
Par Afifa Dassouli
Le Maroc vient de lancer un emprunt à l’international en dollars qui a été couronné d’un grand succès. Preuve s’il en est, sa sursouscription qui a atteint 10 milliards de dollars pour une offre de 2,5, soit quatre fois plus. En conséquence, le Trésor vient de rentrer 25 milliards de dirhams dans ses caisses et la balance des paiements de bénéficier de 2,5 milliards pour diminuer le déficit du compte courant. Car, l’émission internationale d’un emprunt obligataire se traduit par une augmentation des avoirs de réserves en parallèle de nouveaux engagements financiers du Maroc vis-à-vis du reste du monde. Cet emprunt obligataire en étant enregistré, dans la catégorie fonctionnelle des investissements en portefeuille (titres de créance) au niveau du compte financier de la balance des paiements, permet en conséquence de couvrir le besoin de financement du compte courant qui enregistre un déficit structurel.
Cette manne était surtout attendue pour soulager le déficit du budget public qui s’aggrave comme le montre le bulletin des statistiques des finances publiques du mois de février. D’autant que cette aggravation a lieu malgré une hausse des recettes ordinaires de 11,6%, provenant de l’augmentation des impôts directs de 11%, des droits de douane de 22,1%, des impôts indirects de 9,5%, des droits d’enregistrement et de timbre de 11,2% et des recettes non fiscales de 24%. Et malgré, une diminution des dépenses globales de 0,4% résultant de la hausse des dépenses de biens et services de 8,2%, due à l’accroissement des dépenses de personnel de 6,4% et des autres biens et services de 11,4%, de l’augmentation des charges en intérêts de la dette de 8,1% et des dépenses d’investissements de 11,1%, ainsi que de la baisse des émissions de dépenses au titre de la compensation de 92,6%.
Le solde ordinaire reste négatif et le déficit du Trésor également se creusant en continu. Ainsi, au cours du seul mois de février, le Trésor a dû emprunter plus de 50 milliards de dirhams sur le marché des adjudications des bons du trésor soit plus 7% par rapport au mois précédent. De fait, le déficit Budgétaire se creuse de mois en mois, les besoins de financement du Trésor également au point que le marché domestique, pourtant prédisposé à financer le Trésor en priorité, s’est essoufflé à la fin de 2022, obligeant Bank Al Maghrib à opérer quelque 17 milliards de Bons du trésor échus sur le marché obligataire pour injecter de nouvelles liquidités destinées à continuer à le financer.
Pour toutes ces raisons, les 25 milliards de dirhams de dirhams, fruits de l’emprunt international en question, vont ainsi soulager le déficit annuel du Trésor qui se monte à plus de 70 milliards de dirhams. D’autant que parmi les échéances de 2023 le Trésor doit rembourser quelque 150 milliards de dirhams de dettes qui arrivent à terme.
Mais ce n’est pas tout, le Maroc se doit de faire des sorties à l’international régulièrement pour récolter des devises afin de diminuer le déficit de son compte courant et maintenir sa réserve de devises à un certain niveau équivalent à au moins six mois d’importations.
Et également, il lui fallait reprendre contact avec les marchés de capitaux mondiaux et maintenir la confiance des investisseurs, ce dont il vient de faire l’exercice la semaine dernière.
En effet, le lancement de l’emprunt en dollars a été concrétisé en deux tranches de 2,5 milliards de dollars chacune, mais à des échéances réciproquement de 5 et 10 ans, assez proches par rapport à la dernière opération du genre dont une partie était à 30 ans. Les taux d’intérêts diffèrent bien sûr d’une tranche à l’autre du fait de la durée de chacune, soit plus de 5% pour la première et plus de 6% pour la seconde. La prime de risque imposée à cette opération qui reflète une sorte de notation du pays a été de 3% négociée à 2,8%. Elle reste aussi élevée du fait des conditions difficiles des marchés de capitaux internationaux actuellement. Même si les investisseurs de la zone dollars ont réservé un bon accueil à la « Demande » du Maroc, tout particulièrement ceux du Moyen-Orient.
Pourtant, contrairement à ce qui est dit, si le Maroc a demandé au FMI la ligne de crédit modulable, il ne l’a pas encore obtenue et donc ne l’a pas utilisée pour cette sortie.
Cette ligne, qu’il obtiendra certainement, servirait à lui élargir l’accès au marché des capitaux internationaux du fait qu’elle jouera comme une caution du FMI pour tout endettement du pays en devises à la hauteur qui sera fixée de certainement, 5 milliards de dollars, sachant que ce n’est pas le cas de la Ligne de Précaution et de liquidité. Encore une bonne nouvelle quand l’on sait que le gouvernement devra emprunter près de 130 milliards de DH en 2023 contre 105,38 milliards en 2022, pour le financement du Trésor, dont plus de 69 milliards en interne et 60 milliards à l’extérieur…