
A l’occasion du 8 mars 2017, La Nouvelle Tribune et le portail www.lnt.ma présentent un numéro spécial autour de la thématique: « Les héroïnes de l’entreprenariat social».
Ce numéro sera en kiosque dès le jeudi 9 mars, mais www.lnt.ma entame dès aujourd’hui les principales analyses et les articles consacrés à ces femmes qui s’engagent et participent, la plupart du temps dans l’anonymat, au combat quotidien pour l’autonomisation économique et sociale de la Femme marocaine. Elles sont admirables et méritent pleinement l’hommage qui leur est ici rendu, elles qui sont dans une bataille qu’il faut impérativement mener sans relâche et avec enthousiasme malgré les contraintes, l’ignorance, la défiance masculine et les préjugés.
A.D
Du Maroc reculé aux grandes villes, La Nouvelle Tribune a été à la rencontre des femmes qui travaillent pour leurs communautés respectives, dans l’objectif de leur autonomisation socio-économique, tout en contribuant à valoriser des produits du terroir, en préservant leur environnement et les ressources naturelles.
Le contenu de ce numéro spécial présente différents témoignages de femmes courageuses qui ont choisi de s’investir dans l’entreprenariat social basé sur la solidarité. Certes, il s’agit d’une démarche et d’un processus qui se répandent de plus en plus dans notre pays et qui devraient profiter à notre économie.
Ils permettent, d’abord, de valoriser le rôle économique de la femme alors même que celui-ci est toujours remis en cause ou tout simplement, méconnu, marginalisé, ignoré.
Une baisse alarmante
En effet, le dernier rapport du Conseil Économique, Social et Environnemental, publié en mai 2016 et qui portait sur « Les dimensions sociales de l’égalité entre les femmes et les hommes, consacre un important chapitre à la nécessité de « faire de la participation des femmes à l’activité économique une priorité ». Le CESE va bien plus loin en recommandant « de stopper d’urgence la sortie des femmes de la sphère d’activité économique, et de faire de l’augmentation de leur taux d’activité une priorité nationale ».
Car les propres enquêtes du Conseil font ressortir que le taux d’activité des femmes est tombé à un niveau alarmant en milieu urbain, à moins de 18% en 2015 et que les taux de participation économique des femmes en milieu rural, 27%, correspondent à des activités d’aide-familiale, le plus souvent non-rémunérées et inférieures aux standards du travail décent.
Le CESE « considère qu’il est de l’intérêt national d’ériger l’arrêt immédiat de la dégradation du niveau d’activité des femmes et son accroissement massif en causes prioritaires et urgentes ». De ce fait, il tire des conclusions très graves en affirmant qu’ « en effet, même à raison d’un point de retour des femmes à l’activité par an, il faudrait trois décennies pour que le taux de participation des femmes marocaines à l’économie atteigne les moyennes observées dans les pays émergents ».
Et le rapport de CESE de poursuivre dans ses constats alarmants en précisant que « la hausse de cette participation est une condition sine qua non de la croissance indispensable au renforcement des capacités productives du pays et à sa compétitivité économique, à l’élimination de la pauvreté et au développement humain de la société marocaine ». « Le maintien, le retour et l’accès accru des femmes à l’activité, doivent constituer à la fois des objectifs, des moyens et des indicateurs de la qualité et de la durabilité de la croissance ».
C’est pourquoi le CESE préconise « la définition d’un plan d’action national volontariste pour porter le taux d’activité des femmes aux deux-tiers de celui des hommes dans un délai de cinq ans et réaliser l’égalité des taux d’activité dans un délai de dix ans ».
Benchmark inégalitaire
Les constats et recommandations de CESE rejoignent ceux de certains pays qui mettent de plus en plus en avant la participation des femmes en économie comme une des solutions au retour à la croissance économique. Et comme par hasard, le 20 février dernier est paru dans le quotidien économique français Les Echos, une étude du think tank Fondation Concorde sur le sujet réalisée avec Clélia Aucouturier et Yasmine Boutaleb, étudiantes en Sciences Politiques. La teneur de cette étude conforte les constats et conclusions du rapport de CESE et met en avant l’urgence de la prise en compte de ce problème, qui n’est plus sociétal, et devient économique. Car les inégalités salariales Femmes/ Hommes coûtent 62 milliards d’euros annuellement à l’économie française.
Au terme de calculs économiques l’étude en question conclut que « Les gains liés à la mise en application d’une stricte égalité salariale entre les sexes seraient très importants. L’Etat y gagnerait 33, 729 milliards € par an en recettes fiscales supplémentaires et la sphère privée y gagnerait 28,14 milliards €, soit un gain total de 62 milliards € pour l’économie française et 2,9% de PIB.
En France, l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes reste de 19% en moyenne selon l’Observatoire des Inégalités. Une tendance plus flagrante chez les cadres où l’écart est de 26,3% que chez les employés où il n’est « que » de 9,3%. À diplômes et à compétences équivalents, il n’y a donc pas de justification économique à cet écart.
Par ailleurs et pour dénoncer ce phénomène, le 24 octobre 2016, en Islande, des milliers de femmes ont cessé le travail à 14h 38, heure à laquelle où, en comparaison aux hommes de ce pays, elles ne sont plus payées.
La précédente mobilisation de ce type, en 2010, avait débuté trois minutes plus tôt. En France, le collectif « Les Glorieuses » a invité les salariées à cesser le travail le 7 novembre 2016 à 16h34. Heure précise à partir de laquelle elles travaillent « bénévolement ».
Pas de croissance sans la Femme
Sans vouloir faire un quelconque rapprochement entre le Maroc et la France, il faut retenir essentiellement le lien démontré par cette étude entre la participation économique des femmes et l’amélioration du taux de croissance d’une part et le rétablissement des équilibres macroéconomiques de l’autre.
Cette réalité avérée justifierait une meilleure place pour femmes dans le monde du travail .
Mais, in fine, n’est-ce pas là un bon benchmark pour le Maroc et ses décideurs qui peinent encore à reconnaître de telles vérités ?
Afifa Dassouli