L’Association Professionnelle des Sociétés de Bourse (APSB) et la Bourse de Casablanca (BVC) ont entamé le 9 juin un cycle de webinaires sur l’impact de la crise sanitaire du nouveau Coronavirus sur le marché boursier.
Le premier de la série a été mené par M. Ahmed Zhani, économiste en recherche macro-économique et taux à la Direction recherche et analyse au sein de CDG Capital, sous le thème « Économie nationale et marchés des taux post Covid-19 : quelles perspectives ». M. Zhani a mené son intervention autour de trois axes : l’impact de la crise, la politique monétaire et les marchés de la dette à terme et de la dette privée.
Comme de nombreux économistes, il a rappelé que la crise d’ordre économique que nous vivons se caractérise par un arrêt volontaire des activités, ainsi que la mise en place de plusieurs actions sociales pour soutenir les ménages et les entreprises. La crise est universelle, mais le niveau d’impact et la capacité de redressement dépendent de plusieurs facteurs selon Ahmed Zhani, dont notamment, la nature de l’économie (taille, structure du PIB, nature de la demande), la solidité de son système financier, et sa capacité de mener des politiques publiques contracycliques.
Citant le dernier rapport publié par le Fonds Monétaire International (FMI), Ahmed Zhani a expliqué que les pays avancés qui sont devenus des économies de service avec une forte dépendance à la demande étrangère et les pays émergents et en développement d’Europe industrialisés grâce au mouvement de délocalisation des industries, devraient connaître une forte récession en 2020, avec une légère reprise en 2021.
De leur côté, les pays émergents et en développement d’Asie qui disposent d’une forte demande intérieure et de grandes capacités de redressement, et les économies en développement à faible revenu avec des petites structures économiques essentiellement axées sur le secteur primaire et la demande intérieure, connaîtront un fort ralentissement en 2020, avec une reprise importante en 2021.
Au niveau national, Ahmed Zhani estime que la crise engendrée par la pandémie du nouveau Coronavirus, pourrait conduire à un affaiblissement de la consommation intérieure à cause de la perte de confiance, du chômage, de la baisse des transferts des MRE et du ralentissement des crédits.
Les investissements privés risquent aussi de baisser, en raison de la détérioration du climat des affaires, et du rétrécissement des marges budgétaires et la dégradation de la situation financière des établissements et entreprises publics.
Pour faire face à cette crise sans précédent, Ahmed Zhani met l’accent sur la nécessité de mettre en place un plan de relance multidimensionnel, avec une forte coordination entre les orientations économiques et les politiques publiques, la révision des priorités sectorielles selon l’importance en termes de renforcement de l’autonomie pour les produits de première nécessité, et de création d’emploi et de l’apport en valeur ajoutée, mais également l’accélération des réformes sociales. Il a également posé le dilemme de choisir de booster en priorité les secteurs créateurs d’emplois, ou ceux qui produisent le plus de valeur ajoutée.
Après avoir passé en revue les différentes mesures instaurées par Bank Al-Maghrib dès le déclenchement de la crise dans notre pays, Ahmed Zhani a expliqué que la modernisation du cadre de la politique monétaire devrait permettre d’assurer la stabilité des prix, relancer les crédits, et baisser les coûts de financement de l’économie nationale.
Toutefois, la poursuite de ce processus de réforme doit se faire à travers le ciblage explicite de l’inflation, le renforcement des canaux de transmission pour une meilleure réactivité des agrégats cibles, et enfin, la coordination de la politique monétaire avec les politiques publiques pour un financement efficient, notamment à travers la canalisation vers les secteurs prioritaires.
M. Zhani a été interrogé sur le recours au quantitative easing, qui signifie « assouplissement quantitatif » et désigne un instrument particulier de politique monétaire dont disposent les Banques centrales pour influencer le coût du crédit et agir ainsi sur l’inflation et la croissance. En plus des outils traditionnels (dits conventionnels), les banques centrales peuvent faire varier la quantité de monnaie en circulation dans l’économie en utilisant des moyens «non conventionnels ». Le quantitative easing est l’un de ces outils, par lequel elles achètent massivement des actifs aux banques. Les banques commerciales sont ainsi incitées à prêter aux entreprises et aux particuliers.
Selon M. Zhani, BAM dispose d’assez d’outils pour injecter des liquidités sans avoir recours à ce mécanisme, et que le Maroc devrait l’éviter, du fait que le marché manque de profondeur, et que cela pourrait créer des bulles et des tension inflationnistes.
SB