Emmanuel Macron à l'Elysée le 17 mai 2017 © AFP STEPHANE DE SAKUTIN
Pendant la campagne, Emmanuel Macron était dépeint par ses détracteurs comme le candidat des grandes entreprises: aujourd’hui, les petits patrons s’interrogent sur la capacité du nouveau président à être à l’écoute de leurs préoccupations.
Si le chef de file d’En marche! a pu bénéficier pendant la campagne de nombreux soutiens parmi les grands patrons, c’était moins le cas chez les petits chefs d’entreprises, plus circonspects.
D’autant que l’ancien ministre de l’Economie les a heurtés à plusieurs reprises lorsqu’il était à Bercy, en particulier sur la question des qualifications des artisans, ou des micro-entrepreneurs, qui bénéficient d’un régime fiscal plus favorable et viennent concurrencer les entreprises traditionnelles.
« L’idée que c’est le candidat du Medef est un sentiment très présent » parmi les petits patrons, confie à l’AFP Marc Sanchez, président du Syndicat des indépendants (SDI), organisation qui entend représenter les entreprises de moins de 20 salariés et qui revendique 25.000 adhérents.
Pour Luc Nadaud, artisan spécialisé dans l’aménagement de piscine, installé près d’Aubusson dans la Creuse, « le candidat de la finance, des grands groupes, c’est l’image qu’il traîne de par son passé ».
Le chef de l’Etat, énarque, est issu du corps de l’Inspection générale des finances – dont il a démissionné l’an dernier – et a fait une incursion dans le privé en travaillant comme associé dans la banque d’affaires Rothschild.
Un parcours qui lui a souvent été reproché pendant la campagne, en particulier par la candidate du Front national Marine Le Pen, qui a fait du soutien aux petites entreprises le coeur de son programme économique.
– « Pas cette culture » –
« Il n’a pas cette culture-là, il a des choses à apprendre sur cette réalité » économique, estime M. Sanchez, qui pointe notamment l’absence de réflexion de la part de M. Macron sur « le financement des crédits de trésorerie », véritable problème pour les TPE.
Emmanuel Macron « a un programme relativement libéral », observe pour sa part Luc Nadaud, qui, même s’il n’a pas voté pour lui au premier tour, juge que libérer les contraintes de travail pesant sur les très petites entreprises (TPE) n’est « peut-être pas une mauvaise chose ».
« Maintenant, est-ce qu’il va pouvoir le faire? je suis relativement dubitatif », ajoute-t-il.
Et l’annonce du nouveau gouvernement conforte les petits patrons dans leurs interrogations.
Dans un communiqué publié jeudi, l’Union des entreprises de proximité (U2P), qui représente artisans, commerçants et professions libérales, s’est étonnée « de ne voir aucun portefeuille ministériel se référer aux priorités des entreprises qu’elle représente pourtant mises en avant par Emmanuel Macron en amont du scrutin présidentiel ».
L’Assemblée permanente des chambres de métiers et de l’artisanat (APCMA) s’est elle aussi émue de voir que l’artisanat, confié à Martine Pinville dans le gouvernement sortant, était « le grand absent du gouvernement Philippe ».
Nathalie Bergère, à la tête avec son mari de deux petites entreprises de plomberie-chauffage et d’électricité dans la Mayenne, se dit « déçue » de ne pas savoir à qui revient le portefeuille.
Ce pan du tissu économique est « souvent un peu mis de côté », dit-elle. « Pourtant, quand on sait ce que les TPE-PME représentent en nombre d’emplois… », souffle la chef d’entreprise. « Et nous on ne délocalise pas, on paie nos impôts en France ».
La Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) plaide de son côté auprès du nouvel exécutif pour qu’une « loi-cadre TPE-PME » soit adoptée dès le début de la législature afin de donner de la visibilité aux chefs d’entreprise « sur l’évolution du coût du travail, de la fiscalité ou des règles sociales ».
« Il y a tellement eu pendant cette campagne de bienveillance vis-à-vis des PME et des TPE que nous pensons qu’il serait judicieux de passer des paroles aux actes », estime François Asselin, président de l’organisation patronale, qui a dit à l’AFP être en contact avec l’équipe de M. Macron sur cette question.
LNT avec AFP