
En ce début d’année 2020, les analystes de la place de Casablanca dressent des bilans sur l’année 2019 qui portent sur les différents compartiments du marché des capitaux.
A ce titre, BMCE Capital vient de publier dans sa dernière note « Actu des Marchés », un très intéressant bilan 2019 sur celui du Marché Monétaire.
Un marché affecté par le manque de liquidités
En effet, tout en relevant qu’une stabilité des taux monétaires, autour de 2,25% a été maintenue malgré la détérioration de la liquidité bancaire, leur analyse explique les raisons de cette résultante.
En effet, en 2019, le déficit de liquidité bancaire s’est davantage creusé du fait d’un besoin accru de liquidité des banques, lequel s’est établi à une moyenne de 76 Milliards de Dirhams, contre 61 MM Dh en 2018, soit un assèchement de près de 15 MM Dh, principalement créé par une hausse de la monnaie fiduciaire.
De fait, cet important manque de liquidités sur le marché interbancaire, aurait pu naturellement augmenter les taux sur un marché régi par la loi de l’offre et de la demande.
Sauf que la Banque Centrale a encore joué de ses outils pour limiter la hausse des taux monétaires, en injectant un montant de liquidités équivalent au déficit de 77 MM Dh, pour le combler tout simplement.
Puis, à un moment de l’année écoulée, Bank Al-Maghrib a également décidé de réduire le taux de la réserve monétaire de 4% à 2%, injectant ainsi près de 11 MM Dh additionnels sur le marché monétaire.
En conséquence, en 2019, les taux interbancaires se sont maintenus à des niveaux proches du Taux Directeur de 2,25%, à 2,28% en moyenne, induisant une performance capitalisée de 2,36%. De mêmes que les taux REPO se sont stabilisés à un niveau moyen de 2,20% soit une performance capitalisée de 2,25%.
L’obligataire en meilleure forme
Le bilan dressé par ces mêmes analystes, pour le marché obligataire en 2019, établit une performance élevée de +6,23% de la valeur des obligations, traduisant ainsi le principe des vases communiquant avec une baisse prononcée des taux.
Car, courant 2019, les niveaux de taux ont connu une baisse importante de -40 points de base en moyenne sur l’ensemble de la courbe, particulièrement marquée sur le segment moyen et long terme à -60 pbs en moyenne.

Et là encore, la loi de l’offre et de la demande en titres souverains a engendré un déséquilibre qui a pesé à la baisse sur les taux du marché secondaire.
En effet, le Trésor a été moins dynamique sur le marché primaire en émettant tout simplement moins de bons, avec moins 20% de levées nettes sur l’année, soit 17,8 MM Dh en 2019 contre 22,2 MM Dh en 2018.
Ce qui s’explique, selon BMCE Capital, par une nouvelle politique de diversification des sources de financement du Trésor au travers de privatisations, de mécanismes de financements innovants comme la vente de biens publics à la CMR et de financements à l’extérieur, comme la dernière émission d’un milliard d’euros en décembre 2019.
Face à cette baisse de l’offre du Trésor, le marché obligataire a connu en 2019, une progression notable de la demande, de plus de 27% en volume sur l’année.
Ce qui est très intéressant, c’est que cette forte demande ponctuelle est liée à une anticipation de baisse importante des taux ainsi qu’une demande structurelle en lien avec le renforcement du cadre macro-prudentiel s’agissant de certains institutionnels de la place.
Bien sûr, techniquement, cette baisse des taux obligataires s’est traduite sur le marché obligataire secondaire par une très bonne performance de la valeur des obligations, de 6,23%, laquelle est considérée comme la meilleure des cinq dernières années ainsi qu’en en attestent les indices longs qui ont performé à +7,30% alors que le MBI LT pour sa part, a dégagé une performance de +12,29%.
Parallèlement, la Banque Privée d’Attijariwafa bank a, dans sa « Revue hebdomadaire des marchés financiers » de cette semaine, attesté d’une forte présence du Trésor en ce début d’année sur le marché domestique de la dette publique.
Avec, toutefois, le même déséquilibre entre l’offre et la demande.
En effet, face à des besoins en financement exprimés qui dépassent les 12,0 MM Dh, l’argentier de l’État n’a levé qu’un montant de 3,0 MM DH, même si ses souscriptions depuis le début du mois de janvier s’élèvent à 7,0 MMDH.
Toutefois, la dernière séance d’adjudication a été marquée par un taux de satisfaction très élevé, dépassant les 70,0%, qui s’est traduit spontanément par une hausse des taux sur le marché primaire des bons du Trésor.
Ainsi, la Banque Privée d’AWB constate que « nous assistons depuis le début de l’année à un revirement de la tendance baissière de la courbe des taux, avec des hausses de 5 à 7 points de base pour les maturités 52 semaines et 2 ans respectivement.
Marché Actions, un effet flux
Et, bien évidemment, on ne peut faire un bilan des différents compartiments du marché des capitaux sans parler de celui du marché actions à la bourse des valeurs.
BMCE Capital apporte dans ce sens une appréciation très juste que résume le titre de son bilan boursier:
Marché Actions, une hausse de +8,95%, induite principalement par des effets de flux
En effet, en 2019, le marché boursier a enregistré une hausse de +8,95% voire +13,24% avec les dividendes réintégrés.
Mais cette performance se justifie, selon les analystes de la banque d’affaires, principalement par des effets de flux sur la seconde moitié de l’année.
La hausse du marché actions initiée à partir du mois de juin a fait suite à des flux acheteurs sur les grandes capitalisations portées par l’annonce de l’élargissement du ratio émetteur pour les OPCVM Actions, passant de 15% à 20% pour les valeurs dont le poids dans le MASI est supérieur à 15%.

Cet effet flux s’est poursuivi sur le S2-2019, avec le renforcement de l’exposition Actions de certains institutionnels sur fond de baisse durable des niveaux de taux.
Rappelons que le marché boursier est une alternative de placement revigoré avec la tendance de baisse des taux partout dans le monde.
Et ce, alors même que pour ce qui concerne les réalisations financières des sociétés cotées, l’année 2019 a connu une progression de la masse bénéficiaire moyenne estimée à peine à +2,0%.
Et ce, d’autant qu’au terme de l’année 2019, le PE du marché Actions casablancais, ressort à 20, ce qui traduit une cherté du marché boursier, tandis que les résultats prévisionnels de 2019 présagent d’un rendement de dividendes fixé à 3,5%, soit un différentiel positif de + 80 points de base par rapport au BdT à 10 ans.
Et donc, à ce niveau de différentiel de taux entre le marché secondaire des obligations et celui des actions, sans les effets de flux expliqués plus haut le rendement boursier annuel pour 2019 n’aurait pas atteint les 9% comme réalisé….
Afifa Dassouli