Les récentes signatures de plusieurs accords entre le Maroc et la France, dont la valeur totale est estimée par l’Élysée à plus de 10 milliards d’euros, marquent une étape stratégique dans la coopération économique entre les deux nations, notamment dans les domaines de l’investissement, de l’énergie renouvelable et de la logistique portuaire. Ces partenariats, impliquant des fonds d’investissement, des entreprises leaders et des agences de développement, témoignent d’un engagement mutuel à stimuler des projets à fort impact socio-économique au Maroc. En effet, le Maroc offre désormais un cadre favorable à la coopération économique à travers des véhicules tels que la nouvelle Charte d’investissement ou encore le Fonds FM6I, pour accompagner le déploiement des investissements privés dans le Royaume, d’autant que les accords signés portent sur des secteurs à haute portée stratégique pour le Maroc mais aussi la France. Le décryptage des principaux accords signés permet d’en révéler les ambitions et les moyens engagés pour leur réussite.
Création d’un accélérateur d’investissements Maroc-France
Le premier accord, un protocole signé entre le Fonds Mohammed VI pour l’investissement et plusieurs institutions françaises (Agence Française de Développement (AFD), STOA et Bpifrance), vise la création d’un accélérateur d’investissements, doté de près de 3 milliards de dirhams (environ 300 millions d’euros) de capital. Cet accord, signé par Mohamed Benchaaboun, Rémy Rioux, Marie-Laure Mazaud et Isabelle Bébéar, prévoit la mise en place d’une joint-venture à parts égales pour financer des infrastructures durables.
Cette entité franco-marocaine aura pour mission d’injecter des capitaux dans divers secteurs, dont les infrastructures, et favorisera un développement inclusif, couvrant notamment les provinces du sud marocain. Cette initiative cadre avec la vision du Maroc de dynamiser son tissu économique et social à travers des investissements dans des projets d’infrastructures durables.
Développement de la filière de l’hydrogène vert au Maroc
Le deuxième accord porte sur la mise en œuvre d’une offre marocaine pour le développement de la filière de l’hydrogène vert. Signé par des hauts responsables marocains, dont Abdelouafi Laftit, Nadia Fettah et Leila Benali, ainsi que des représentants du groupe TotalEnergies et Total Eren, cet accord ambitionne de transformer le Maroc en un acteur majeur de l’hydrogène vert.
Ce partenariat stipule que l’État marocain mettra à disposition des terrains dédiés pour des installations de production d’hydrogène vert. En contrepartie, les investisseurs doivent respecter des engagements précis concernant le développement durable et la performance énergétique. Cette collaboration est significative dans la transition énergétique mondiale, le Maroc se positionnant comme un pionnier africain dans l’hydrogène vert.
Partenariat stratégique sur la transition et la connectivité énergétique
Dans le domaine de l’énergie, la ministre marocaine Leila Benali et la ministre française Olga Givernet ont signé un partenariat stratégique portant sur la coopération énergétique, la connectivité et la transition vers des énergies plus propres. Cet accord se concentre sur la planification, la certification et la régulation des politiques énergétiques des deux pays, avec un accent particulier sur la production et le transport de l’hydrogène bas carbone et le stockage d’énergie.
Ce partenariat marque une volonté d’harmoniser les approches entre les deux pays pour relever les défis énergétiques et climatiques globaux. Il s’inscrit également dans la diversification des sources énergétiques du Maroc, un pays riche en ressources solaires et éoliennes.
Appui à la transition verte des ports et à l’économie bleue
Un accord a également été signé entre l’Agence nationale des ports du Maroc et l’AFD, représentés par Nizar Baraka et Rémy Rioux. Ce protocole met en avant la nécessité d’adapter les infrastructures portuaires aux enjeux climatiques et environnementaux. Le programme, soutenu par un prêt de 100 millions d’euros de l’AFD, s’articule autour de quatre axes principaux : la transition verte, la résilience climatique, l’économie bleue et l’innovation technologique.
Cet accord témoigne de l’importance croissante de l’économie bleue dans le développement économique marocain, particulièrement dans les zones côtières comme Dakhla et Laâyoune, et souligne l’engagement des deux pays envers une économie plus durable et résiliente.
Décarbonation et développement agricole avec le Groupe OCP
Le groupe OCP, un des leaders mondiaux dans le secteur des phosphates, s’engage également dans une stratégie de décarbonation. Cet accord signé avec l’AFD et Bpifrance prévoit un soutien financier de 350 millions d’euros. Cet investissement permettra au groupe OCP de renforcer sa chaîne de valeur agricole en Afrique, en contribuant au développement de la plateforme « Agrifinance » et à des initiatives de formation et de recherche en sécurité alimentaire.
Ce partenariat est en ligne avec les objectifs du Maroc et de l’OCP de réduire les émissions de carbone et d’assurer une production agricole durable. La France y voit également une opportunité de renforcer ses liens économiques en Afrique.
Développement d’un terminal à conteneurs à Nador West Med
Enfin, l’accord entre le groupe CMA CGM et Tanger Med, représenté par Fouad Brini et Rodolphe Saadé, porte sur le développement d’un terminal à conteneurs à Nador West Med. Ce projet ambitieux, avec un investissement de 258 millions d’euros, permettra de renforcer le rôle stratégique du Maroc en tant que hub logistique dans la région. Avec un engagement de 1,2 million de conteneurs, ce terminal viendra également renforcer les capacités portuaires du pays, notamment dans la région de Nador.
En outre, cet accord s’accompagne d’un engagement à soutenir d’autres projets portuaires marocains, soulignant l’importance de la logistique et de la connectivité dans la stratégie de développement économique du Maroc.
Ces accords, couvrant des secteurs stratégiques comme l’énergie, la logistique et les infrastructures durables, illustrent l’approfondissement de la coopération franco-marocaine. Ils témoignent de la volonté des deux pays de répondre aux enjeux du développement durable, de la transition énergétique et de la connectivité régionale. Ces initiatives visent à renforcer non seulement les relations économiques entre le Maroc et la France, mais à positionner également le Maroc comme un acteur clé dans les domaines de l’investissement durable, de l’énergie verte et de la logistique en Afrique.
Selim Benabdelkhalek