La période de clôture des comptes de 2022 est ouverte pour les entreprises, les déclarations de leurs résultats et le dépôt de leur bilan fiscal s’impose à fin mars prochain. Cette année est chargée de changements apportés par la Loi de finance 2023 qui a introduit différentes mesures transitoires, au titre de la réforme fiscale qui s’étale sur 4 ans jusqu’en 2026. En conséquence, pour différents impôts pour les 4 prochaines années, les taux peuvent changer d’une année à l’autre. A cet effet les entreprises et personnes physiques doivent s’informer de ces changements pour bénéficier des baisses éventuelles et surtout ne pas se retrouver involontairement en situation de fraude.
Le cas de l’Impôt sur les Sociétés est le plus probant, la révision de ses taux intervient dans le cadre de la convergence progressive vers un taux unifié. Car, avant la loi de finances 2023, l’article 19 du CGI prévoyait que l’impôt sur les sociétés était calculé, sur la base du bénéfice réalisé, de la nature d’activité ou du secteur économique concerné, et donc les taux variaient entre 10%, 15%, 20%, 26%, 31% à 37%.
Avec la LF 2023, la réforme globale des taux de l’IS donne une vision claire du régime de cet impôt progressivement sur les quatre prochaines années. Ainsi, les taux ciblés pour 2026 selon l’article 19 du Code Général des Impôts sont : 20%, le taux unifié de droit commun applicable à toutes les sociétés ; 35%, le taux applicable aux sociétés dont le montant du bénéfice net est égal ou supérieur à 100 millions de dirhams ; et 40%, le taux applicable aux établissements de crédit et organismes assimilés, Bank Al Maghrib, la Caisse de dépôt et de gestion et les entreprises d’assurances et de réassurance.
Toutefois pour le taux 35%, des exceptions persistent dans cette catégorie d’agents économiques puisqu’il ne s’appliquera pas aux sociétés de services bénéficiant du régime fiscal « Casablanca Finance City », qui bénéficiant d’un taux d’IS de 7% depuis la création de la place, seront dorénavant taxées à 20 %. Le taux de 35% ne sera pas non plus appliqué aux entreprises qui exercent leurs activités dans les zones d’accélération industrielle et aux sociétés créées à compter du 1er janvier 2023 qui s’engagent dans le cadre d’une convention signée avec l’État à investir un montant d’au moins 1,5 milliards de dirhams durant une période de cinq ans, à compter de la date de signature de cette convention. Bien sûr, il faut que les entreprises concernées investissent ce montant dans des immobilisations corporelles qu’elles conservent pendant au moins dix ans pour qu’elles soient soumises au taux de 20% seulement au titre des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2023.
Sur la base de l’étendue de cette réforme sur les 4 prochaines années, la DGI a fixé les taux d’IS applicables pendant la période transitoire allant du 1er janvier 2023 au 31 décembre 2026. Donc les précédents taux d’IS de 10%, 15%, 20%, 26%, 31% et 37% seront majorés, minorés ou maintenus, selon le cas comme le montre le tableau ci-dessous. Et les acomptes provisionnels dus, au titre de chaque exercice ouvert durant cette période, seront calculés selon les taux d’impôt sur les sociétés applicables à cet exercice.
Pour ce qui concerne l’IS et dans le but de rationaliser les incitations fiscales, conformément aux dispositions de la loi-cadre portant réforme fiscale, la LF 2023 a limité l’application de l’exonération totale de l’IS accordée aux sociétés ayant le statut « Casablanca Finance City », à l’expiration des 60 premiers mois suivant la date de leur constitution dans le but d’orienter ladite exonération quinquennale vers les sociétés nouvellement créées. Toutefois, afin de sauvegarder la compétitivité et l’attractivité de ce pôle financier, la LF 2023 vient d’instituer une mesure permettant auxdites sociétés de services de CFC, de constituer des provisions pour investissement déductibles, dans la limite de 25 % du bénéfice fiscal après report déficitaire.
Lesquels investissements doivent être réalisés dans des titres de participation, au cours de l’exercice comptable suivant celui de la constitution des provisions en question et que l’entreprise concernée doit conserver pendant au moins quatre ans, à compter de la date de leur acquisition et avant impôt.
Par ailleurs, compte tenu de la démarche progressive sur quatre ans, retenue pour le relèvement du taux spécifique de l’IS de 15% à 20% en faveur de ces sociétés, l’article 247- du CGI a fixé les limites des taux admis pour la constitution des provisions pour investissement au titre de chaque exercice ouvert durant la période allant du 1er janvier 2023 au 31 décembre 2026, soi 7,70% en 2023, 14,30% en 2024, 20% en 2025 et 25% en 2026.
Selon le même principe, le taux de la retenue à la source sur les produits des actions, parts sociales et revenus assimilés connaîtra une réduction progressive sur les 4 années précitées. Ainsi le taux de l’impôt sur les sociétés (IS) retenu à la source sur le montant des produits des actions, parts sociales et revenus assimilés qui était de 15% avant 2023 devrait baisse progressivement vers 10%, à fin 2026, selon l’évolution suivante, 13,75% au titre de l’exercice 2023, 12,50% pour 2024, 11,25% pour 2025 et 10% en 2026. Avec la grande précision que les produits des actions, parts sociales et revenus assimilés distribués et provenant des bénéfices réalisés au titre des exercices ouverts avant le 1er janvier 2023, resteront soumis au taux de 15%.
Pour ce qui concerne l’impôt sur les Sociétés, IS, et dans l’objectif de la rationalisation des avantages fiscaux, certaines entreprises financières installées dans les zones d’accélération industrielles (ZAI) bénéficiaient des avantages fiscaux prévus en faveur de ces zones, alors même que d’autres similaires, qui rendent les mêmes prestations à ces zones de l’extérieur, étaient soumises aux règles de droit commun. La LF 2023 vient d’exclure les entreprises financières, notamment les établissements de crédit et les entreprises d’assurances et de réassurance ayant cette qualité, des avantages des ZAI.
En conclusion, l’IS évolue à travers deux principes, l’uniformisation de son taux et l’harmonisation de son étendu aux entreprises, secteurs et activités. Ainsi, l’ambition de la réforme fiscale tant attendue, celui de la suppression des niches fiscales, est clairement affiché avec l’espoir de voir l’assiette fiscale s’élargir, pour plus de justice fiscale et de recettes budgétaires…
Afifa Dassouli