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Depuis plus d’un quart de siècle, le Maroc s’impose comme une destination incontournable pour les investisseurs étrangers. Grâce à sa position stratégique aux portes de l’Europe, sa stabilité politique et les nombreuses réformes économiques et administratives mises en place, le Royaume offre un climat d’affaires attractif et compétitif. L’investissement direct étranger (IDE) représente un moteur clé du développement économique du Maroc. Qu’il s’agisse d’industries stratégiques comme l’aéronautique, l’automobile ou les énergies renouvelables, ou de projets immobiliers et participations dans des PME, les IDE revêtent de multiples formes et contribuent activement à la création d’emplois et à la croissance économique. Face à cette diversité, un accompagnement rigoureux et une compréhension approfondie du cadre juridique et fiscal sont essentiels pour garantir le succès de ces initiatives.
Le Cabinet Roche et Mameri groupe Exygene, composé de trois cabinets en France et au Maroc, est spécialisé dans les services financiers aux entreprises. M. Karim Mameri, associé expert-comptable, et M. Hakim Essadiq, associé dirigeant du réseau Maroc, ont récemment publié une étude intitulée « La règlementation juridique et fiscale des investissements directs étrangers au Maroc », qui vise à analyser les principales dispositions juridiques et fiscales encadrant les IDE, en mettant en lumière les opportunités et les défis qu’ils représentent. Elle propose un éclairage précis sur les incitations offertes, les formalités à respecter et les mécanismes de protection mis en place, afin d’accompagner les investisseurs dans leur implantation et leur développement au Maroc. Elle devrait apporter de précieux éclaircissements à nos lecteurs, et c’est pourquoi nous la publions ci-après.
Afifa Dassouli
Depuis plus d’un quart de siècle, le Maroc s’affirme, année après année, comme l’une des destinations les plus attractives d’Afrique en matière d’investissements étrangers. Notre position stratégique aux portes de l’Europe, notre stabilité politique, les réformes économiques et administratives engagées, nos infrastructures en modernisation constante nous imposent comme une destination privilégiée pour les investissements directs étrangers. Notre « climat des affaires » est globalement stable et compétitif mais les défis demeurent de taille : pour tirer pleinement parti de nos opportunités, les investisseurs étrangers, quelle que soit leur taille, doivent être accompagnés efficacement tout au long de leur présence sur notre territoire et bien conseillés, en fonction de leurs attentes, conformément à notre cadre juridique et fiscal.
Les investissements directs étrangers :
Les IDE désignent l’engagement financier durable d’un investisseur étranger pour un projet hors de son pays d’origine. Au Maroc, cette dynamique se déploie à travers une diversité de secteurs, confirmant qu’il existe bien des IDE et qu’il serait trop réducteur d’évoquer de « petits » investissements. Du développement industriel de pointe, avec implantation d’usines dans des domaines stratégiques aux intérêts supranationaux : de l’aéronautique à l’automobile en passant par la révolution énergétique, portée par des projets dans l’hydrogène vert, la présence de géants internationaux du tourisme… Les IDE ce sont aussi des participations au capital de PME étrangères dans des filiales marocaines, tous secteurs confondus, ou encore les projets immobiliers de personnes physiques non-résidentes. Toutes ces formes d’investissements moins « institutionnelles » mais toutes aussi importantes : des étrangers ou Marocains du Monde construisant des villas à Asilah, acquérant et réhabilitant des riads dans la Medina de Marrakech ou d’autres encore se regroupant pour mener à bien des opérations de promotion immobilière à taille humaine… L’achat en indivision du foncier, en périphérie de grandes villes, en vue de construire plusieurs résidences secondaires individuelles est un montage de plus en plus prisé des non-résidents. Ces diverses contributions témoignent, non seulement, de la confiance accordée à notre pays mais également de la pluralité des profils d’investisseurs étrangers qui vont en façonner l’avenir. Chaque projet, quelle que soit son envergure, constitue un levier essentiel de développement, apportant sa contribution spécifique à la création d’emplois et à la dynamique de croissance économique. Toutes ces situations méritent un accompagnement inscrit dans une logique responsable et durable avec un souci permanent d’efficacité, de rigueur et de professionnalisme. L’expérience de l’investisseur étranger au Maroc, dès son arrivée, doit être à l’image de l’hospitalité de notre pays : la recherche permanente de l’excellence jusqu’au jour où il pourrait décider, libre de son choix, de repartir.
Un cadre juridique incitatif :
La législation marocaine est favorable à l’attractivité des IDE.
- Liberté d’investir : La loi N°18-95 et le Dahir N° 1-95-213 du 14 joumada II 1416, 8 novembre 1995, ne subordonne plus les investisseurs étrangers à l’obligation de s’associer avec un partenaire local. L’égalité de traitement est garantie. Les investisseurs étrangers peuvent détenir jusqu’à 100% du capital de leur société de droit marocain et bénéficient d’une totale liberté d’entreprendre, sans obligation de partenariat avec un opérateur local, sauf dans des secteurs spécifiques et sensibles (agriculture, défense…).
- Garantie du droit de propriété : La loi N°03-22, Dahir N° 1-22-76 du 14 joumada I 1444, 9 décembre 2022, formant charte de l’investissement précise le cadre de protection des droits de propriété des investisseurs étrangers, y compris la possibilité de rapatrier librement leurs dividendes pendant leur activité sur notre territoire et leurs capitaux, en cas de départ définitif, en conformité avec la réglementation des changes.
La loi rappelle, en son chapitre 4, les garanties offertes aux investisseurs. Le climat de confiance propice à l’investissement assurant aux investisseurs, nationaux ou étrangers, une protection juridique solide et un environnement stable.
- Protection du droit de propriété : Il est rappelé que les investisseurs bénéficient d’une reconnaissance et d’une totale protection de leurs droits de propriété, conformément aux textes législatifs préalablement parus au Bulletin Officiel.
- Non-discrimination : Les investisseurs sont protégés par une égalité de traitement.
- Recours en cas de litige : les investisseurs ont accès à des mécanismes de règlement de litiges, incluant la possibilité de recours à des arbitrages internationaux, selon les accords et conventions ratifiés par le Maroc.
- Conventions bilatérales et régionales : Le Maroc est signataire de plus de 70 conventions bilatérales de promotion et de protection des investissements. Il fait aussi partie de zones de libre-échange comme la Zone de Libre-Échange Continentale Africaine (ZLECA).
- Casablanca Finance City et les Zones d’Accélération Industrielle :
CFC est une place financière disposant d’un statut fiscal privilégié. Elle a vocation à faciliter les investissements et les activités de services vers le continent africain depuis le hub casablancais. Elle accueille les sièges régionaux de plusieurs multinationales. Les entreprises au statut CFC bénéficient d’un processus simplifié pour le recrutement de profils étrangers, d’une gestion plus fluide des devises et la possibilité de recours au Centre International de médiation et d’arbitrage de Casablanca en cas de litiges professionnels. Les « entreprises CFC » disposent également d’avantages fiscaux. Dès l’octroi de leur statut par la commission CFC, elles bénéficient de l’exonération totale de l’impôt sur les sociétés pendant cinq (5) exercices consécutifs. Elles sont ensuite imposables au taux de 20% quel que soit leur bénéfice fiscal sauf pour les établissements de crédit et les entreprises d’assurance et de réassurance. Elles sont également exonérées de cotisation minimale pendant cinq (5) exercices et imposables ensuite au taux de droit commun de 0,25%. En matière d’Impôt sur le Revenu, les salariés des « entreprises CFC » peuvent opter pour le paiement de l’IR au taux forfaitaire de 20% pour une période de 10 ans à compter de leur recrutement.
Les Zones d’Accélération Industrielle entendent conserver un cadre pour attirer les investissements étrangers destinés à l’export : Tangier Free Zone, Atlantic Free Zone (Kenitra) ou encore Oujda Free Zone… Les entreprises implantées bénéficient d’avantages fiscaux et d’un régime préférentiel en matière de commerce extérieur et de contrôle des changes.
- Liberté totale de change pour les opérations commerciales, industrielles et de services réalisées par ces entreprises avec l’étranger.
- Les règlements des opérations réalisées à l’intérieur de ces zones sont effectués en monnaies étrangères
- Avantages fiscaux : exonération de droits d’enregistrement sur acquisition de foncier, exonérations de l’IS pendant cinq (5) exercices,suivi d’un taux cible de 20%, une exonération de TVA et de la taxe professionnelle.
Limitation des incitations fiscales aux IDE :
En 2020, le Maroc a adopté une série de réformes fiscales dans le cadre de sa Loi de Finances, marquées par une volonté claire de sortir de la « zone grise » des paradis fiscaux établie par l’Union européenne (UE). Cette démarche visait à aligner le pays sur les standards internationaux de transparence fiscale tout en préservant son attractivité pour les investissements directs étrangers (IDE). La pression exercée concernait certains régimes fiscaux jugés trop avantageux, notamment dans les zones franches et pour les sociétés exportatrices. L’absence de taxation effective dans ces régimes spéciaux était assimilée à une forme d’évasion fiscale. Afin d’éviter des sanctions économiques, le Maroc s’est engagé à mettre fin à des pratiques qualifiées de « non conformes ». Seuls CFC et les ZAI disposent désormais de régimes fiscaux incitatifs plus encadrés et les holdings offshores sont désormais soumises au régime d’imposition de droit commun.
Des mesures incitatives encouragent les investissements étrangers tels que la réduction ou l’exonération de droits de douane pour les projets d’investissement. L’Etat marocain peut également conclure des conventions spécifiques avec de grands investisseurs en leur octroyant des avantages spécifiques (fiscalité, financements, accès au foncier…). La loi de finances 2025 a institué un régime d’incitation fiscale très attractif en faveur des représentations de la FIFA et des organismes affiliés au Maroc en vue d’accompagner l’implantation de son bureau régional permanent à Rabat et pour faciliter l’organisation de la Coupe du Monde 2030 (exonération d’IS, de l’IR salarial et de TVA).
Obligations et formalités :
Les investisseurs étrangers sont soumis aux obligations légales imposées aux personnes physiques et morales de droit marocain.
- Immatriculation et création d’entreprise : Les investisseurs doivent obtenir un identifiant commun de l’entreprise (ICE), s’identifier auprès de l’administration fiscale et enregistrer leur entreprise auprès du Registre du Commerce pour acquérir la personnalité morale.
- Respect de la réglementation des changes : L’Office des Changes régule les opérations de transfert de devises au Maroc. Les IDE doivent être déclarés et conformes à sa réglementation afin de faciliter tout rapatriement ultérieur de fonds et de bénéfices.
- Fiscalité locale : Les entreprises doivent se conformer aux obligations fiscales de la convention de non-double imposition si celle-ci est signée avec le pays d’origine de l’investisseur ou au régime de droit commun du Code Général des Impôts si les dispositions sont plus favorables que la convention.
- Droit du travail : Les investisseurs doivent respecter la législation sociale marocaine, notamment en ce qui concerne les contrats de travail et la sécurité sociale. Il est vivement conseillé à l’investisseur de se renseigner sur la procédure spécifique de recrutement des salariés étrangers au Maroc avant toute promesse d’embauche.
Respect des normes internationales en matière de transparence :
Le renforcement des obligations déclaratives des entreprises, notamment sur les prix de transfert, pour limiter les pratiques d’érosion fiscale et de transfert de bénéfices pour les opérations entre sociétés de droit marocain et sociétés étrangères du même groupe.
Conclusion
En sortant de la zone grise des paradis fiscaux avec la loi de finances 2020, le Maroc a renforcé sa crédibilité et sa conformité aux normes internationales, attirant ainsi des investisseurs plus qualitatifs sensibles à la stabilité juridique et fiscale. Une attractivité durable et responsable des IDE, en adéquation avec les exigences internationales et le défi de la directive de lutte contre le blanchiment.
Le maintien de bonnes relations avec l’UE a permis de continuer à bénéficier d’accords commerciaux avantageux et de financements. La réforme fiscale a finalement incité les investisseurs à s’intéresser davantage aux secteurs à forte valeur ajoutée (industries, technologies, services), plutôt qu’à de simples opérations d’optimisation fiscale à court-terme. La fin de régimes fiscaux ultra-avantageux a dissuadé certains investisseurs mais en a encouragé de nombreux autres. Malgré cette réforme contraignante, notre pays conserve ses solides atouts.
La nouvelle Charte de l’investissement, adoptée en 2022, vise à renforcer l’attractivité du Maroc pour les investisseurs étrangers en leur offrant des garanties solides. Elle vise à créer un climat d’affaires propice, sécurisant ainsi les investissements étrangers et contribuant au développement économique.
Les IDE représentent donc un enjeu de concurrence et de rivalités entre pays limitrophes pour des raisons évidentes de potentiel de croissance économique. Le Maroc est aujourd’hui un modèle de réussite dans la région. Perçu comme une source de financement et de développement, il favorise les transferts de technologies, l’innovation, la formation et l’emploi. Le pays a, depuis longtemps, placé la captation des IDE au cœur de sa stratégie de développement. Cette décision associe les investisseurs étrangers à cette vision. Un climat des affaires stable, une administration efficace et des mesures incitatives ciblées maintiendront le Maroc parmi les destinations les plus prisées d’Afrique pour les investisseurs étrangers.