La cheffe démissionnaire du SPD allemand Andrea Nahles parle aux journalistes devant le siège de son parti à Berlin, le 3 juin 2019 © AFP Tobias SCHWARZ
Les partis de la coalition d’Angela Merkel tenaient des réunions de crise lundi, leur gouvernement étant fragilisé par de piètres scores aux élections européennes, la démission de la cheffe des sociaux-démocrates et les difficultés de celle des chrétiens-démocrates.
Les rencontres séparées des chrétiens-démocrates de la chancelière allemande (CDU) et du SPD, qui doivent s’achever dans l’après-midi, étaient annoncées depuis la semaine dernière pour faire un bilan du scrutin européen du 26 mai qui a vu les deux partis plonger à des plus bas historiques.
Ces conclaves ont pris de l’importance avec le départ inattendu dimanche d’Andrea Nahles de la tête d’un parti social-démocrate déboussolé.
Le SPD, partenaire minoritaire de la coalition gouvernementale, est censé dévoiler lundi la direction par intérim qui devra organiser la succession et amener la formation à enfin trancher dans les semaines à venir: le parti va-t-il ou pas quitter prématurément le gouvernement formé dans la difficulté en 2018?
La chancelière, qui doit s’exprimer lundi après une rencontre avec des responsables régionaux de son parti à Weimar, a assuré dimanche que, malgré cette énième crise, la « grande coalition » allait « continuer (le) travail ».
– Législatives catastrophiques? –
Mais combien de temps? Battu sèchement aux législatives de 2017 et humilié aux élections européennes, le SPD, relégué à 15% derrière les Verts le 26 mai, est en pleine crise existentielle.
Certains responsables réclament une cure de jouvence dans l’opposition et un virage à gauche quitte à faire tomber Mme Merkel avant la fin de la législature en 2021.
Mais la décision est compliquée par l’absence de programme et de figure incontestée pour prendre la tête du parti ainsi que la crainte d’un résultat catastrophique en cas d’élections anticipées.
« Ce parti vit une crise extrêmement sérieuse », a reconnu Malu Dreyer, une vice-présidente de la formation.
Le quotidien de gauche TAZ résume ironiquement en Une la situation: « Job de merde à pourvoir: Chef(fe) du SPD »
Jusqu’ici, le plus vieux parti d’Allemagne avait prévu de trancher la question du maintien au gouvernement en septembre, à mi-mandat et dans la foulée de scrutins régionaux qui s’annoncent difficiles dans trois régions de l’ex-Allemagne de l’Est.
Dans ces Länder, l’Alternative pour l’Allemagne (AfD, extrême droite) espère dépasser la CDU de Merkel et réduire les sociaux-démocrates à la portion congrue.
Les chrétiens-démocrates sont aussi mal en point. La dauphine pressentie de la chancelière, Annegret Kramp-Karrenbauer, est ouvertement critiquée après plusieurs faux pas, s’aliénant notamment d’influents YouTubeurs.
Elle doit aussi s’exprimer dans l’après-midi, en marge d’un conclave de son parti pour analyser les conséquences du scrutin européen, remporté par la CDU mais avec le plus faible score de son histoire.
Si, comme Mme Merkel, celle qu’on surnomme AKK reste fidèle à la « GroKo » -la coalition au pouvoir- d’autres sont moins affirmatifs.
On devrait « se demander si ça a encore du sens de poursuivre », juge Carsten Linnemann, chef-adjoint des députés du centre droit.
« Avec un SPD qui vacille, la coalition est à peine tenable. La GroKo ne va pas survivre », assène aussi Ingo Senftleben, chef des chrétiens-démocrates dans le Brandebourg, une des régions qui vote en septembre.
– Mort-vivant –
Car sur les questions sociales –retraites, indemnisation chômage, immigration–, CDU et SPD accentuent leurs différences depuis des mois. S’y ajoute la lutte contre le changement climatique, domaine où l’Allemagne est à la traîne mais devenu cher aux électeurs comme l’illustre le succès des Verts aux élections européennes.
Des législatives anticipées dans de telles conditions seraient une première en Allemagne et à haut risque pour les deux partis qui ont dirigé ensemble ou à tour de rôle le pays depuis 1949.
A l’inverse, après leur score record aux européennes, les Verts poursuivent leur ascension.
Dans un sondage RTL publié samedi, ils devancent pour la première fois, avec 27% des intentions de vote, la CDU (26%). Le SPD (12%) est au coude-à-coude avec l’extrême droite.
L’AfD, qui a fait d’un départ prématuré d’Angela Merkel son objectif premier, réclame à cor et à cris de nouvelles élections.
« La GroKo est un mort-vivant titubant sur la scène politique », a asséné une de ses dirigeantes Alice Weidel.
LNT avec Afp