C’est un fait, les déficits publics des États et l’endettement budgétaire qu’ils engendrent se sont aggravés et ont dépassé les niveaux acceptables.
En effet, depuis la crise de 2008, ce creusement dépasse les 100% du PIB dans nombre de pays, et pas seulement des pays pauvres. L’Europe comme les Etats-Unis et les autres pays occidentaux sont concernés en premier chef avec un niveau de dette allant jusqu’à 120 % du PIB, dépassant de loin les règles de stabilité financière européennes érigées par le traité de Maastricht.
En effet, ce traité avait défini des règles pour le fonctionnement de l’euro, et des critères d’adhésion à la zone euro, dans l’objectif de garantir la stabilité des prix.
Ces critères de convergence conditionnaient aussi l’adhésion de nouveaux pays à la zone euro. Elles visaient à assurer, pour les pays adhérents, la stabilité dans les domaines suivants : l’inflation qui ne pouvait pas excéder de plus de 1,5 points le taux des trois États membres qui maitrisaient au mieux cette dernière.
Le traité de Maastricht imposait également que le déficit budgétaire annuel et la dette publique globale de chaque pays n’excédent respectivement pas 3% et 60% de leur produit intérieur brut.
Ces limites ont été scrupuleusement respectées par les pays européens jusqu’à la crise financière de 2008 qui a sévèrement sévi au niveau de toutes les économies européennes, autant qu’au niveau mondial.
Et le creusement de ces indicateurs continue aujourd’hui avec les guerres, le choc pétrolier et le crack des taux qui n’est pas encore résorbé.
En conséquence, les pays européens ne respectent plus les critères de Maastricht avec des déficits budgétaires et des niveaux d’endettement excessifs avoisinant respectivement les 7% et 120% du PIB. Jusqu’à présent, face à ces dérapages, l’UE n’a pas pu réagir vu la détérioration de la santé financière des États membres.
Mais, samedi dernier, les négociations menées depuis avril 2023, ont abouti à un accord sur de nouvelles règles budgétaires de l’UE pour garantir des finances publiques saines tout en préservant la capacité d’investissement de l’UE.
Il faut savoir toutefois que la Commission européenne a d’abord accordé une certaine flexibilité aux capitales européennes en avril dernier, pour définir leur trajectoire budgétaire, sur la base d’une analyse de soutenabilité de la dette en prenant comme indicateur clé les dépenses primaires nettes pour dégager un solde budgétaire ordinaire positif.
Sachant qu’en décembre dernier, les Vingt-Sept ont introduit d’autres garde-fous, plus contraignants, pour sauvegarder leurs équilibres budgétaires. Par exemple, ils ont imposé des réductions automatiques de dette aux pays dont le ratio d’endettement dépasse 60 % du PIB. Sauf qu’il s’est avéré que ces règles empêcheraient de faire face aux importants investissements en vue, énergétiques, numériques et de défense, dont l’Europe a besoin. La discipline budgétaire devait introduire des garanties pour prendre en compte l’investissement public dans des domaines stratégiques. C’est chose faite comme le précise la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, par ces propos : « Les nouvelles règles permettront aux pays de l’UE d’investir dans leurs atouts tout en consolidant leurs finances publiques ». Sachant que l’Allemagne s’est astreinte depuis 2009 à freiner sa dette, ce qui a conduit à une impressionnante dégradation de ses infrastructures et un grand retard dans la digitalisation.
Le Parlement européen à Strasbourg devrait voter le nouveau texte en avril 2024 pour son application à partir de 2025.
En attendant, la Commission européenne examinera les budgets nationaux à la lumière des recommandations qu’elle a faites en 2023 ; elle devrait mettre une douzaine d’États membres en procédure de déficit excessif, dont la France.
Le Maroc, qui a toujours respecté les règles européennes de 3% de déficit budgétaire et 60% du PIB en termes d’endettement, a déjà rétabli son déficit primaire qui est positif depuis 3 ans. Preuve en est qu’en janvier 2024, l’exécution de la loi de finances fait ressortir un solde ordinaire positif de 4295 millions de dirhams contre 2240 MDH un an auparavant.
Toutefois, le déficit budgétaire du Maroc et le niveau de sa dette dépassent les anciennes normes européennes brut à 7% du PIB pour le déficit budgétaire et 80 % pour son niveau d’endettement.
Et, si le Maroc devait s’inscrire dans la perspective d’adoption des nouvelles règles de convergence européenne, il en remplirait déjà la condition du solde primaire positif et se réjouirait de pouvoir continuer ses investissements engagés et futurs, dans le cadre des diverses réformes lancées…
Afifa Dassouli