Le Bulletin mensuel de statistiques des finances publiques, publié par la TGR pour le mois de mars 2024, marque un tournant en matière de recettes fiscales et d’équilibre des deux soldes primaire et budgétaire !
En effet, les recettes ordinaires ont cru de 11,7% quand les dépenses ordinaires ont baissé de 4,2%, dégageant ainsi un solde ordinaire positif de 19 milliards de dirhams.
C’est la fiscalité domestique qui y a contribué fortement, avec des recettes nettes de 57,5 MMDH à fin mars 2024 en hausse de 15%, soit 7,5 MMDH supplémentaires.
Tout particulièrement, c’est l’IS, impôt sur les Sociétés, qui en récoltant 25.785 MDH en hausse de 17,4% en est la vedette ! Avec la précision importante qu’en mars 2023, cette importante ressource fiscale avait diminué de 0,5%.
L’autre exploit réalisé par les recettes ordinaires de mars est le fruit de la TVA, Taxe sur la valeur ajoutée qui se sont établies à 8.837 MDH contre 6.376 MDH à fin mars 2023, soit une hausse de 38,6%.
Les recettes de l’IR, Impôt sur le revenu ne sont pas en reste avec une appréciation de de 3,4% à 14,5 MMDHS.
Ou encore, les recettes non fiscales qui sont passées à 10.657 MDH en augmentation de 35,2%.
Ainsi, de nouveaux constats s’imposent au niveau de la structure des recettes ordinaires de mars 2024. D’une part, l’IS constitue la première source de recettes du budget général de l’État ; et d’autre part le taux de couverture des dépenses ordinaires par les recettes ordinaires a atteint 125,3%, contre 107,4% un an auparavant.
En conséquence, les dépenses émises au titre du budget général de l’État à la fin du premier trimestre de l’année en cours, ont été financées par des recettes ordinaires à hauteur de 96 MMdhs, faisant que le recours à l’emprunt pour couvrir le besoins de recettes manquant du mois de mars, s’est limité à 5 MMdhs.
Pour expliquer de telles réalisations de mars 2024, sachant que ce mois se caractérise par la collecte de l’IS sur les résultats des sociétés, nous nous sommes rapprochés de la Direction Générale des Impôts qui nous a apportés les explications suivantes.
La DGI, première administration publique de par son rôle de collecte des impôts et de fait en charge du financement des dépenses publiques, dont résultent le déficit et l’endettement publics, commence à récolter les résultats de sa politique de proximité avec les contribuables dont notamment les opérateurs économiques, qui doivent considérer l’impôt comme partie intégrante de leur activité.
Le rôle essentiel de la DGI consiste en la collecte des recettes fiscales, qui doivent relever de la croissance économique et non pas sur du contrôle fiscal.
Ainsi, l’administration fiscale œuvre pour accompagner la croissance économique par la baisse de la pression fiscale pour sécuriser fiscalement l’acte d’investir.
De même que, si elle doit agir au titre de son droit de contrôle de la façon la plus stricte et la plus ferme, elle doit également s’imposer la même rigueur quant aux droits du contribuable, notamment au niveau des services qu’elle lui rend, comme par exemple le remboursement de TVA qui ne se faisait pas dans les temps. De son exemplarité dépend sa crédibilité.
D’ailleurs, la vision stratégique déclinée en décembre dernier par la DGI s’appuie sur six piliers dont le premier consiste en la mobilisation du plein potentiel fiscal, puis sa relation avec ses partenaires, dont les contribuables et les opérateurs économiques en particulier.
Pour œuvrer pour une meilleure expérience du contribuable avec l’administration, cette proximité avec les opérateurs économiques se concrétise par une nouvelle politique dite de conseil et d’accompagnement fiscal.
A ce titre, la loi de finances a introduit une démarche, celle du droit à l’erreur, qui permet à l’entreprise d’interroger l’administration sur ses déclarations fiscales pour les produire dans les meilleures conditions. Pour ce faire elle les soumet à la DGI pour correction avant admission et avant tout contrôle et en toute transparence. Une façon pour l’administration fiscale de dévoiler ses cartes aux entreprises, leur évitant des surprises et d’évaluer leur risque fiscal.
Alors que cette proposition administrative vient de rentrer en vigueur, elle a déjà connue une réactivité et un succès très important. Dès le premier mois, janvier 2024, des demandes dans ce sens ont afflué à la DGI, avec plus de 500 demandes de collaboration directe activées avec l’administration fiscale, qui vu leur succès qualitatif ne cessent de se multiplier.
Toutefois cette prédisposition positive de l’administration à l’égard des opérateurs économiques n’explique pas encore l’explosion des recettes de la TVA et de l’IS du mois de mars 2024 !
En effet, il faut voir du côté de l’application de la réforme fiscale qui, entrant progressivement en application dès 2023, a introduit entre autre une baisse spectaculaire de l’IS dont le taux doit passer progressivement de 31% à 20% en 2026, sur la base des recommandations des institutions internationales, le FMI et l’OCDE en particulier.
Alors que son taux varie en fonction du montant du résultat des entreprises, base de son prélèvement, on peut d’ores et déjà faire le constat que 99,99% des sociétés vont être soumises au taux de 20% d’IS en 2026, sachant que celui-ci est déjà à 25% pour 2024. Cette baisse du taux de l’IS à 20% constitue une incitation à la transparence des entreprises.
Cette mesure de baisse importante de l’IS n’est pas isolée, elle s’inscrit dans le cadre de la grande réforme fiscale dont l’objectif repose sur l’élargissement de l’assiette fiscale. D’ailleurs, une des explications de l’augmentation des recettes de l’IS dont il est question, provient de la contribution de sociétés qui étaient « des déficitaires chroniques ».
Du côté de la TVA dont l’unification des taux, établie à 10 % et 20%, a été introduite également en 2024 et s’étale jusqu’en 2026, la collecte a été encore plus explosive à fin mars dernier, de 38% selon les statistiques de la TGR.
Encore une implication positive de la réforme sur l’élargissement de l’assiette fiscale, sachant que cette croissance de la TVA en mars provient de sociétés qui ne payaient pas de TVA auparavant.
Et, ces recettes de TVA ont surperformé la croissance du chiffre d’affaires des entreprises qui a cru au premier trimestre de cette année de 11,5%, et celle du PIB limitée à moins de 3%.
En conclusion, la réforme fiscale, lancée en 2024 et qui se continue en 2025 et 2026, montre à travers les statistiques des recettes fiscales à fin mars 2024, ses premiers effets.
Les deux impôts qui ont fait l’objet de réformes, ont cru de façon spectaculaire par rapport à l’année précédente, à un rythme 3 à 4 fois supérieure à leur taux moyen de croissance.
L’autre très bonne nouvelle fiscale portant sur le remboursement de la TVA qui a fait l’objet d’un assainissement total en mars 2024. Cette régularisation a coûté pas moins de 20 milliards de dirhams à l’État, effaçant ainsi les retards qui dépassaient plus de deux ans pour certains opérateurs. Le délai de recouvrement de la TVA récupérable revient ainsi aux 3 mois réglementaires. Une très bonne nouvelle pour les PME !
Afifa Dassouli
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