La pénétration d’internet au Maroc, notamment par le biais des smartphones, ne date pas d’hier, avec un taux de croissance annuel des Marocains connectés de 2,8%. En 2019, selon les chiffres de l’ANRT, 65% des Marocains sont connectés à internet, 31% sont équipés d’un ordinateur ou tablette et 76% ont un smartphone. De plus, la confiance grandissante dans les sites de ecommerce ont permis au secteur de fleurir, avec plus de 1000 sites d’e-commerce actifs en 2019 dont près de 500 sites créés en 2019, et 300 qui ont démarré leur activité cette même année. Il faut toutefois noter que le paiement en ligne est un peu en retrait des autres activités, une grande partie des clients et commerçants optant pour le paiement en liquide à la livraison. D’autres problématiques comme la peur de l’arnaque et la non-conformité des produits freinent également cet essor.
Premières expérience de paiement en ligne
L’apparition de la pandémie et les mesures sanitaires en découlant, surtout le confinement général du 2ème trimestre 2020, ont forcé, d’un côté, les ménages marocains à utiliser internet pour un grand nombre d’activités autrefois strictement physiques (produits alimentaires, formalités administratives et bancaires, proximité avec leurs proches…), et de l’autre les entreprises et opérateurs économiques à renforcer grandement leur présence et leurs services en ligne pour rester proches de leurs clients et maintenir leurs activités.
C’est ainsi que selon une étude du Groupe Sunergia, 22 % des « cyberconsommateurs » marocains ont effectué leur première expérience d’achat en ligne pendant la période du confinement contre 78% qui étaient déjà habitués au e-shopping. Au total, 60% des internautes marocains auraient déjà effectué un achat en ligne. Si l’habitude ne s’est pas encore installée chez tout le monde, 12% seulement effectuant au moins un achat par mois, l’année passée aura tout de même été un énorme accélérateur de tendance. Une grande partie des internautes marocains ont été initiés au paiement en ligne avec le règlement des factures (eau, électricité, mobile, etc.). Ce type de consommateur se contente en général de ce type de paiement, alors que les utilisateurs plus habitués vont acheter tout type de produits.
Une activité monétique en progression
Selon les chiffres du CMI, les sites marchands et sites des facturiers qui y sont affiliés ont réalisé 14,3 millions d’opérations de paiement en ligne via cartes bancaires, marocaines et étrangères, pour un montant global de 6 MMDH durant l’année écoulée. Cette activité ressort ainsi en progression de 46% en nombre et 25% en montant par rapport à 2019, indique le Centre, ajoutant que l’activité des paiements en ligne des cartes marocaines a progressé de 46,5% à 13,8 millions de transactions et de 29,7% en montant, à 5,7 MMDH. L’activité des paiements en ligne des cartes étrangères a affiché une croissance de 33,7% en nombre d’opérations à 503.000 transactions en 2020, et a régressé de 25,5% en montant à 303,4 millions de dirhams (MDH), relève la même source. Et de noter que l’activité « reste très fortement dominée par les cartes marocaines à hauteur de 96,5% en nombre de transactions et de 95% en montant ». Concernant les commerçants et eMarchands affiliés au CMI, ils ont enregistré 84,7 millions d’opérations de paiement par cartes bancaires, marocaines et étrangères, pour un montant global de 36,8 MMDH, en régression de 0,8% en nombre et de 19,2% en montant.
Ces paiements se répartissent, en termes de volume, sur la grande distribution (29,8%), l’habillement (9,3%), les hôtels (6,6%), les restaurants (6,2%), les stations (5,9%), les meubles et Articles de l’électroménager (5,5%) et autres secteurs (36,7%). Notons que les diminutions à ce niveau viennent probablement des secteurs ayant arrêté partiellement ou totalement leurs activités (réservations d’hôtels ou de vols en ligne, etc.).
Par ailleurs, 14% des cyberconsommateurs auraient
réglé en monnaies internationales sur des sites de e-commerce étrangers comme Amazon et Aliexpress, selon l’étude du Groupe Sunergia. Et de préciser que chez les habitués, la moitié des consommateurs achète en dirhams mais aussi en devises (sur les sites étrangers mais aussi sur les stores de leur mobile).
Toutefois, si tous ces chiffres sont encourageants, il faut garder en tête que les contraintes du confinement les ont, selon toute vraisemblance, gonflés. Une étude publiée au mois d’octobre avance que 46% des sondés ont arrêtés les achats en ligne à la fin du confinement. Cela concernerait notamment une personne sur trois qui aurait fait son premier achat en ligne en 2020. Les motifs sont notamment la volonté de « voir » le produit, mais aussi la crainte d’une mauvaise expérience. Pour inscrire ces nouvelles habitudes dans la durée, ce sont les acteurs économiques, qui ont dû en 2020 s’adapter sous la pression de la situation, qui vont devoir s’attacher à améliorer l’environnement d’achat sur internet, notamment en termes de défense des droits des consommateurs (produits non conformes, arnaques). Le potentiel est là, à eux de l’exploiter.
Selim Benabdelkhalek