Mais à quoi donc jouent les pilotes de la compagnie aérienne nationale Royal Air Maroc ?
Cette interrogation n’émane pas seulement du management de RAM, mais de nombreux secteurs de l’opinion publique qui ne comprennent absolument pas que des pilotes et commandants de bord de notre compagnie aérienne prennent en otage leurs passagers et leurs « outils de travail » pour satisfaire des exigences salariales outrancières.
En effet, depuis plusieurs jours, des grèves perlées et des procédés dilatoires, (certificats médicaux de dernière minute, refus de remplacer un pilote défaillant, etc.), sont le fait d’une partie importante des pilotes de RAM, pour la plupart membres de l’Association Marocaine des Pilotes de Ligne, AMPL, qui, depuis de nombreuses années, est sans doute ce qui se fait de mieux au Maroc en termes de corporatisme aveugle et égoïste.
Aujourd’hui au nombre de 500, dont 280 commandants de bord, ces « seigneurs du ciel » réclament de très fortes revalorisations de leurs émoluments, soit 30 000 dirhams nets mensuels pour les commandants et 15 000 Dh pour les pilotes.
Lorsque l’on sait que le salaire d’un commandant de bord se situe à 150 000 dirhams par mois et que son second, simple pilote, évolue à 100 000 dirhams mensuels, on en vient à avoir le vertige quand le salaire moyen dans le secteur privé au Maroc ne dépasse pas les 6000 dirhams mensuels !
Certes, les pilotes de ligne et autres commandants de bord sont des personnes exerçant une profession qui possède une charge de responsabilités très lourde.
Ils ont entre leurs mains la vie de centaines de passagers et des machines au coût exorbitant (plus de 150 millions de dollars pour un Boeing 787 Dreamliner).
Certes, leur profession exige une attention permanente lorsqu’ils sont en vol, une santé de fer, des nerfs d’acier alors que leur parcours de formation aura été long et difficile.
Mais, nous semble-t-il, leur rémunération actuelle est sans nul doute à la hauteur de leur tâche.
Alors pourquoi demander plus, beaucoup plus ?
Dans tous les pays du monde, pour les opinions publiques, les pilotes de ligne sont souvent mal-aimés, incompris parce qu’ils ont le singulier pouvoir de prendre en otage les passagers, notamment en périodes hautes, c’est-à-dire lorsque leurs mouvements revendicatifs bloquent des millions de personnes sur les tarmacs !
De plus, leurs exigences apparaissent très souvent démesurées et entraînent chez le citoyen lambda la conviction que ces pilotes de ligne constituent une caste de privilégiés qui n’ont cure de la situation générale du pays dans lequel ils vivent (et vivent très bien !).
Et, pour ce qui est de Royal Air Maroc, si la compagnie venait à satisfaire leurs revendications salariales, cela entraînerait une charge récurrente de 200 millions de dirhams, un montant que la compagnie dirigée par M. Hamid Addou ne pourrait assumer dans les circonstances actuelles.
En effet, chacun sait (et les commandants de bord en premier), que le prix des carburants a connu de fortes hausses ces derniers mois et le kérosène n’est pas resté en dehors de ce phénomène haussier.
Déjà, selon certaines sources, RAM pourrait avoir un exercice déficitaire pour 2018 en raison de ces hausses du carburant alors que pour 2017 la compagnie a seulement pu clôturer un exercice en équilibre.
Par ailleurs, alors que RAM est dans l’attente de la validation de son nouveau contrat-programme avec l’Etat, qui prévoit quasiment le doublement de ses capacités opérationnelles en termes de dessertes et de porteurs, ce mouvement de revendications des pilotes apparaît comme un véritable couteau porté dans le dos de la compagnie (et pas seulement de son management) !).
Enfin, alors que la problématique du chômage est aussi forte que générale dans notre pays, que le SMIG plafonne tout juste à 2500 dirhams mensuels, on se dit que les pilotes et leurs commandants devraient faire preuve, sinon de patriotisme et de considération pour la très grande masse du peuple marocain, du moins de cette pudeur qui devrait caractériser les nantis, tous les nantis !
Fahd YATA