Lorsqu’on demande à un Marocain, ou une Marocaine, ce qu’il ou elle pense de la vie politique et des partis qui l’animent, la réponse est rarement positive…
Soit la question est éludée d’un revers de main, soit elle se limite à un « bof » largement teinté de lassitude.
Si la même démarche est menée pour la situation économique et sociale, alors les réponses sont plus nettes, accompagnées de grimaces, car très rares sont ceux qui trouvent des motifs de satisfaction tirés de l’actuelle conjoncture économique et ses prolongements sociaux ou sociétaux.
Bien évidemment, encore faut-il avoir la chance de s’adresser à des citoyens et citoyennes conscients, avertis et intéressés par la chose publique.
Et s’il fallait faire de ces interrogations un sondage en bonne et due forme, avec un échantillon représentatif, on peut gager, sans trop grand risque d’erreur, que la majorité irait vers des réponses globalement négatives.
C’est donc qu’en fait, une grande part de l’opinion publique exprime un profond désintérêt pour les affaires de la Nation et du pays et, en toute franchise, on ne saurait les blâmer pour cela parce que la responsabilité de ce sentiment généralisé de marasme ne leur incombe nullement…
De ces constats, on en vient à tirer une conclusion qui n’est guère réjouissante, c’est que le peuple marocain ne dispose pas aujourd’hui de leviers puissants qui pourraient assurer sa cohésion et son unité hormis bien évidemment deux sacralités aussi fortes que pérennes et partagées.
La première est la religion et l’appartenance à la communauté islamique. Les Marocains sont, dans leur très grande majorité, profondément pieux et pratiquants et cela est reconnu de tous.
L’observance des rites, l’attachement aux valeurs portées par l’Islam sont incontestables et parfois, dans certaines situations bien précises, on en vient même à penser que l’ostentatoire accompagne ces sentiments de religiosité…
La seconde sacralité, aussi imprégnante de la personnalité des Marocains, est l’attachement à la Monarchie et au Roi Mohammed VI.
La personne du Roi est centrale dans le cœur et l’esprit de nos concitoyens et l’amour qu’ils portent au Souverain est, assurément, le socle inébranlable et fondateur de l’unité nationale, de la cohésion sociale, constitutive au premier chef de l’identité de tous les Marocains et Marocaines.
Mais, en dehors de ces deux évidences, force est de reconnaître que ce qui nous divise est plus fort que ce qui nous unit…
Dans la quête donc d’un plus petit dénominateur commun, il resterait le football et le soutien apporté aux Lions de l’Atlas.
L’engouement pour notre onze national est incontestable, puissant, fédérateur, comme on peut le constater à l’occasion de la dix-neuvième édition de la Coupe Africaine des Nations en Égypte.
Mais, cette ferveur et ce patriotisme « footeux » sont très volatiles, directement corrélés aux prestations de l’équipe nationale. Car une défaite ou l’élimination des compétitions à un stade précoce feraient retomber à zéro la mobilisation populaire pour nos Lions…
Ces constats impliquent une reconnaissance implicite, celle de la désaffection qui caractérise la plupart de nos concitoyens envers les grandes causes et grandes questions qui interpellent notre société, notre pays.
Mais, pour autant, cela ne semble pas concerner la classe politique et ses différentes déclinaisons partisanes et, encore moins, le gouvernement !
Rien d ‘ailleurs n’est fait ou dit pour rassembler, motiver, mobiliser et chacun s’enfonce, « chez ces gens-là », dans la médiocrité quotidienne et la gestion, minimale sans doute, des affaires courantes !
Peu importe si l’opinion publique perd ses repères lorsqu’il s’agit de déterminer des langues d’enseignement qui seraient associées à la langue arabe.
Peu leur chaut si les étudiants en médecine battent le pavé, tandis que les familles se scindent et s’écharpent pour une question d’admissibilité à quelques concours.
Aucun signal, ni réaction alors que les interpellations et démantèlements de cellules terroristes se multiplient avec des annonces, sinon quotidiennes, du moins hebdomadaires.
La lutte contre l’hydre terroriste serait-elle du seul ressort du très compétent BCIJ et des autres services qui travaillent en étroite collaboration avec les hommes de Hammouchi ?
La dimension sécuritaire, fort heureusement parfaitement assurée, ne devrait-elle pas être accompagnée d’une mobilisation pour la conquête des esprits et le rejet des idées pernicieuses qui sont, de surcroît, quasiment dispensées au su et au vu de tous, dans des écoles coraniques bien connues, dans des partis politiques, au sein de mouvances tolérées ?
Voilà des questions et des sujets qui requièrent une réaction salutaire et rapide, car aujourd’hui, à côté des problèmes sociaux et des légitimes revendications sociales, on a le sentiment d’une totale absence des citoyens, abandonnés à eux-mêmes, à leur triste sort…
Fahd YATA