Crédits photo : Anas Zaidaoui/LNT
Malgré des progrès dans la représentation des femmes dans les médias, les personnes en situation de handicap restent largement sous-représentées.
Dans un effort continu pour promouvoir une société plus égalitaire, 2M élargit cette année le Trophée Tilila, en intégrant la question de l’inclusion des personnes en situation de handicap (PSH) dans la publicité. Événement phare du secteur de la communication publicitaire au Maroc, le Trophée Tilila, qui lutte contre les stéréotypes féminins, adopte une démarche plus inclusive lors de sa sixième édition.
Khadija Boujanoui, présidente du Comité Parité et Diversité, a affirmé que la publicité a un rôle crucial dans l’influence des mentalités. Elle appelle les marques à représenter authentiquement les personnes en situation de handicap, afin de promouvoir une vision positive de leur réalité et de reconnaître leurs talents.
De son côté Salim Cheikh, DG de 2M, a affirmé que « la publicité inclusive doit devenir une réalité pour toutes les composantes de la société », soulignant l’importance de représenter le handicap, qui touche une famille sur quatre au Maroc. Cette initiative fait suite à la publication de la Charte sur le handicap en 2020, réaffirmant ainsi l’engagement de 2M pour une meilleure représentation des PSH dans les médias.
La remise des prix se tiendra le 10 octobre 2024, récompensant les publicités ayant le mieux illustré la parité et l’inclusion. Un jury composé de Sanaa Akroud (productrice, réalisatrice, scénariste et comédienne), Rabii Kati (acteur et comédien), Zhor Fassi Fihri (réalisatrice et productrice), Mohamed Achaour (réalisateur, scénariste et producteur), Siham El Mechtani El Idrissi (experte en stratégie de croissance, marketing et innovation) et Ali Boujena (expert en stratégie marketing et communication) sera chargé de départager les dix spots présélectionnés.
Parallèlement, 2M organise TILILAB, un concours de création pour former la nouvelle génération de publicitaires aux valeurs d’égalité, diversité et inclusion, avec cette année un focus sur le thème « Handicap et inclusion sociale ».
Le handicap au cœur des campagnes publicitaires
Lors d’un panel sur la question de la représentation des personnes en situation de handicap dans les campagnes publicitaires, Reda Taleb, DG d’Officium, a salué les efforts du Comité Parité et Diversité pour aborder des sujets cruciaux, tout en pointant un manque de prise en charge de cette problématique. Il a souligné que l’inclusion des personnes handicapées, notamment dans les campagnes publicitaires, est souvent négligée en raison d’une absence de visibilité dans la société, un phénomène également relevé dans les médias, les institutions et les écoles. M. Taleb a insisté sur l’importance de sensibiliser les marques et les publicitaires à cette question. Selon lui, le point de départ de tout changement est la prise de conscience, un processus qui commence avec des initiatives comme celles du comité. Il a également mentionné que 25 % des ménages sont directement concernés par le handicap, un chiffre significatif qui devrait pousser les annonceurs à aborder le sujet avec plus de sérieux et d’engagement. Taleb a encouragé une approche plus inclusive dans les stratégies de communication, où le handicap n’est pas traité comme une obligation liée à la responsabilité sociale des entreprises (RSE), mais comme une réalité sociale à intégrer pleinement dans les campagnes publicitaires.
Rachid Hamdad, DG de TBWA/ALIF, a ensuite pris la parole pour aborder les freins à une représentation plus inclusive des personnes en situation de handicap dans la publicité. Selon lui, l’absence de personnes handicapées dans les publicités reflète leur invisibilité plus générale dans la société. Hamdad a souligné que cette population, qui compte plus de 2,3 millions de personnes, est marginalisée dans plusieurs secteurs, notamment les médias, le cinéma, les administrations et l’éducation. Il a noté que, souvent, les agences publicitaires n’intègrent pas cette dimension dans leurs stratégies de communication, car elles n’y pensent pas ou croient que les annonceurs ne s’y intéressent pas. Pour lui, la publicité a la responsabilité de sensibiliser à cette cause et de promouvoir des exemples concrets et réussis de campagnes inclusives. Il a également rappelé l’importance de ne pas rendre ces efforts artificiels, mais de les intégrer de manière naturelle et pertinente dans les scripts publicitaires. Enfin, il a mentionné l’intérêt pour certaines marques de concevoir des produits spécialement adaptés aux personnes handicapées, soulignant que l’inclusion ne doit pas se limiter à une niche, mais toucher l’ensemble de la société.
Lors de son intervention Youssef Cheikhi, président du Groupement des Annonceurs du Maroc, a insisté sur l’importance de ne pas aborder le handicap de manière superficielle dans les campagnes publicitaires. Il a souligné que les personnes en situation de handicap représentent 15 % de la population mondiale et qu’elles ont un pouvoir d’achat conséquent. M. Cheikhi a donné des exemples de marques comme Apple, Nike et Tommy Hilfiger qui intègrent ces populations de façon naturelle et efficace. Il a rappelé que la publicité doit jouer un rôle actif dans l’évolution des perceptions, notamment en impliquant les personnes handicapées dans la création des campagnes, aussi bien devant que derrière la caméra. Enfin, il a souligné l’importance de rendre la publicité plus accessible, en utilisant des techniques comme le sous-titrage et l’audiodescription.
Asmaa Loudni