SM le Roi adresse un discours au Parlement à l'occasion de l'ouverture de la 1ère session de la 1ère année législative de la 11ème législature
Le discours royal du 30 juillet 2022 a marqué le début du chantier de la réforme de la Moudawana. Après le discours du souverain, les réactions n’ont pas manqué de fuser, que ce soit du côté du gouvernement, des partis politiques, de la société civile, ou même des observateurs étrangers.
C’est ainsi qu’à l’occasion du premier conseil du gouvernement suivant le discours, le jeudi 25 août 2022, à Rabat, Aziz Akhannouch a vivement salué le contenu du discours royal, exhortant les membres de son cabinet à «l’abnégation et la mobilisation, chacun depuis son poste et selon ses responsabilités, pour la mise en œuvre correcte des orientations de Sa Majesté le Roi». Et d’ajouter que «la promulgation de la Moudawana en 2004 a certes marqué un tournant historique et une révolution sociale tout en douceur qui a été plébiscitée par toutes les composantes de la société. Toutefois, la mise en œuvre de certaines de ses dispositions a révélé un certain nombre de lacunes, d’où l’impératif de se consacrer au perfectionnement de ce texte dans le droit fil de l’attention portée à la famille en général et à la situation de la femme et de l’enfance tout particulièrement, et dans le respect du cadre référentiel défini par Amir Al-Mouminine, qui tire ses fondements des finalités de la Chariâa et de l’«Ijtihad» modéré». En application des hautes orientations royales, a-t-il poursuivi, le gouvernement procédera à la généralisation des tribunaux de la famille à l’échelle nationale en les dotant des ressources humaines qualifiées et des moyens matériels nécessaires à leur bon fonctionnement.
Du côté des partis, le discours a été accueilli très favorablement. À titre d’exemples, le bureau politique de l’USFP considère que « le chantier de réforme et de modernisation du Code de la Famille annoncé dans le discours royal traduit l’approche progressiste du souverain relativement à la question. C’est une approche rationnelle du texte religieux qui privilégie l’esprit du texte sur son énoncé. La réforme, comme il est spécifié dans le discours royal, doit être menée en parfaite concordance avec les desseins ultimes de la Loi islamique et les spécificités de la société marocaine». Pour ce qui est du PPS, le bureau du parti le parti a appelé à «l’égalité entre les deux sexes dans l’héritage, mais aussi à davantage de libertés individuelles ainsi qu’à une plus grande ouverture en matière de libertés». Le parti estime ainsi, que la levée de toute forme de ségrégation sur la base du genre est de nature à renforcer les droits, notamment économiques, de la femme. Et ce à travers l’instauration d’une égalité non seulement en matière d’héritage, mais aussi dans l’accès au marché du travail, aux postes de responsabilité et au niveau des salaires.
La société civile n’a pas non plus manqué de réagir. Oumayma Achour, de l’ONG Jossour de promotion des droits des femmes, a déclaré à la presse : «C’est un discours historique dont nous soutenons totalement le contenu», rappelant que son association réclame une réforme du Code de la famille qui « verrouille fermement et totalement l’interdiction du mariage des mineurs et de la tutelle sur la femme». «Nous devons tous, gouvernement, Parlement et acteurs de la société civile, nous mobiliser en ouvrant, en toute sérénité, un vrai débat afin de parvenir à régler ces deux questions, auxquelles s’ajoutent les problèmes du mariage à travers la seule fatiha et le contrat de mariage qui limite dans le temps la période de l’union», a-t-elle ajouté.
Les observateurs étrangers ont eu aussi leur mot à dire, comme le Directeur général de l’Observatoire d’études géopolitiques de Paris (OEG), Charles Saint-Prot, qui a déclaré qu’en abordant la Moudawana, le Souverain a décidé de faire un « bond en avant » de façon à permettre au Code de la famille de jouer un rôle accru, ajoutant qu’il s’agit d’un aspect «très important».
Depuis le discours, le sujet de la Moudawana et la question féminine en général a été au cœur de nombreux événements et conférences, comme par exemple la 5ème édition de Morocco Today Forum, tenue en décembre 2022. Lors de son ouverture, le Chef du Gouvernement a déclaré que «depuis son ascension au Trône, SM le Roi Mohammed VI n’a cessé d’apporter des réformes pour rendre à la femme la place qu’elle mérite dans la société. La réforme du Code de la famille en 2004, suivie de la réforme de la constitution en 2011», soulignant que la femme est fortement présente, aujourd’hui, sur la scène politique. De son côté, la ministre de la Solidarité, de l’Insertion sociale et de la Famille, Aouatif Hayar, a expliqué que «des classements mondiaux ont montré les avancées notoires du Maroc en matière du respect des droits des femmes… Selon le rapport du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) de 2022, le Maroc figure dans le top 10 des pays ayant enregistré des progrès significatifs en matière d’égalité des sexes et d’autonomisation des femmes, contrairement à plusieurs pays qui ont enregistré des tendances inverses. La promotion de la condition de la femme marocaine, est placée au centre de la Vision Stratégique de SM le Roi Mohammed VI, que ça soit sur le plan économique, social ou culturel».
Le discours royal a ainsi enclenché un grand débat national sur la Moudawana et sa réforme, qui implique l’ensemble de la société marocaine et de ses composantes.
Selim Benabdelkhalek