
L’Aïd El Adha approche et la célébration de cette fête religieuse la plus prisée de nos concitoyens inquiète sérieusement les autorités publiques.
Le chef du gouvernement, M. Saad Eddine El Othmani et le ministre de la Santé, M. Khalid Aït Taleb ont, en effet, expressément demandé aux Marocains et Marocaines d’éviter au maximum les déplacements lors de cette célébration, au cours d’une conférence de presse tenue dimanche dernier à Rabat.
Mais seront-ils entendus ?
On peut fortement en douter tant l’on sait que « la fête du mouton » est l’occasion pour de très nombreux citoyens de rendre visite à leurs familles demeurées en milieu rural, mais aussi de prendre quelques jours de repos parmi les leurs après plusieurs mois de travail acharné dans les grandes villes.
Habituellement donc, l’Aïd El Adha est synonyme de flux très importants de voyageurs du Nord au Sud, d’Est en Ouest, ou vice versa, et rien n’indique jusqu’à présent qu’il en sera autrement cette fois-ci.
Mais la pandémie du coronavirus est toujours là et ces déplacements massifs pourraient entraîner l’apparition de cas d’infection, voire de foyers importants dans la quinzaine qui suivrait l’Aïd, notamment dans des régions, villages et petites villes jusque-là plus ou moins épargnées par la Covid-19.
Et les occasions de contracter cette maudite maladie se multiplieront à la veille et durant les jours dédiés à la fête parce que les mesures barrières, la distanciation et les précautions indispensables ne seront certainement pas la préoccupation majeure de citoyens pressés de rentrer dans leurs familles.
La promiscuité dans les transports inter-villes et les files d’attente dans les gares, ferroviaires et routières, sera sans nul doute courante tandis que le port du masque sera oublié quand le voyageur aura regagné le domicile familial, et qu’il saluera ses proches qu’il n’aurait pas vu depuis des mois !
D’ailleurs, en passant à la troisième étape du plan de déconfinement, en classant pratiquement toutes les régions, hormis deux ou trois, en zone 1, c’est-à-dire libres à la circulation, les pouvoirs publics ont, semble-t-il, pris l’option délibérée de faciliter les déplacements et les retrouvailles pour nos concitoyens à la veille de l’Aïd.
On perçoit donc une contradiction entre l’édiction de cette mesure, largement attendue d’ailleurs, et les mises en garde de MM. El Othmani et Aït Taleb.
Car, sans contrainte, ni interdiction, les familles auront tout le loisir et la liberté de célébrer la fête comme les années précédentes !
La question est donc de savoir, dans un tel contexte, s’il s’agit d’une prise de risque délibérée et consciente des autorités qui ont mesuré par anticipation les éventuelles conséquences sur la propagation de la pandémie au lendemain de l’Aïd, considérant qu’il n’était pas possible de priver la population de la célébration de l’une des fêtes religieuses majeures dans notre pays !
On comprend de tout cela que cette probabilité est assumée comme telle par les pouvoirs publics, lesquels, sans doute, ont été pratiquement jusqu’au bout dans leur décision « d’ouvrir les vannes ».
Ils auront sans doute considéré que des mesures restrictives ne pouvaient être édictées dans les circonstances actuelles après des semaines d’un confinement particulièrement douloureux pour tous nos concitoyens !
L’avenir proche nous dira si ce calcul se sera avéré judicieux ou s’il faudra revenir à des confinements partiels en plusieurs endroits du pays…
Mais, dans l’intervalle, inutile de jouer aux Cassandre !
Et donc de souhaiter à tous « Aïd Moubarak Saïd »…
Fahd YATA