Ouverture du salon Halieutis 2019
Agadir, la capitale du Souss, qui reste l’une des régions les plus dynamiques dans l’halieutique, abrite du 21 au 24 février, la cinquième édition du Salon Halieutis. Le plan du même nom avait été lancé en 2009, un Plan stratégique où le Maroc a placé le développement du secteur halieutique parmi les piliers majeurs pour édifier une économie bleue durable et à forte valeur ajoutée. Outre les opportunités en termes de création de valeur ajoutée et d’emplois, le secteur recèle d’opportunités sur le plan des échanges extérieurs au vu de la dynamique soutenue des importations mondiales de poissons. Le plan Halieutis compte ainsi à son actif plusieurs projets structurants touchant l’ensemble de la chaîne de valeur d secteur de la pêche.
Ce plan est aujourd’hui à une année de son échéance. A Agadir, le ministre de l’Agriculture, de la Pêche Maritime, M. Aziz Akhannouch, s’est montré très satisfait du bilan réalisé à ce jour. Chiffres à l’appui, il a avancé que la production halieutique est stable, soit 1,4 MT en 2018, 83% de l’objectif Halieutis de 2020, et 11,6 MMDH de valeur de la production en 2018, soit une croissance annuelle moyenne de 7,2% depuis 2010. Les chiffres à l’export sont également en progression. Ainsi, ils s’élèvent à 717 KT en 2017, +5% par rapport à 2010, pour 22 MMDH, en croissance de 7% par an depuis 2010. Cela correspond à 73% de l’objectif d’Halieutis à l’horizon 2020 en termes de valeur des exportations. Par rapport aux emplois crées, là aussi, la croissance est maintenue, avec 97 000 emplois directs crées en 2017 (industrie de valorisation et aquaculture), soit +6% par rapport à 2016. Cela correspond à 84% de l’objectif d’Halieutis fixé pour 2020.
Pour ce qui est du PIB, la croissance est aussi au rendez-vous, dit-on auprès du département de la Pêche Maritime. Ainsi, il s’élève à 17,1 MMDH en 2017, avec une croissance annuelle moyenne de 10% sur la période 2007-2017. A ce niveau, 78% des objectifs d’Halieutis sont atteints. Les investissements sont plus conséquents dans les unités de valorisation, atteignant 589 MDH en 2017 (+106% par rapport à 2016). La croissance annuelle en la matière est de 13% depuis 2010. Les investissements industriels privés ont totalisé un montant de 2,6 MMDH sur la période 2010-2017 dont 2,2 MMDH sont relatifs à de nouveaux agréments.
La liste des réalisations du Plan Halieutis est très respectable. Au-delà toutefois les performances jusque-là enregistrées par le secteur halieutique, elles demeurent insuffisantes eu égard au potentiel réellement mobilisable. Le constat vient du DEPF du ministère de l’Economie et des Finances. Dans son rapport publié en janvier dernier, le département note qu’une grande partie de la production halieutique est exportée à l’état frais sans aucune transformation (41% du volume total des exportations), bien que cette part s’inscrive dans une tendance baissière depuis quelques années. Cela représente indubitablement un important manque à gagner en termes de création d’emplois et de valeur ajoutée au niveau national et local.
En outre, les exportations du secteur demeurent caractérisées par une forte polarisation sur les marchés de l’Union Européenne, qui en absorbent 60%. L’ouverture sur de nouveaux marchés, dont notamment l’Afrique, conjuguée à une meilleure valorisation des produits, pourrait induire des effets positifs sur le développement du secteur halieutique national.
Dans un autre registre, l’optimisation des efforts consentis sur le plan des infrastructures et de la modernisation de l’outil de production rendrait nécessaire de remédier aux insuffisances relevées tout au long de la chaîne de valeur du secteur. Et outre la nécessité d’une meilleure maîtrise de la chaîne de froid, l’accent devra être mis sur l’adaptation des infrastructures de débarquement à la flotte à grand tonnage pour permettre le débarquement de la totalité des captures des ressources halieutiques au niveau des ports marocains.
Non moins important, le développement à terme d’une flotte industrielle nationale performante comparable à celle des pays étrangers devrait être envisagé. A cela s’ajoute la qualification de la main d’oeuvre et l’amélioration des compétences au service de l’innovation de nouveaux produits compétitifs avec des emballages attractifs et à forte valeur ajoutée, sachant qu’il existe une ferme volonté des opérateurs marocains d’aller dans ce sens eu égard à une demande mondiale accrue de produits à base de poissons.
Autrement dit, en matière de modernisation du secteur halieutique, on est toujours loin du compte apparemment. Le département de M. Aziz Akhannouch trouvera-t-il la force et les solutions à même d’assurer l’élan escompté d’un secteur miné depuis de longues années par l’informel, la rente et bien d’autres mauvaises habitude ?
Hassan Zaatit