À l’ouverture des travaux du Conseil de Gouvernement, la semaine dernière, M. Akhannouch a mis l’accent sur le renforcement de la dynamique d’investissement et la création d’emplois, pour une croissance économique durable.
Certes, le chef du gouvernement parle de l’investissement global du pays, qui fait l’objet de la nouvelle politique du gouvernement selon laquelle l’investissement privé doit monter en puissance pour alléger l’investissement public. Mais quid de la situation actuelle de l’investissement global au Maroc, pour mesurer le chemin à parcourir et la tâche du gouvernement à laquelle M. Akhanouch fait référence ?
Le premier constat porte sur les chiffres des dépenses d’investissements de l’État, qui dans le bulletin mensuel des statistiques des finances publiques de juillet 2024 se situent à 59 milliards de dirhams et continuent à croître d’année en année, en l’occurrence de 11,3 % passant de 53,2 MMDH en juillet 2023 à 59,2 MMDH en juillet 2024.
Pour ce qui concerne l’investissement total au Maroc, les seuls chiffres dont on dispose sont ceux du Haut-Commissariat au Plan, HCP selon lesquels, en 2023 ces derniers se montaient à 371,9 MMDH avec une augmentation de +4,8% par rapport à l’année 2022 compte tenu d’un taux de croissance économique annuel moyen de +2,5% entre 2019 et 2023. Avec la précision que ces 371 milliards de dirhams d’investissement se distribuent principalement entre le secteur du bâtiment et travaux publics avec 52,4% et de l’industrie avec 34,1%.
Quant aux investissements privés, seuls les montants des IDE, investissements extérieurs, sont précis. En 2024, ils représentent 34,6% du total des investissements nationaux soit 1/3.
En 2023, les recettes d’IDE ont atteint 181 milliards de dirhams en croissance de 55% sur la période 2000-2023, confirmant ainsi l’attractivité du Maroc pour les investisseurs internationaux depuis le plan d’accélération industriel qui les a placés au centre de sa stratégie et la politique de dynamisation de l’AMDIE depuis 2019.
Aussi, pour les investissements privés dans leur ensemble, l’évaluation statistique n’est pas exhaustive. Malgré les efforts faits par le HCP, seuls les investissements qui bénéficient d’accompagnement de l’État ou de mesures fiscales sont cernables. Ceux qui n’y sont pas éligibles restent sous le radar et sont difficiles à valoriser.
C’est d’ailleurs une problématique que le nouveau ministère de l’investissement prend en charge par la création d’un l’observatoire de l’investissement qui devrait être bientôt opérationnel, avec l’objectif de faire un recensement plus large et plus exact, des investissements engagés et réalisés au Maroc, grâce à des conventions signées avec le secteur bancaire, la DGI, les douanes, l’OMPIC etc.
Cette initiative permettra en conséquence de mieux appréhender au niveau national la contribution du privé en matière d’investissement et de relativiser la part importante des investissements publics.
Par ailleurs, en ce qui concerne l’investissement privé au Maroc, il faut savoir qu’il est au centre de la politique de l’État en matière d’amélioration de l’environnement économique et donc du climat des affaires.
Le nouveau modèle de développement en a conçu les contours dont la concrétisation est en cours. Un de ces aspects n’est autre que la grande réforme fiscale en cours qui se traduit par une baisse de l’IS de 35% à 20% pour les bénéfices des entreprises inférieurs à un million de dirhams, mesure qui concerne la majorité des entreprises marocaine, sachant que seules les grandes sociétés continueront avec le taux d’IS de 35%.
L’unification de la TVA à 2 taux, 10 et 20%, est un autre exemple d’assainissement économique. Par ailleurs, toujours pour inciter les investisseurs privés marocains deux politiques d’importance sont à prendre en compte ; celle de l’industrie pour leur accompagnement et celle du financement de l’investissement à travers le Fonds Mohamed VI pour l’investissement et la Charte de l’investissement.
Car, une nouvelle politique industrielle qui met l’accent sur la souveraineté économique du pays comme moyen et finalité, est en préparation. Elle devra prioriser la satisfaction des besoins du pays, tout en assurant sa résilience en cas de crise en référence à celle causée par la covid 19.
À cet effet, une banque de projets a déjà été constituée par le ministère de l’industrie. Ces projets devraient se traduire par le remplacement de certaines importations et créer 400 000 emplois directs. Le montant des investissements engagés par ces projets devrait atteindre 110 milliards de dirhams qui généreront 92 MMDH de substitution des importations et 85 MMdhs d’exportations nouvelles, sachant que 86% des capitaux engagés seront marocains.
L’État offre aux investisseurs un accompagnement à tous les niveaux de réalisation et ces projets relèvent de tous les secteurs d’activité : agro-alimentaire, métallurgique, chimie et parachimie, textile métallurgie, matériaux de constructions, électronique économie circulaire, cuir énergies renouvelables et industrie navale, afin de créer un écosystème industriel. Un des exemples ciblés par la stratégie de la souveraineté économique porte sur la production de semi-conducteurs pour répondre aux besoins du pays et exporter tout en attirant les investisseurs étrangers qui sont nombreux à les rechercher du fait de leur pénurie mondiale.
Enfin, pour acter ces avancées, le Maroc est signataire de la déclaration de l’OCDE dite PCN, principes directeurs pour la conduite responsable des entreprises depuis 2009. Et s’inscrit dans les benchmarks internationaux en signant des accords internationaux de protection des investissements.
Toutefois, la mesure du climat des affaires au Maroc, (doing business) reste peu appréhendée.
Même si Bank Al Maghrib publie chaque trimestre les résultats d’une enquête de conjoncture dont la dernière du second trimestre 2024 annonce : « Au deuxième trimestre de 2024, le climat général des affaires dans l’industrie aurait été « normal » selon 67% des entreprises et « défavorable » selon 19% d’entre elles, qu’elle détaille par secteurs d’activités, ces indications restent approximatives.
En définitive, certes l’investissement est un outil de croissance économique important, mais la conjoncture économique régionale le conditionne favorablement ou pas.
Or, la santé économique des pays européens partenaires du Maroc, laisse à désirer, les budgets publics sont en voie de restriction, annonçant une austérité. Malgré la baisse de l’inflation à 2%, la croissance traîne à reprendre de façon globale. Les investisseurs privés attendent la reprise pour se rassurer sur l’avenir car la confiance est le moteur de l’investissement…
Afifa Dassouli
Trouvez les mots de cet article sur notre grille de mots croisés générée en I.A.
Mots croisés du jour
Avez-vous été attentif durant la lecture de cet article? Prouvez-le en complétant la grille de mots croisés généré à partir de ce dernier.