclamés ou érigés comme tels par les internautes, de Zuckerberg à Musk, n’ont pas tant que ça la science infuse et ont montré leur capacité flagrante à se tromper. Non, l’écrasante majorité des internautes n’est pas si pressée que cela de se transformer en petit Sims avec un casque de réalité virtuelle visé sur le crâne. De même pour ceux que l’ampleur de la catastrophe de l’effondrement, non pas des cours des cryptomonnaies mais bel et bien de tout l’écosystème qui le compose, intéresse, le feuilleton récent de la banqueroute frauduleuse de la nébuleuse plateforme FTX et de son fondateur SBF, témoigne de l’adage « there’s no free lunch ». Chez Amazon, Meta, Twitter, les licenciements sont massifs et indiquent bel et bien que la fête est finie.
Le digital, tel un oignon, révèle ses différentes couches et celle qui a le plus de valeur n’est pas la couche superficielle composée des réseaux sociaux et de leurs émanations. C’est plus profondément que la transformation digitale du monde s’est concrétisée pendant la pandémie. Ce ne sont pas les usages de consommation, volatiles à souhait comme en témoigne la reprise de l’activité économique sous sa forme plus classique et notamment le recul du télétravail, mais les processus et la fourniture de services digitalisés qui s’est développé massivement. De la santé à l’industrie, en passant par la logistique, le secteur bancaire ou l’agriculture, c’est l’économie réelle qui s’équipe d’outils digitaux. C’est l’heure de la deeptech, du big data et de son analyse, de la cybersécurité, des services publics digitalisés, des domaines bien plus probants et à la plus-value économique bien plus palpable que la valeur estimée d’un avatar à la tête de singe.
Le Maroc dans ce contexte a tout intérêt à tirer les enseignements le plus tôt possible du caractère mouvant de cette couche superficielle que le plus grand nombre comprend lorsqu’on parle de digital. L’avenir économique, la compétitivité, l’emploi de notre pays dépendent de choix clairs pour la fameuse Digital Nation que le Maroc veut devenir. S’assurer que nous formons des compétences techniques dans le digital qui sont exploitables dans tous les secteurs est bien plus symptomatique du développement du digital marocain que le nombre d’influenceurs qu’on compte en ouvrant Instagram.
Zouhair Yata