Sans trop de bruit ni de polémique, le Gouvernement Akhannouch, le patronat et les centrales syndicales les plus représentatives ont signé la veille du premier mai 2022, le procès-verbal d’un accord social et une charte nationale du dialogue social. Premières remarques : les choses se sont passées dans une grande discrétion. Les syndicats ont signé visiblement dans la joie. Quant au Gouvernement ou encore la CGEM, leur satisfaction est grande. Rappelons qu’auparavant, notamment du temps des mandats El Othmani, Benkirane, Abbas El Fassi ou encore Jettou, le dialogue social, fer de lance de la paix sociale, se présentait comme étant une ‘‘mission impossible’’. Un véritable casse-tête. Le désaccord fut justement la règle. L’UMT, la CDT, l’UGTM ou encore la FDT, menaient une lutte des plus acharnées, voire agressives, contre toute tentative de rapprochement des points de vue des acteurs sociaux. D’ailleurs, le dernier dialogue sociale signé date du mandat Jettou.
Mais qu’est-ce qu’a proposé justement Aziz Akhannouch aux syndicalistes comme recette si convaincante, que ceux-ci ont si vite signé ?
Tout d’abord, le procès-verbal de l’accord couvrant la période 2022 à 2024 comporte un ensemble d’engagements mutuels, dont le relèvement du salaire minimum dans les secteurs de l’industrie, du commerce et des services de 10% sur deux ans, l’unification progressive du salaire minimum légal entre les secteurs de l’industrie, du commerce, des professions libérales et du secteur agricole.
Il stipule de relever le salaire minimum dans le secteur public à 3.500 Dhs nets, la suppression de l’échelle 7 pour les fonctionnaires appartenant aux catégories d’adjoints administratifs et assistants techniques, de porter le quota de promotion dans le grade de 33 à 36%, et d’augmenter la valeur de l’indemnisation familiale pour les quatrième, cinquième et sixième enfants dans les secteurs public et privé.
De même, il a été décidé de réduire la condition de bénéfice de la pension de vieillesse de 3.240 jours d’affiliation à 1.320 jours, de permettre aux assurés ayant atteint l’âge légal de la retraite et disposant de moins de 1.320 jours d’affiliation, de récupérer leurs cotisations salariales et les cotisations de l’employeur, et de permettre aux assurés de la CNSS se trouvant à la retraite et touchés par la pandémie, de bénéficier de la pension de vieillesse, sans tenir compte des cas où ils n’auraient pas perçu de salaire ou auraient reçu un salaire incomplet.
L’État prend en charge les frais d’une offre qui contribuera à réduire le coût des salaires des travailleurs domestiques auprès de leurs employeurs, dans le but de favoriser une meilleure adhésion des femmes actives au marché de l’emploi et d’augmenter le rythme de leur activité économique.
Les parties ont également convenu d’un calendrier pour l’élaboration de la loi organique relative aux conditions d’exercice du droit de grève, la révision de certaines dispositions du Code du Travail et de la loi relative aux syndicats professionnels, et la révision des lois réglementant les élections professionnelles, selon la méthodologie qui sera adoptée par la commission qui sera créée en vertu de la Charte nationale du dialogue social, en tant qu’espace idéal pour débattre de la législation du travail et identifier les amendements. Le communiqué souligne que ladite Charte permettra la gestion d’un dialogue social à plusieurs niveaux, basé sur le référentiel de l’année sociale selon une méthodologie claire, une périodicité, des dates précises et des rôles spécifiques des différentes structures émanant de la Haute Commission du dialogue social et des mécanismes existant dans le cadre du Code du travail, avec une gouvernance efficace pour assurer l’intégration et la convergence entre les différents mécanismes. Aussi, il sera procédé à la mise en place des mécanismes d’accompagnement de l’institutionnalisation. Il s’agit de l’Observatoire national du dialogue social qui se veut un espace de consolidation du tripartisme et d’élargissement du cercle du pouvoir propositionnel. Il aura pour missions d’assurer la veille sociale, la production d’indicateurs, le suivi et l’actualisation des données, ainsi que la coordination lors de l’élaboration du rapport annuel sur le climat social.
En attendant, on peut dire sans risque de se tromper que le Gouvernement Akhannouch vient de s’offrir un énième chantier social, certes de taille, mais dont le non-respect de la mise en œuvre dans les délais prévus, risque de décevoir davantage tous ces citoyens qui attendent toujours du concret d’un Gouvernement qui a tant promis de belles choses aux Marocains. Une affaire ‘‘Quitte ou Double’’.
Hassan Zaatit