Abdellatif Mortaki, Directeur Général par Intérim de la CNSS, remet le premier chèque d'allocation familiale à une employée de maison
L’extension de la couverture sociale et sa généralisation à de nouvelles catégories de salariés, notamment le personnel de maison, est aujourd’hui en phase d’application.
En effet, la loi 19/12 qui réglemente la relation de travail entre l’employé domestique et son employeur est entrée en vigueur en octobre 2018.
Et le décret d’application prévu par la loi relative au régime de sécurité sociale, a été publié le 3 juin 2019, ouvrant ainsi aux employés de maison le bénéfice de la sécurité sociale gérée par la CNSS et, ipso facto, la protection sociale pour cette catégorie de travailleurs est devenue réalité.
Toutefois, dans une mesure de progressivité, le gouvernement a opté pour la mise en œuvre de cette couverture en deux phases.
Une année pour s’affilier
Celle-ci est énoncée dans le décret qui stipule que l’employeur et l’employé ont 12 mois pour s’organiser, intégrer dans la pratique cette couverture et surtout signer les contrats de base préalables à la déclaration d’affiliation à la CNSS.
Cette phase reste donc facultative depuis le 3 juin 2019 pour un an.
Au-delà, donc, dès le 3 juin 2020, tout employeur de domestiques doit s’enregistrer à la CNSS et enregistrer son salarié sur la base d’un contrat signé entre eux et commencer à payer des cotisations pour la couverture sociale et maladie du salarié domestique.
A cet effet, la CNSS lance sous peu, plusieurs modes communicationnels sur cette avancée sociale.
Dès la publication du décret d’application, la Caisse a commencé à communiquer sur son site et les réseaux sociaux, publié « un guide de l’employeur » et aurait ajouté sur son site la case « employeur de maison ».
La nouvelle version du site sera déployée mi-novembre.
Elle a aussi initié des rencontres à travers ses délégations régionales avec des associations et des ONG dans les villes pour expliquer ce dispositif.
En ce qui concerne les modalités de cette couverture des employés domestiques, il faut savoir que les lois sur la protection sociale sont universelles et que les employeurs doivent déclarer leur employé, quel que soit leur âge.
En effet, tant que l’employé de maison est actif, il faut le déclarer au titre du droit essentiel à l’assurance maladie, d’autant qu’avec l’âge ses besoins augmentent.
Pour ce qui concerne, la retraite, une disposition permet, depuis 2014, aux assurés n’ayant pas le nombre de jours requis pour l’ouverture des droits, de récupérer les cotisations.
Une communication tous azimuts
En cette période probatoire de l’application la loi portant bénéfice de l’assurance maladie et la retraite aux employés de maison, la Caisse nationale de Sécurité sociale compte lancer une campagne sur plusieurs supports qui va s’étendre jusqu’à l’entrée en vigueur de cette obligation sociale pour les employeurs de maison.
Une première campagne sera enclenchée le 4 novembre et la seconde durant le mois de Ramadan pour leur rappeler leurs devoirs envers leurs employés à la veille même de l’obligation d’affiliation qui interviendra au début de juin 2020.
Et de fait, tout le matériel de communication, (spots, affiches, messages radios et TV, etc.), est déjà prêt.
Les principaux messages de la CNSS qui vont être véhiculés à travers ses campagnes d’incitation à la déclaration du personnel domestique sont constitués de deux spots télé et trois spots radio, en sus de l’affichage et des insertions dans la presse écrite et digitale.
Le premier message sera adressé aux employés à travers un spot télé.
Il mettra en scène différents employés domestiques, femme de ménage, gouvernante, jardinier et chauffeur.
Chaque situation va poser une problématique du travailleur domestique.
L’un a des enfants, mais pas d’allocations familiales, l’autre a un membre de sa famille malade et n’a pas de prise en charge médicale, l’autre est vieux et sans retraite, etc.
Face à ces situations, les messages déclinent les différentes prestations de la CNSS qui pourraient les soulager.
Un autre message interpelle les employeurs pour attirer leur attention sur la nécessité de couvrir leurs employés pour les besoins élémentaires de la vie et les inciter à déclarer leurs salariés domestiques au régime général de la CNSS en souscrivant à l’assurance sociale.
Dans la première phase de campagne, la CNSS n’évoquera pas l’obligation légale parce que cette campagne s’inscrira dans la période probatoire et facultative.
Par contre, la seconde phase de la campagne de communication, qui aura lieu durant le mois de Ramadan prochain, elle portera tout particulièrement sur l’obligation de passer à l’acte.
Passer à l’acte
A ces deux messages, s’ajoutera un troisième, un spot radio en l’occurrence, qui évoque la procédure et les avantages du contrat.
Ce message est destiné à dissiper les appréhensions et les réticences des employés domestiques qui refusent le contrat croyant que ce dernier les obligerait à travailler avec le même employeur sans possibilité de le quitter.
Il mettra aussi en exergue l’importance du contrat passé entre l’employé et l’employeur pour s’enregistrer à la CNSS et sans lequel le salarié domestique ne peut prétendre au bénéfice de l’assurance maladie et de la retraite.
Les spots sur le digital, quant à eux, seront plutôt didactiques et reprendront les points énoncés dans le guide de l’employeur élaboré par la CNSS.
Ils mettent en scène une jeune femme qui présente les produits de la CNSS pour cette population et explique comment faire pour y accéder et en bénéficier.
On rappellera que le contrat type entre l’employeur et l’employé de maison est disponible dans toute Délégation de l’Inspection du Travail et téléchargeable sur les portails de la CNSS et du ministère de l’Emploi et qu’il doit être signé par les parties prenantes.
Cette formalité accomplie, la déclaration d’affiliation à la CNSS doit se faire sur la base d’un salaire minimum de 60% du Smig, sachant que la cotisation est basée sur le salaire déclaré par l’employeur. Le salaire de l’employé peut évidemment être supérieur à cette base minimale légale.
Les taux des cotisations sont identiques à ceux des salariés du secteur privé, soit 6,4% pour l’allocation familiale, 6,37% pour l’AMO, 11,89% pour les pensions, 1,57% pour les courts termes (maladie, congé de naissance, décès) et 1,6% pour la formation professionnelle. Soit un total de 400 dirhams sur la base du salaire minimum déterminé, (60% du SMIG).
Sur ces montants, l’employeur s’acquitte des 2/3 et le salarié le 1/3.
Il faut compter sur la conscience et le civisme des gens sachant que le respect de la loi est une obligation irréfragable à l’instar du respect du Code de la Route.
Car la protection sociale est une obligation à laquelle il faut souscrire, au-delà donc des approches de solidarité ou de générosité individuelle.
Un bilan encore chiche
En dressant le bilan des procédures de contrats entre employeurs et employés de maison, on compte au total 434 contrats signés seulement et déposés dans les délégations du Travail.
La majorité provient de Rabat où siègent les ambassades étrangères et Marrakech où résident de nombreux expatriés.
Casablanca, la plus grande ville du Royaume ne compte à peine que 64 contrats signés et déposés !
Sur ces 434 contrats signés, 274 ont été déclarés pour affiliation à la CNSS permettant ainsi aux assurés de percevoir leurs allocations familiales.
Il faut espérer que cette sensibilisation de la CNSS trouvera échos dans la conscience sociale des employeurs afin que les employés de maison retrouvent une certaine dignité et surtout une amélioration certaine de leur niveau de vie …
Afifa Dassouli