La ville ocre vient d’abriter les travaux d’un important atelier de formation de deux jours sur la traite des êtres humaines au profit des journalistes spécialisés dans la chose judiciaire.
Organisée conjointement par la Commission Nationale Chargée de la Coordination des Mesures de Lutte et de Prévention Contre la Traite des Êtres Humaines (CNCLT) et l’Office des Nations Unies contre la Drogue et le Crime (UNODC), cette rencontre vise à soutenir et améliorer les capacités des professionnels des médias dans le traitement de sujets et thématiques en rapport avec le trafic des personnes et des migrants.
Pour l’organisation, cette initiative s’inscrit parfaitement dans le cadre des efforts déployés, sous la supervision du CNCLT, pour mettre en œuvre du Plan stratégique National de Lutte et de Prévention de la Traite des Êtres Humaines pour la période 2023-2026. En effet, ce plan a pour but d’assurer une forte implication des professionnels des médias en tant qu’acteur incontournable en la matière.
Lors de ces deux jours, d’éminentes personnalités de différents horizons institutionnels de premier plan (Présidence du Parquet, Ministères de la Justice, les Affaires Étrangères, la Communication, l’ISITH, le département de la Communication, l’Office des NU contre la Drogue et la Criminalité) ont été de la partie, enrichissant ainsi le débat.
Pour M. Said Tamam du département de la Jeunesse, la Culture et la Communication, l’approche juridique, aussi répressive et stricte soit-elle, ne peut à elle seule être une réponse suffisante pour combattre ce crime complexe avec toutes formes, branches, extensions et effets sur les victimes, leurs familles et la société dans l’ensemble : « Ce qui nécessite la multiplication des efforts de tous, dont les médias connus pour leur capacité à influencer positivement le comportement des individus et des groupes, accroître le degré de sensibilisation et diffuser la culture juridique ».
Même son de cloche chez Mme Benyahia Soufana du Comité de Coordination du CNCLT, pour qui il est grand temps d’asseoir une mobilisation communautaire tous azimuts dans l’objectif de lutter efficacement contre ce fléau qui met en danger la vie de toute personne en quête d’une vie décente. Dans sa présentation et après avoir détaillé le processus juridique marocain prévoyant les mécanismes légaux et préventifs, Mme Soufana a bien voulu démontrer à quel point cette question de la traite des êtres humaines ne cesse d’atteindre des seuils intolérables et qu’il incombe à tout un chacun de la combattre.
Pour M. Mounir Kettaoui, l’engagement dans la presse spécialisée dans la lutte contre ce phénomène est avant tout un devoir humain. Et de poursuivre que le traitement médiatique de sujets pareils doit être entouré d’un certain nombre de garanties dont la principale est celle de la victime et son entourage familial.
De son côté, M. Mohamed Chabib, de la présidence du Ministère Public, tient à préciser que ce sujet de la traite des êtres humaines revêt une multiplicité de dimensions, à la fois juridiques et socio-économiques, ce qui a créé un nombre d’approches qui ont encadré le législateur international, et national. Et d’ajouter que les chiffres démontrent aujourd’hui l’ampleur du phénomène, avec quelque 153 personnes poursuivies à ce jour dans des dossiers de trafic des êtres humaines. Sachant qu’en 2017, le nombre de ces dossiers devant les tribunaux avait été de 17. Ce chiffre a grimpé à 80 en 2018, puis à 151 en 2019. A cause du Covid et des mesures restrictives, ce trend haussier a connu une baisse considérable en 2020, avec 79 dossiers, pour repasser en hausse en 2021 et 2022. Le nombre de condamnés a été de 121 personnes en 2022. 38% de ces condamnés sont des femmes et 62% sont des hommes. Ces 121 jugés ont été tous condamnés dans des affaires de traite et trafic des êtres humaines, soit 6 procès en rapport avec l’exploitation dans des conflits armés ou des opérations criminelles, esclavagisme (1), travail domestique (5), mendicité (2), travail forcé (5), et surtout exploitation sexuelle (83).
Les travaux de cet atelier de formation et de sensibilisation se sont achevés par la présentation d’un ensemble de recommandations visant à traduire l’implication des journalistes dans la lutte contre un des pires fléaux des temps modernes…
Hassan Zaatit