Le Conseil trimestriel de Bank Al-Maghrib, BAM, s’est tenu mardi 26 septembre et, sans surprise, il a décidé du maintien du taux directeur à 2,25%.
La Banque Centrale marocaine a, depuis le début de la crise économique et financière, laquelle a touché progressivement toutes les économies à partir de 2007, utilisé cet outil de régulation monétaire pour accompagner le système bancaire d’une part et les opérateurs économiques de l’autre.
Une mission cruciale
Et ceci, dans l’objectif de favoriser ainsi le financement de l’économie, tout en sauvegardant la santé financière des banques.
C’est ainsi que le taux directeur en question, qui était de 3,50% en décembre 2008, a été réduit à 3,2% sur un plateau qui s’était étalé de mars 2009 à avril 2012, puis à 3% jusqu’en décembre 2014.
A compter de cette date, le taux directeur avait été ramené à 2,75% et, dans la foulée, à 2,50 % en janvier 2015 pour plus d’une année.
Et c’est depuis mars 2016 qu’il est à cette hauteur de 2,25%.
Pour faire face à la crise et à la montée du risque qu’elle a engendrée, BAM a dépassé son rôle classique de lutte contre l’inflation et s’est impliquée dans l’accompagnement de l’économie marocaine.
A l’instar de la BCE et de la FED, et comme de toutes les banques centrales, Bank Al-Maghrib a soutenu les banques commerciales par des avances de liquidités contre des collatéraux, (titres de dettes publiques et même privées), sur 7 jours et parfois plus, ( jusqu’à trois mois), afin que celles-ci continuent à assurer le financement de l’économie, mais, sans aller jusqu’à « acheter » leurs dettes et donc sans alourdir son bilan.
Toutefois, si « des évolutions récentes de la conjoncture économique et des projections macroéconomiques de la Banque pour les huit prochains trimestres », sont favorables et justifient la décision de son Conseil de maintenir le taux directeur à 2,25%, celui du taux d’inflation pose une interrogation.
Oui, mais
Car, ce qui peut interpeller c’est que le taux directeur actuel, censé couvrir l’inflation, s’avère, aujourd’hui trop élevé par rapport à cette dernière.
En effet, Bank Al-Maghrib a souligné que l’inflation a fortement ralenti, passant de 1,9% au cours des deux premiers mois de 2017 à 0,2% en moyenne sur les six mois suivants, sous l’effet principalement du repli des prix des produits alimentaires, par essence volatiles.
L’inflation devrait ressortir à 0,6% sur l’ensemble de l’année 2017, avant de s’accélérer à 1,3% en 2018.
Et même si la Banque centrale précise que « sa composante sous-jacente, qui retrace la tendance fondamentale des prix », devrait s’inscrire dans une tendance haussière, passant de 0,8% en 2016 à 1,4% en 2017 et à 1,6% en 2018, l’inflation reste toujours maîtrisée à moins de 2%.
On rappellera que les grandes banques centrales du monde ont soutenu leurs économies en n’hésitant pas à ramener à 0 % leurs taux directeurs.
De ce fait, logiquement, l’on se demande si Bank Al-Maghrib n’aurait pas pu profiter de cette aubaine pour réduire encore un peu son taux directeur afin de continuer à soutenir le financement de l’économie dans cette période transitoire.
Ceci, avant que la croissance attendue ne s’accompagne fatalement d’une augmentation de l’inflation. Celle-ci, qui trouverait sa source dans cette croissance, serait de surcroit tirée à la hausse par l’évolution des prix des matières premières (et notamment du pétrole, lequel s’est déjà apprécié de plus de 20%).
Une anticipation nécessaire
On sait que la santé financière du système bancaire est largement préservée du fait des outils de renforcement de ses fonds propres (obligations subordonnées, normales et perpétuelles).
De même, les banques ont bien surmonté l’aggravation du risque par la constitution de provisions solides, tout en continuant à dégager des résultats.
Ceux-ci ont été confortés, pour plusieurs d’entre elles, par la contribution de leurs filiales africaines dont l’apport aux résultats dépasse les 30%.
Et si le raffermissement prévu de la croissance mondiale en 2017, est tiré par une accélération du rythme de l’activité dans les pays avancés, soit 1,7% pour la Zone Euro et 2,1% aux Etats-Unis, au Maroc le taux de croissance prévu par la Banque Centrale est de 4,3% soit le triple de celui de 2016 !
Car, après un taux de 1,2% en 2016, la croissance globale devrait, selon les prévisions de Bank Al-Maghrib, s’accélérer à 4,3% en 2017 et revenir à 3,1% en 2018.
Dans cette situation exceptionnelle, ne faudrait-il pas que Bank Al-Maghrib continue à soutenir le financement de l’économie ?
Cette croissance marocaine, certes alimentée par la dernière bonne récolte agricole, tient également à une grande nouveauté, selon les mêmes donnés de BAM, à savoir que les activités non agricoles poursuivent leur reprise à un rythme de progression continue de 2,2% en 2016 à 2,9% en 2017 puis à 3,5% en 2018.
Que voilà une bonne nouvelle !!!
Afifa Dassouli