Crédit photo : Anas Zaidaoui/LNT
Lors des Impériales Week 2025, un panel consacré au Brand Thinking a réuni plusieurs experts du domaine pour discuter de l’importance de la construction des marques sur le long terme. Les intervenants Loïk Lherbier, Nada Aboumejd, Laurent Vincenti et Mehdi El Morjani ont partagé leurs perspectives sur la manière dont les entreprises peuvent aligner leurs actions marketing avec une vision cohérente et durable de leur marque.
Brand Thinking : une approche centrée sur la marque
L’une des principales idées abordées lors du débat a été la nécessité d’articuler le marketing autour de la marque, plutôt que l’inverse. Traditionnellement, le marketing est souvent perçu comme une discipline axée sur des actions à court terme, visant des résultats immédiats. En revanche, la construction d’une marque exige une vision à long terme, nécessitant du temps pour asseoir son identité et sa notoriété.
Les intervenants ont insisté sur le fait que le Brand Thinking permet de réconcilier ces deux logiques en inversant le rapport entre marketing et marque. Une marque forte doit d’abord définir une vision claire, un positionnement et une identité distincte. Ensuite, toutes les actions marketing, y compris celles axées sur des résultats à court terme, doivent s’inscrire dans cette cohérence globale.
Nada Aboumejd a illustré cette tension entre court et long terme en comparant les marketeurs à des enfants face à un gâteau et des légumes. Le gâteau symbolise la gratification immédiate, avec des résultats rapides et mesurables en termes de ventes ou de retour sur investissement. Les légumes, quant à eux, représentent la construction d’une marque sur le long terme, une démarche parfois moins spectaculaire mais essentielle à sa croissance et sa pérennité. Elle a cité l’exemple de Mastercard, une marque centenaire dont la force réside dans la continuité de son message et de son identité visuelle. Avec sa signature emblématique « Priceless », inchangée depuis plus de 25 ans, Mastercard a construit une image forte, immédiatement reconnaissable, au-delà de la simple vente de cartes bancaires.
L’importance d’une marque forte
Laurent Vincenti a mis en lumière un enjeu majeur du Brand Thinking à l’ère numérique : la saturation des messages publicitaires. Avec la multiplication des canaux de communication et l’essor de l’intelligence artificielle, les marques doivent faire face à une concurrence accrue pour capter l’attention des consommateurs. Aujourd’hui, l’espace de communication est de plus en plus restreint, et les marques doivent être capables de transmettre leur message en quelques secondes, voire en un simple logo. Selon lui, les marques qui parviennent à s’imposer durablement sont celles qui développent une identité forte, cohérente et immédiatement identifiable, à travers un univers visuel, une tonalité de communication et des valeurs clairement établies.
Les participants ont également abordé la question de l’engagement des marques sur des sujets sociétaux. Dans un contexte où les consommateurs sont de plus en plus attentifs à l’authenticité des entreprises, le Brand Thinking doit éviter le « purpose washing », c’est-à-dire des engagements de façade, perçus comme opportunistes. Pour qu’une marque reste crédible, son discours et ses actions doivent être alignés avec sa mission et ses valeurs profondes.
L’intelligence artificielle a également été évoquée comme un levier de transformation pour les marques. Mehdi El Morjani a rappelé que l’IA est un outil puissant pour analyser la data et personnaliser les interactions avec les consommateurs, mais qu’elle ne doit pas remplacer la créativité humaine.
L’IA peut être un allié précieux dans le marketing, notamment en facilitant la segmentation des audiences, l’adaptation des messages et l’optimisation des campagnes publicitaires. Toutefois, les intervenants ont souligné que l’humain reste le garant du sens et de l’authenticité d’une marque. Laurent Vincenti a insisté sur le fait que l’IA doit être considérée comme un compagnon de travail, capable d’accélérer certaines tâches sans pour autant remplacer l’intuition et la vision stratégique des créatifs et des responsables marketing.
Un changement de paradigme dans la gestion des marques
L’un des points clés du panel a été la nécessité d’un changement de paradigme dans la manière dont les entreprises perçoivent leurs marques. Historiquement, la marque était considérée comme un simple outil du marketing, alors qu’aujourd’hui, c’est le marketing qui doit être pensé au service de la marque. Cette approche implique que toutes les décisions stratégiques et opérationnelles – qu’il s’agisse des ressources humaines, du développement produit ou des partenariats – doivent être alignées avec les valeurs et l’identité de la marque.
Mehdi El Morjani a illustré ce propos en citant l’exemple de Balenciaga, une marque qui a su se repositionner après une crise de réputation en 2022. Plutôt que de renier son identité, Balenciaga a assumé un positionnement radical et clivant, renforçant ainsi son attrait auprès d’une communauté de consommateurs engagés.
Enfin, les intervenants ont partagé leurs conseils aux marques souhaitant anticiper les tendances à venir en matière de branding. Pour Laurent Vincenti, une marque ne doit pas chercher à plaire à tout le monde, mais plutôt cultiver une identité forte et assumée. Mehdi El Morjani a insisté sur l’importance de l’adaptabilité, rappelant que les consommateurs, en particulier les jeunes générations, attendent des marques qu’elles les impliquent activement dans leur communication et leur développement.
En conclusion, les experts du panel ont souligné que la clé du succès d’une marque repose sur son authenticité, sa cohérence et sa capacité à créer un lien fort avec ses consommateurs. À l’heure où l’attention des consommateurs est de plus en plus fragmentée, les marques doivent se distinguer non seulement par leurs produits ou services, mais aussi par leur capacité à raconter une histoire, à incarner des valeurs et à proposer une expérience unique.
LNT