Historiquement, lorsque l’humanité a connu une innovation scientifique ou technologique majeure, très rapidement après, la Loi est venue pour encadrer les effets de ces innovations. Si cette tendance s’est confirmée depuis le Moyen-âge, aujourd’hui, nous observons un phénomène nouveau, récent et rapide ; la vitesse des innovations est devenue exponentielle alors que la production des lois ne l’est pas. Voire elle est souvent à la traine.
Les innovations se développent, mais leur encadrement juridique peine à suivre. C’est le cas en termes de biotechnologies, de big data, d’intelligence artificielle, de robotisation… Des sujets contemporains majeurs, qui, mal appréhendés, pourraient mettre à risque la planète et le devenir de la race humaine.
Pour autant, les entreprises, surtout les plus grandes, doivent quand même prendre des décisions et c’est l’éthique, qui dans ces cas, compense la baisse de l’importance relative du Droit. Les décisions prises sur la base de la gestion par les valeurs et des principes éthiques prennent de plus en plus d’importance du fait de la célérité des innovations.
Ainsi, de grands acteurs au cœur de ces innovations entament des réflexions éthiques de fond à la mesure des enjeux. Et comme l’on apprend en marchant dans ce domaine, compte tenu de la rapidité des évolutions, des erreurs peuvent-être commises, comme on a pu récemment le vivre avec les géants du web et la gestion des données personnelles des internautes.
Cette crise récente révèle par ailleurs que la sincérité de la démarche dans l’éthique est un des principaux critères de distinction pour décoder les décisions des organisations qui s’en réclament. De fait, une fois les principes et les valeurs proclamés, ce sont les actions qui comptent et les entreprises qui fondent leur action sur l’éthique sont invitées à « walk the talk ».
Éthique et confiance, le revers de la médaille
Traditionnellement, les entreprises sont évaluées principalement sur la base de la valeur concrète qu’elles produisent ou de leurs attributs financiers et comptables.
Pour M. Emmanuel Lulin, Directeur de l’Éthique du groupe L’ORÉAL, « le critère de l’éthique mériterait de constituer un « compte » supplémentaire qui valorise la culture d’intégrité de l’entreprise. Plus l’intégrité de l’entreprise est forte plus sa valeur et sa propension à la pérennité sont élevées. »
De même, la capacité de l’entreprise à générer de la confiance et à la maintenir est cruciale pour en évaluer la valeur. « Le groupe L’Oréal, a besoin de la confiance de ses clients, de ses fournisseurs, de toutes ses parties prenantes y compris de ses collaborateurs. Sans cette capacité de l’entreprise à générer de la confiance, sa valeur peut baisser substantiellement. » ajoute M. Lulin.
Le boycott des marques marocaines des dernières semaines témoigne justement du fait que la culture de l’intégrité et de la transparence ne suffit pas si la capacité à maintenir la confiance est rompue.
Pour remonter le courant, il faudra du temps, de la sincérité, de l’intégrité, du respect, de la transparence et des fois du courage pour rétablir les conditions de la confiance et la mériter à nouveau. Parce que l’éthique est un long chemin qui nécessite une forte abnégation.
Le cas du groupe L’Oréal est éloquent à cet égard et se distingue par son approche. Sous l’impulsion de son Président Jean-Paul Agon, l’éthique du groupe s’affiche comme une démarche de convictions. « Ce n’est pas une démarche de réaction, mais de proactivité et de volontariat. » précise Emmanuel Lulin.
« L’ORÉAL a la conviction qu’au XXI è siècle, seules les entreprises ayant intégré l’éthique dans leur culture, leur stratégie et leurs pratiques quotidiennes seront pérennes. Notre ambition est d’être l’une des entreprises les plus exemplaires au monde. « L’Esprit L’Oréal » résume l’engagement de L’Oréal à agir de façon éthique et responsable, sur la base de nos quatre Principes Ethiques : le Respect, l’Intégrité, le Courage et la Transparence. »
Une approche fondée sur la sincérité, assez rare parmi les grandes entreprises comme le groupe présent dans 150 pays et qui compte près de 82 000 collaborateurs. Mais, c’est là tout le secret de la démarche, la quadrature du cercle, là où l’humain est au centre, les questions éthiques deviennent très opérationnelles.
Par exemple, à travers un dialogue, ouvert et franc, sans langue de bois, sur les sujets des plus divers aux plus tabous, les collaborateurs diffusent les valeurs de l’entreprise tout en abordant des vrais sujets. La sincérité dans l’approche permet de diagnostiquer les causes profondes et de prendre des mesures correctives sans double standards.
L’éthique, abordée avec sincérité, s’impose alors comme un ADN, irrévocable et définitif.
Zouhair Yata
LA CHARTE ETHIQUE DE L’OREAL
- Document de référence pour le Groupe
- Existe depuis 2000 (l’une des premières entreprises françaises)
- Deuxième édition en 2007 (disponible en 35 langues/43 versions + en braille anglais/français)
- Troisième édition en 2014 (disponible en 45 langues + en braille anglais/français)
- En 2017, L’Oréal reçoit le 1er Grand Prix de la Transparence – Charte Éthique
BIOGRAPHIE DE M. EMMANUEL LULIN
Emmanuel LULIN nommé en 2007, Directeur général de l’Ethique, délégué du Président. Rend compte directement au Président-Directeur Général, a également pour mission de superviser le respect des Droits Humains dans le Groupe.
Emmanuel entre à L’ORÉAL en 1999 comme Directeur Juridique des Relations Humaines. En 2007, il crée la Direction Générale de l’Ethique du Groupe L’ORÉAL. Avant L’ORÉAL, admis au Barreau de Paris en 1988, Emmanuel exerçait comme avocat d’affaires et fiscaliste au sein de Debevoise & Plimpton. Il travaille à Paris et à New York. Emmanuel est Master of Laws de l’Université de Chicago et diplômé en Droit des Universités de Paris I (Panthéon-Sorbonne) et Paris II (Assas). En 1988, il est Lauréat Lavoisier du Ministère français des Affaires Etrangères.
Il est Administrateur de l’Ethics Resource Center (Washington DC) depuis 2016. Il est ancien Chair du Global Business Conduct Council (New York). Il est membre du Comité d’Ethique du MEDEF. Emmanuel représente L’ORÉAL dans plusieurs organisations internationales dont U.N. Global Compact, U.N. Women et l’Institute of Business Ethics (Londres). A l’origine de la création du 1er Master en Droit et Ethique des Affaires en France, il est membre de Comités Scientifiques d’universités ou de revues consacrées à l’éthique des affaires et enseigne régulièrement à Stanford, Sciences-Po Paris, au CEDEP, à l’EDHEC.
En 2012, 2014 et 2017, Emmanuel est distingué par Ethisphere Institute comme “Top Ethics & Compliance Officer”. En 2015, il est le premier non-américain à être distingué par le “Carol R. Marshall Award for Innovation in Corporate Ethics” décerné par l’Ethics and Compliance Initiative (ECI). Il a été membre du Comité Ethique de l’Agence Française du Développement et de l’Institut Français des Administrateurs et ancien administrateur du Cercle Montesquieu, de l’Ethics & Compliance Officer Association aux Etats-Unis (2007-2012) et du Cercle Ethique des Affaires en France (2011-2017).
Il créé le Club des Professionnels de l’Ethique du Cercle Ethique des Affaires en 2012 et préside le groupe de travail de l’ORSE, “Ethique, Responsabilité et Stratégie d’entreprise” (2017). Il a initié le ThinkH+ avec la Clinique du Droit de Sciences Po Paris, 1er Think Tank sur le Transhumanisme en France. La démarche Ethique de L’ORÉAL est internationalement reconnue 9 fois par Ethisphere comme l’une des « Sociétés les Plus Éthiques au Monde ».
En 2017, L’Oréal reçoit le premier Grand Prix de la Transparence – Charte Éthique. En 2018, L’Oréal est distinguée par le Prix d’Excellence pour ses actions en matières d’éthique des affaires et de gouvernance dans les catégories Gouvernance Éthique, Leadership Éthique et Influenceur Éthique par la Chaire-Master Droit et Éthique des Affaires de l’Université de Cergy-Pontoise.