Les drapeaux européens devant le bâtiment de la Commission européenne, le 16 juin 2022 à Bruxelles
La guerre russo-ukrainienne a instauré un climat économique teinté de manque de confiance et fait de changements à différents niveaux qui se sont répercutés sur les prix, enclenchant une inflation galopante. Au début, cette dernière dite importée, était étroitement justifiée par la flambée du prix du gaz et du pétrole provenant des pays en guerre, mais très vite généralisée du simple fait de la rareté sur les marchés de nombreux produits avec ceux alimentaires en tête, et des problèmes de logistique et de livraison dans les ports en particulier.
Et, de l’inflation au resserrement monétaire par les banques centrales, de l’augmentation des taux d’intérêt aux difficultés de financement des entreprises, la crise économique s’est installée se généralisant dans le monde entier. Une situation de stagflation prédominante avec peu de visibilité sur une reprise économique.
En conséquence, les prévisions étant de plus en plus négatives et les analystes s’accordant sur une guerre d’usure, la croissance se perdait dans le temps.
L’inflation, un niveau des taux multiplié par 4 ou plus, des déficits publics dépassant parfois les 100% du PIB, entrainant l’endettement dans son sillage, sont devenus des maux partagés par les pays riches et pauvres avec la seule différence que les monnaies fortes des premiers les protégeaient quand celles des seconds très affaiblis les enfonçaient dans la crise économique.
Après les 10 années de crise consécutives à la crise des subprimes de 2008, ces constats mèneront-ils l’économie mondiale à un nouveau cycle baissier ?
A cette question, les réponses confirmaient que l’inflation sera durable poussée par les produits énergétiques, la consommation confrontée à la baisse du pouvoir d’achat ne devrait plus jouer son rôle de facteur de croissance et les investisseurs perdant leur capital confiance également.
Pourtant, la commission européenne vient de créer une nouvelle ouverture plus optimiste, en relevant lundi sa prévision de croissance pour l’UE à 1 % pour 2023 et 1,7 % pour 2024 avec une inflation qui pourtant devrait rester élevée, à 5,8 %.
En effet, le premier argument mis en avant par la commission européenne relève du changement de trajectoire des prix de l’énergie qui ont perdu autour de 30% et « une économie européenne qui a plutôt bien traversé l’hiver, en ne connaissant pas de récession en 2023, avec un début d’année meilleur que prévu » selon le Commissaire à l’Économie, M. Paolo Gentiloni. C’est pourquoi, la Commission européenne a relevé sa prévision de croissance pour 2023, notamment pour la France et les pays méditerranéens qui sont tous au-dessus de la moyenne, comme la Grèce et le Portugal qui connaîtront une croissance à 2,4%, l’Espagne à 1,9 % et l’Italie à 1,2 %.
Dans ce contexte, le Maroc ne peut que se réjouir pour ses voisins, qui sont surtout ses principaux partenaires, en comptant sur leur dynamisme pour réaliser sa prévision de croissance de plus de 3% en 2023.
Toutefois, le Commissaire à l’Économie, Paolo Gentiloni affirme également « que le point noir de ces prévisions reste l’inflation, même si elle commence à refluer avec la baisse des prix de l’énergie ».
Et aussi, parce que l’inflation sous-jacente reste élevée, à 7,6 % en mars dernier dans la zone euro, même s‘il prévoit qu’elle devrait faiblir à 5,8 % en 2023. La Commission européenne craint également que des augmentations de salaires inévitables ne continuent à alimenter cette dernière, créant une spirale inflationniste, prix-salaires, bien connue.
Paolo Gentiloni recommande aux États membres de l’UE de réorienter les dispositifs de soutien aux ménages vers les plus vulnérables, de manière à ne pas contrarier les efforts de la Banque centrale européenne pour juguler l’inflation. Efforts encouragés par des prix de l’énergie orientés à la baisse et des goulets d’étranglement qui se résorbent progressivement.
L’endettement des États, l’autre point noir reconnu par la Commission européenne, est également en baisse en ce début de 2023 ! Bien que sur cette affirmation, la Commission européenne reste prudente compte tenu de l’incertitude géopolitique et des risques d’instabilité financière.
D’autant que Bruxelles vient de présenter une nouvelle proposition de pacte de stabilité et de croissance, pour réviser le précédent dont les règles de 3 % de déficit public et 60% du PIB, sont désormais non applicables. Paolo Gentiloni prévoit que l’endettement consolidé de l’UE tombe en dessous de 83 % du PIB en 2024. Selon lui, les États membres dont le déficit est supérieur au seuil de 3 % du PIB devrait passer de 11 en 2022 à 14 en 2023, avant de retomber à 10 en 2024.
Les prévisions de croissance des pays de l’UE, importent beaucoup au Maroc, qui profite de leur tendance en tant que partenaire économique privilégié. Leur santé économique bonne ou mauvaise impacte spontanément la sienne.
De plus, au Maroc, l’équilibre budgétaire en tant que facteur de soutien aux grands équilibres macro-économiques de notre pays, est tout particulièrement sous l’œil du cyclone. Il reste cependant bien maîtrisé avec un déficit budgétaire établi à 5% du PIB et un endettement public de 70% du PIB pour 2022. Bien mieux que pour nombre de pays européens…
Afifa Dassouli