Quand on évoque la problématique de la confiance, il est très important de traiter de la relation entre l’État et le secteur privé, qui se doit d’être constructive.
Dans ce sens, tout d’abord quels sont les points susceptibles d’encourager l’investissement à l’actif de l’État ?
Sur les deux dernières décennies, tout ce qu’a fait le Maroc, initié et piloté par SM le Roi Mohammed VI, a abouti à une donnée fondamentale et établie, qu’il faut estimer à sa juste valeur: la sécurité des biens et des personnes.
La puissance publique dans son rôle
En effet, la sécurité d’un pays et sa stabilité sont deux données fondamentales qui génèrent l’investissement. Le travail qui a été entrepris tant au niveau de la sécurité aux frontières qu’à celui de la sécurité intérieure est inestimable.
Il s’agit d’un atout important pour le Maroc.
De même, sur le plan politique, les institutions fonctionnent, les élections se tiennent en temps voulu, des majorités gouvernementales sont formées, etc.
Donc, la stabilité politique constitue aussi un atout pour les investisseurs, nationaux et étrangers.
Troisième point positif, c’est celui qu’exprime toute la politique d’investissements de l’État en termes d’infrastructures.
En économie, il y a trois acteurs majeurs, l’État, les entreprises et les ménages.
Dans des pays comme le nôtre, l’État a un rôle important, la commande publique représente 19% du PIB, directement ou indirectement par les entreprises publiques.
Ce sont ces 19% qui injectent des masses financières importantes qui permettent aux entreprises d’exister d’abord, de se développer ensuite.
Par ailleurs, l’État, constitue un lieu de transit. Tout ne fait que transiter en termes de ressources injectées dans l’économie, permettant que la vitesse de rotation s’exerce en créant un cercle vertueux en faveur d’une économie créatrice de richesses pour le développement économique et social.
L’État a un rôle de régulateur. Sur le plan du Droit, il lui faut veiller à appliquer une bonne légistique, c’est à dire que le texte doit être conforme à l’ambition et à la politique de ceux qui l’énoncent, mais être également produit de façon correcte, claire, explicite et applicable. Comme il faut que les personnes en charge de son application visualisent l’impact sur le quotidien, d’où l’importance de l’opérationnel, dévolu généralement à l’Administration. Celle-ci doit disposer des ressources adéquates et performantes à tous les niveaux de sa hiérarchie.
Toutefois, il faut améliorer les process au niveau de cette dernière, pour être conforme à la volonté initiale grâce à des systèmes d’évaluations, administratifs ou juridictionnels, par la Cour des Comptes.
Réduire les inégalités sociales et spatiales
Mais, ce qui est reproché à l’État aujourd’hui, ce n’est guère le manque de performance économique, c’est la question des inégalités sociales.
Or, c’est la puissance publique qui décide combien sera prélevé auprès des catégories sociales et comment seront réparties les enveloppes budgétaires, mécanismes à travers lesquels il doit veiller à l’équilibre social.
Un grand commis de l’État, d’une très longue expérience, nous a fait la démonstration suivante d’une clarté qui ne peut être remise en cause :
« Si, par exemple, on réduit la pénibilité au niveau des classes populaires urbaines au moyen de bonnes politiques coordonnées entre les différentes structures d’intervention, gouvernement, administration, collectivités territoriales, si on améliore les infrastructures sociales de proximité, si l’on développe une bonne politique de transports en commun, si on veille à des prélèvements équilibrés et justes envers les foyers fiscaux les moins favorisés, on obtiendra alors un gain non négligeable en termes de pouvoir d’achat des moins favorisés car leur pénibilité aura été diminuée de fait. »
Une telle politique a été définie par Sa Majesté le Roi aux niveaux régional et local.
L’idée de l’Administration est que les ressources dévolues à telle ou telle collectivité soient mobilisées le plus rapidement possible, pour être dépensées le plus rapidement possible, afin d’avoir le meilleur impact sur les populations.
Car si toutes les politiques sont bonnes dans leurs énoncés, il faut qu’elles soient concrètes.
Ainsi, aujourd’hui, les collectivités territoriales s’appuient essentiellement sur les ressources mobilisées par l’État.
Comme le montre le tableau ci-dessous, leurs recettes fiscales ne cessent d’augmenter, passant de 24 à 34 milliards de dirhams entre 2012 et 2018.
Toutefois, les dépenses d’investissements restent faibles par rapport à leurs recettes, soit à peine entre 12 et 16 milliards sur le même période.
D’autant qu’avant même la régionalisation et la détermination de recettes dédiées aux collectivités territoriales, l‘État leur allouait des budgets du double de leurs besoins et qui restaient inutilisés comme en 2018, où les investissements prévus étaient de 37 milliards de dirhams contre 16,5 MMDHS réalisés seulement, tandis que les recettes fiscales ne leur ont pas manqués avec 33,5 milliards de dirhams.
Il est donc évident que les investissements régionaux peuvent être un réel moteur de l’économie et de l’égalité sociale.
Ni rentes, ni niches !
Par ailleurs, dans tous les pays, ce sont les grandes entreprises qui font l’essentiel du PIB.
De la même manière, en termes géographiques, les villes et les régions les plus riches dépensent le plus.
Mais il faut faire en sorte que tout le monde contribue de manière équilibrée sans pour cela consentir des aménagements fiscaux ou des incitations fiscales qui ne se justifient pas dans la durée.
La croissance est d’abord et avant tout une question de travail et de productivité.
Si les gens travaillaient un peu plus, de manière précise et concentrée, le rendu quotidien serait bien meilleur, avec un impact certain sur la productivité et partant, la production, dans quelque domaine que cela soit.
Dans notre pays et notamment au niveau de l’Administration, nous souffrons d’un problème d’organisation et de productivité avéré.
Il faut se mettre d’accord sur ce diagnostic pour y apporter des remèdes. Face aux forces de notre pays nous avons des faiblesses.
Le fait de nous mettre d’accord sur une même perception, est en soi, un acquis pour trouver des solutions.
Enfin, ce qui relève de l’État, doit être pris en charge, en concertation avec tous les partenaires.
Mais ce qui est propre au secteur privé, c’est à charge pour lui d’en prendre l’initiative et d’opter pour des solutions équilibrées.
L’État ne devrait plus, dans ce cas, qu’à jouer son rôle de régulateur pour davantage de confiance dans l’acte d’investir, dans la productivité, etc.
En somme, l’État est une personne morale qui fait la synthèse de la société. Il est là pour essayer d’assurer l’harmonie entre les parties prenantes.
S’il y a harmonie et confiance, cela permet d’assurer le développement économique et social.
Mais si une partie tire beaucoup plus de la collectivité par rapport à une autre, ce déséquilibre impacte collectivement l’ensemble.
Et donc, in fine, l’État ne doit pas être à l’origine des distorsions qui s’installent, notamment par des incitations abusives, entre les secteurs d’activités.
Par exemple, si certains ont abandonné l’industrie au profit d’autres secteurs, c’est parce qu’ils avaient la conviction étayée d’y réaliser des profits plus importants parce que ceux-là profitaient d’avantages qui n’étaient pas concédés dans l’industrie…