La conceptualisation de la performance d’une entreprise s’appuie essentiellement sur le choix des décideurs. La prise de décision représente un élément clé du succès organisationnel, et devient de plus en plus un défi pour les grandes structures comme les multinationales, les institutions financières et les complexes industriels. Ces entités, confrontées à une concurrence mondialisée et à des marchés en constante évolution, doivent adopter des approches décisionnelles qui intègrent non seulement des analyses économiques et stratégiques, mais aussi des considérations psychologiques et comportementales.
Tout d’abord, la prise de décision peut être définie comme le fait de choisir objectivement parmi plusieurs options d’action lors de la résolution d’un problème, en optant pour la solution la plus adaptée. Cependant, cette tâche mentale devient de plus en plus complexe en raison de la difficulté croissante des décisions managériales.
Avant de se pencher sur la spécificité de la prise de décision chez les managers, examinons d’emblée comment le cerveau prend une décision. Le processus de la prise de décision repose sur deux éléments principaux : l’affect et la cognition. Ces derniers sont inséparables ; même dans les décisions les plus rationnels, l’aspect émotionnel est toujours présent, et de plus dominant !
En effet, il s’agit de deux système de pensée. Ces systèmes décrivent deux modes distincts de pensée et de prise de décision. Le système 1 est le mode de pensée intuitif, plus exactement c’est la pensée responsable de décisions impulsives ou instinctives, ainsi que des jugements rapides, qui sont une sorte d’automatisme mentale rapide, émotif, inconscient, et subjectif qui ne nécessite pas souvent une réflexion. Le système 2 de pensée désigne la pensée logique, consciente, réfléchie et qui demande un peu plus de temps, donc plus d’effort et de concentration. Ce dernier système est utilisé pour des tâches complexes ou décisionnelles.
Dans la prise de décision en général, les deux systèmes interagissent. Le Système 1 fourni des jugements initiaux, tandis que le Système 2 intervient pour les vérifier ou les corriger. Cependant, comme le Système 1 est automatique et rapide, il influence souvent nos décisions lorsque nous essayons d’être rationnels, même dans les décisions les plus calculées.
Le processus de prise de décision implique plusieurs régions du cerveau, notamment les lobes frontaux, qui jouent un rôle clé dans cette fonction. Les études ont montré que différentes parties des lobes frontaux sont spécialisées dans des aspects spécifiques de la prise de décision. Les lobes frontaux sont responsables du contrôle de nos comportements et interviennent essentiellement dans la planification, la prise de décisions, le raisonnement, le langage et le mouvement.
L’image ci-avant montre un IRM d’un cerveau humain avec les zones liées à la prise de décision marquées en bleu et celles liées au contrôle comportemental en rouge. À gauche, on voit un cerveau entier vu de face où ces régions colorées sont situées dans les lobes frontaux. L’image de droite montre le même cerveau mais avec une partie des lobes frontaux retirée pour exposer l’intérieur et illustrer où les lésions se trouvent.
Une lésion dans certaines zones du cerveau peut affecter de manière significative la prise de décision, car chaque région joue un rôle différent ; une lésion dans une zone critique peut entraîner un handicap permanent dans la capacité de prendre des décisions, tandis que d’autres zones pourraient permettre une certaine compensation par le reste du cerveau.
Selon les neurosciences, le processus de prise de décision implique une interaction complexe entre les systèmes cognitifs et émotionnels du cerveau. Cela confirme les théories psychologiques, allant dans le même angle de vue et indiquant ainsi une convergence de perspectives.
Pour répondre de manière fiable sur la question de la particularité de la prise de décision managériale, il est crucial de comprendre que les biais bien établis et les jugements intuitifs peuvent jouer un rôle significatif dans les décisions stratégiques.
Cela suggère que comprendre les fondements psychologiques de la prise de décision pourrait améliorer les pratiques de gestion stratégique (Sinnaih. T et al ; 2023).
En étant conscients de ces biais, les managers pourraient développer des stratégies adaptées et plus conscientes qui mettent en valeur l’aspect émotionnel, à travers le développement de l’automatisme mental. Cela influe sur le développement des jugements intuitifs sur le long terme, qui jouent un rôle crucial dans les situations nécessitant une prise de décision rapide. Comprendre les fondements psychologiques de l’intuition permet aux managers de mieux utiliser leur expérience et leur savoir implicite, affinant ainsi leur capacité à faire des choix stratégiques sous pression, et conduisant à des décisions plus objectives et équilibrées.
Les leaders pourraient développer une plus grande flexibilité cognitive. Cela leur permettrait d’adapter leur style de décision en fonction du contexte, en oscillant entre pensée analytique et intuition selon les besoins de la situation.
Les biais comme l’excès de confiance pourraient conduire les décideurs à surévaluer leur propre jugement ou à favoriser des informations qui confirment leurs croyances préexistantes. Pour cette raison, l’intelligence émotionnelle et l’équilibre dans l’estime de soi, ainsi que la confiance en leurs propres jugements, sont des éléments clés.
Cependant, le rôle du stress positif et d’autres facteurs motivants dans la prise de décision éthique, mettent en lumière comment les décideurs peuvent être neuro-psychologiquement disposés à éviter les risques par peur et adopter des comportements prudents.
Le processus de prise de décision, en particulier chez les managers, est influencé par un mélange de cognition et d’affect, illustrant l’interaction entre les réponses émotionnelles et rationnelles. Cette dynamique est fondamentalement liée au fonctionnement des systèmes neurobiologiques, notamment les lobes frontaux du cerveau.
Pour approfondir la prise de décision managériale, une compréhension équilibrée des éléments rationnels et émotionnels est indispensable. Cette synthèse permet aux dirigeants de répondre efficacement aux défis complexes et changeants des environnements d’affaires contemporains.
La capacité de fusionner l’analyse stratégique et la sensibilité avec les dynamiques humaines est essentielle pour transformer les décisions en succès durable. Les détails sur la manière d’atteindre cet équilibre seront explorés dans notre prochain article, ouvrant la voie à des pratiques décisionnelles renouvelées et adaptatives.