Un hélicoptère de combat Tigre (g) sur la base militaire de l'armée française, le 8 novembre 2019 à Gao, au Mali © AFP/Archives MICHELE CATTANI
Treize militaires français de l’opération Barkhane ont trouvé la mort lundi soir au Mali dans la collision de deux hélicoptères engagés dans une mission de combat contre des jihadistes, dans un contexte sécuritaire alarmant au Sahel.
Il s’agit du plus lourd bilan humain essuyé par les militaires français depuis le début de leur déploiement au Sahel en 2013, et l’une des plus grandes pertes de l’armée française depuis l’attentat du Drakkar au Liban en 1983, qui avait fait 58 morts.
L’accident est survenu lundi soir pendant une « opération de combat » dans le Liptako, dans la région de Ménaka, aux confins du Mali, du Niger et du Burkina Faso, où la force antijihadiste française Barkhane mène régulièrement des opérations contre les groupes armés, dont le groupe Etat islamique Grand Sahara (EIGS).
« Ces treize héros n’avaient qu’un seul but: nous protéger », a réagi sur Twitter le président français Emmanuel Macron, qui, dans un communiqué, a parallèlement salué « avec le plus grand respect la mémoire de ces militaires de l’armée de terre, six officiers, six sous-officiers, et un caporal-chef, tombés en opération et morts pour la France dans le dur combat contre le terrorisme au Sahel ».
« Cette terrible nouvelle endeuille nos armées, la communauté de défense et la France toute entière », a déclaré la ministre des Armées, Florence Parly. « Une enquête (a été) ouverte afin de déterminer les circonstances exactes de ce drame ».
Un hommage national, présidé par le président de la République, sera rendu aux victimes « dans les jours prochains », a ajouté la ministre.
Le gouvernement du Mali et le président du Burkina Faso, Roch Marc Christian Kaboré, ont exprimé mardi via les réseaux sociaux leur solidarité avec la France, dont les militaires combattent les jihadistes aux côtés de leurs armées nationales.
« C’est l’Europe toute entière qui est en deuil, car au Mali comme ailleurs c’est l’armée française qui défend l’honneur et la sécurité de l’Europe », a de son côté réagi le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker.
Parmi les victimes figure le fils de l’ancien ministre et sénateur centriste français Jean-Marie Bockel, a confirmé ce dernier à l’AFP. Sept des militaires tués appartenaient au 5e régiment d’hélicoptères de combat de Pau (sud-ouest), et quatre autres au 4e régiment de chasseurs de Gap (sud-est).
Le général François Lecointre, chef d’état-major des Armées, a précisé que « des commandos parachutistes avaient observé, lundi vers 17H15, un groupe d’ennemis équipé d’un pick-up et de plusieurs motos ».
« Ils sont entrés en contact par le feu avec cet ennemi (…) et ont fait appel à des moyens aériens », a-t-il ajouté. Deux hélicoptères Tigre et un Cougar sont arrivés rapidement sur zone.
« Pendant cette opération de reconnaissance de nuit, pour repérer le pick-up qui s’enfuyait vers le Nord, les commandos au sol ont entendu deux explosions. Ils ont pensé qu’elle était due à une collision en vol entre deux appareils. L’information est confirmée rapidement par le Tigre qui reste en vol », a ajouté le général Lecointre.
« Ils sont intervenus dans des conditions opérationnelles très exigeantes » et, étant des engins militaires, n’étaient pas équipés de dispositifs anticollision, a précisé le général Leointre.
L’accident a été fatal aux treize soldats qui étaient à bord des deux appareils.
– 41 Français tués au Sahel –
Cet accident porte à 41 le nombre de militaires français tués au Sahel depuis le début de l’intervention française en 2013, avec l’opération Serval, selon un décompte effectué à partir de chiffres publiés par l’état-major.
L’opération Barkhane, qui a succédé à Serval depuis août 2014, mobilise 4.500 militaires français dans la bande sahélo-saharienne, une étendue vaste comme l’Europe, en soutien aux armées nationales qui combattent des jihadistes affiliés au groupe Etat islamique (EI) ou à Al-Qaïda.
Mais six ans après le début de l’intervention française, les violences jihadistes persistent dans le nord du Mali et se sont propagées au centre du pays ainsi qu’au Burkina Faso et au Niger voisins. Depuis 2012, les hostilités, doublées de violences intercommunautaires, ont fait des milliers de morts et déplacé des centaines de milliers de civils.
Et malgré les efforts de formation déployés par l’Union européenne, la Mission des Nations unies au Mali (Minusma) et Barkhane, les armées nationales des pays sahéliens, parmi les plus pauvres au monde, semblent incapables d’enrayer la progression des attaques.
Quarante-trois soldats maliens ont été tués mi-novembre dans une attaque dans l’est du pays, près de la frontière nigérienne, s’ajoutant à une centaine de militaires maliens morts dans deux attaques jihadistes en un mois cet automne dans les mêmes confins du Mali, du Niger et du Burkina Faso.
Lors d’une récente tournée au Sahel, la ministre française des Armées avait prôné la « patience » dans la guerre contre les jihadistes au Sahel. « Barkhane ne s’enlise pas. Barkhane s’adapte en permanence », avait-elle assuré.
LNT avec Afp