Le Maroc, au même titre que le monde dans son ensemble, a connu des circonstances particulières de crise sanitaire et d’instabilité avec la guerre Russo-Ukrainienne, une dépression économique caractérisée par une incertitude qui ne se prête pas à l’investissement qui lui, exige la confiance !
D’autant que la sortie de la Covid s’est fait attendre avec les vagues successives de variants du virus et que les impacts du conflit russo-ukrainien ont vite pris le pas : inflation des produits énergétiques, alimentaires, problèmes de logistiques de l’acheminement des biens, de stock et de production des produits de tout genre. Les opérateurs économiques se devaient d’attendre plus de visibilité pour investir.
Toutefois, aujourd’hui, les chiffres de croissance économique révèlent qu’il n’y a pas eu de dépression économique mondiale et que les prémices d’une reprise économique se pointent, accompagnés de besoins en investissements. Dans ce contexte, le Maroc se doit d’opérer un repositionnement parce la cartographie mondiale du commerce international est en train de changer. La relation commerciale des pays européens avec l’Asie et la Chine est en train de muter en faveur de plus de productions propres ou avec des partenaires de proximité. Le Maroc grâce à son infrastructure, un tissu industriel existant et une stabilité politique donc commerciale peut en bénéficier. Aussi, son positionnement géographique et ses relations avec les pays du Sud sont aussi des leviers pour cette proximité. Il peut se prévaloir d’être un hub et/ou plaque tournante commerciale du pourtour méditerranéen et de l’Afrique.
Dans ce cadre, la nouvelle charte d’investissement, annoncée par SM le Roi en octobre 2021, devenue depuis une réalité depuis sa publication au bulletin officiel et après la sortie de son premier décret d’application, devrait devenir la charpente de la relance de l’Investissement dans notre pays.
En effet, la nouvelle charte d’investissement en question traduit la nouvelle stratégie de notre pays en la matière. Elle se base sur un accompagnement en direct des investisseurs par des subventions sous forme de primes définies selon des critères précis, traduit au cas par cas dans une convention dument signée avec le ministère de l’Investissement.
De ce fait, elle ne propose aucune incitation fiscale et ne concerne en rien la DGI.
Ses objectifs sont clairement définis et consistent en une volonté ferme de faire basculer la part de l’investissement privé de 1/3 de part globale du pays à 2/3. Avec une réalisation en investissements sur un temps court de 2 ou 3 années, d’un volume de 550 milliards de dirhams, accompagné de la promotion de l’emploi avec la création d’au moins 500 000 emplois directs, sans compter l’impact sur les micro-entreprises et les auto-entrepreneurs.
L’autre volonté affirmée par la nouvelle charte d’investissement, très importante, porte sur la transformation d’une grande partie des produits importés en fabrication locale pour réduire notre dépendance aux importations d’intrants qui impacte le déficit commercial qui s’est creusé avec les crises en question, et l’inflation importée, et ce, malgré l’augmentation de nos exportations.
Selon des sources bien informées, le Maroc reçoit une forte demande du marché extérieur en ce moment-même et devrait y trouver l’occasion de diversifier ses marchés traditionnels de l’Europe du Sud en s’adressant à d’autres zones et pays, du Brésil à la Grande-Bretagne… Et il faut compter tout particulièrement sur les pays Africains, nos partenaires, qui nous offrent des opportunités pour booster nos exportations marocaines dans une logique de co-développement pour une production locale de certains intrants.
Sur la plan national, le système bancaire à travers les grandes banques, se lance déjà dans l’accompagnement de ces changements en renouvelant leur attache avec les investisseurs pour leur redonner confiance à travers les arguments de la charte d’investissement en question.
Dans un premier temps, il s’agit d’informer les opérateurs, investisseurs, industriels, promoteurs ou entrepreneurs marocains, des propositions d’accompagnement contenues dans cette dernière dont ils peuvent bénéficier dans leur diversité.
Il faut savoir qu’avant cette charte d’investissement, les subventions de l’État étaient réservées à certains secteurs, tandis qu’aujourd’hui ce sont tous les opérateurs économiques porteurs de projets d’investissement qui vont être accompagnés dans leur démarche d’investissement.
Mais aussi, la nouvelle charte contient une dimension très importante, celle de la réduction des disparités territoriales !
Le principe de l’intervention de l’État se base sur une différenciation de l’encouragement des investisseurs. Lequel se décline sous différentes primes : la prime d’intégration territoriale qui peut être de 10 à 15% en aide à l’investissement ; la prime sectorielle qui peut atteindre 5% ; celle à l’emploi de potentiellement de 10% ou encore la prime au genre de 3% ; celle environnementale et au développement durable de 3%. Ces primes, pouvant être dans certains cas cumulables, dans la limite du plafond de 30% tel que fixé par l’État dans la nouvelle charte.
Par ailleurs, l’accès au foncier est aussi grandement facilité par cette nouvelle charte. Par exemple, au niveau des zones industrielles, les acquéreurs ou propriétaires seront obligés de les développer ou de les restituer à l’État, ce qui permettra de lutter contre la spéculation notamment et permettra le développement de plus de zones industrielles.
Et, pour une mise en application rapide de la charte d’investissement, l’État s’est engagé à réformer le circuit de traitement et de décision, pour accompagner le déploiement de cette dernière. Ainsi, les Centres régionaux d’investissement qui étaient jusqu’à présent sous la tutelle du ministère de l’Intérieur, passent sous celle du ministère de l’Investissement nouvellement créé. Il leur sera également attribué de façon primordiale un rôle de conseillers et de facilitateurs auprès des investisseurs au sens fonctionnel et opérationnel pour faire aboutir leurs projets. Sachant que les conventions avec l’État jusqu’à hauteur de 250 millions de dirhams, seront décentralisées au niveau de ces centres régionaux d’investissements, CRI.
Mais, les banques font partie du processus de financement des investissements soutenus par la charte. Et pour cause, elles devraient jouer un rôle de relais dans le financement des primes de l’État pour les projets des investisseurs, dans la mesure où celles-ci seraient versés en intégralité par l’État après réalisation totale de l’investissement, en accompagnant le financement tout le long du projet.
Et peut-être interviendront-elles à d’autres niveaux pour adapter la charte d’investissement aux différents interlocuteurs économiques au fur et à mesure que les décrets seront publiés.
A ce jour, seul le premier décret de la charte a été publié, il s’adresse aux entreprises qui réalisent un investissement de plus de 50 millions de dirhams ou qui créent plus de 150 emplois. Les autres attendus concernent les mesures pour les Marocains résidents à l’étranger, pour les investisseurs Marocains à l’étranger notamment qui réalisent des IDE en Afrique, la promotion de l’export et enfin, surement d’ici la fin de l’année, celui en faveur de la TPME.
AWB et la BCP, ont donc lancé des tournées régionales. Pour AWB, 8 villes seront déjà touchées avant le mois de Ramadan, pour que la charte soit vulgarisée, mais où seront aussi présentés tous les outils d’accompagnement proposés par AWB pour la prise en charge des investisseurs afin de les diriger vers les bons interlocuteurs au sein du groupe et auprès des autorités étatiques, du CRI au ministère, en fonction du circuit adapté à leurs besoins.
Différentes cellules sont prévues au niveau de la banque, et tous les centres, jusqu’à la TPME, ont été formés sur la nouvelle charte, pour le montage du projet et les différentes phases d’accompagnement financiers et non-financiers.
La volonté de l’État, qui reste celle de favoriser un plus grand accompagnement des entreprises dans leur démarche d’investissement en les y encourageant, va certainement créer des émules qui indéniablement permettra d’atteindre les objectifs de la charte d’investissement à moyen terme. Sachant qu’en plus, l’ambition de l’État en matière d’investissement est aussi basée sur la création du Fonds Mohammed VI qui va, en appui à la charte d’investissement, jouer le rôle d’un formidable booster d’investissement en renforçant les fonds propre des entreprises concernées…
Afifa Dassouli